Sidiailles
Depuis l'an dernier, Jean-Lou Joulin installe dans les petits villages du sud du Cher son bar itinérant le "Bar'Ouette". De quoi recréer du lien social dans les petites communes du Berry. Reportage.
Dans les années 60, on recensait 200 000 bistros en France. 50 ans plus tard il n'étaient plus qu'environ 35 000, une chute brutale. Évidemment, ce sont d'abord les villages qui trinquent où plutôt qui ne trinquent plus, à moins de prendre la voiture pour rejoindre la ville la plus proche, pas toujours facile. D'après l'initiative "1 000 cafés" 26 000 communes n'ont plus de bar, sur les 35 000 clochers que compte la France... des lieux de convivialité et de rencontre qui manquent aux habitants. C'est à partir de ce constat que Jean-Lou Joulin a décidé de lancer son bistrot itinérant sur les routes du sud du Cher, l'an dernier.
Autour de Saint-Amand-Montrond, les beaux paysages de la campagne berrichonne, mais surtout le calme dans les villages. Pas moyen de boire un verre, sauf en rejoignant la sous-préfecture. C'est le cas de Faverdines. Un petit village d'environ 130 habitants qui a la chance d'avoir encore un restaurant, mais évidemment pas de café. La commune est sur la tournée de Jean-Lou, qui trimballe son "Bar'Ouette" dans 9 villages du territoire, en alternance une semaine sur deux, du mardi au samedi de 17 h à minuit. Il a installé son camion et la terrasse juste en face de l'étang, dans un très beau cadre malgré la pluie. Pas très grave, l'endroit est abrité. À la carte ? « De la bièrre locale, du vin local, des softs qui ne sont malheureusement pas locaux et puis du sirop, du café, du thé... » détaille le patron.
À 18 h, les habitants sont encore timides, les tables restent désespérément vide et la tireuse à bière s'impatiente. L'orage se calme enfin, mais il y a toujours quelques gouttes. Les premiers clients commencent à pointer le bout de leur nez aux alentours de 19 h. Bruno a opté pour un kir : « J'ai pris un Berrichon, c'est du vin rouge avec de la crème de mûr, c'est plutôt bon ! ». Cet habitant de Faverdines a bravé le mauvais temps en famille, mais ça vaut le coup : « Pour boire un verre le soir quand on habite en pleine campagne, il n'y a pas grand-chose. Quand il y a des bars, ils ferment tôt... Aujourd'hui, tout le monde voudrait avoir des services directement livrés chez soi, le Bar'Ouette lui, se déplace dans les petites communes, ce qui permet de profiter d'un moment pour boire un verre ailleurs qu'à la maison. On peut rencontrer les gens du coin ou d'ailleurs... et profiter pleinement de tout ça ! »
Jean-Lou Joulin s'est inspiré d'une initiative similaire lancée il y a quelques années par Sébastien Cherrier à l'est de Bourges. Son Bar-truck "c'est l'occaz" a profité d'une belle couverture des médias locaux et nationaux. Le bar itinérant, c'est une bonne manière de (re)créer du lien social dans les villages qui n'ont plus de bistrot depuis longtemps pour Jean-Lou : « C'est plus agréable de sortir les gens d'une espèce de torpeur et de marasme que de les voir s'y enfoncer... j'ai vécu à Paris, là-bas on disait "métro, boulot, dodo". Ici, c'est "auto, boulot, dodo", et je ne sais pas comment on peut se contenter de ça. Nous, on ramène du lien, les bistrots, c'était ça, une connexion entre les hommes ! Ce sont des beaux moments à passer... ici et ailleurs, les jeunes rencontrent les vieux et vice-versa, c'est ça le lien social ! ». Presque un sacerdoce pour le patron du "Bar'Ouette", qui ne se verse pas de salaire.
Du côté des habitants, la formule du "Bar'Ouette" fonctionne : « À l'heure des réseaux sociaux, ça fait du bien de se retrouver, il n'y a pas que le portable dans la vie ! » lance David, bière ambrée à la main. « C'est une bonne chose, ça permet de boire un verre en rentrant le soir, c'est sympa » apprécie de son côté Anzo, 18 ans, installé en terrasse. Sa mère Lidwine ne dit pas autre chose : « Oui, c'est très sympa ! Ça ramène du monde et ça fait un peu d'activité. L'essentiel, c'est d'être ensemble ! ». Tout est dit.
Peut-être que la bière locale tient chaud, ou sans doute est-ce la chaleur humaine, en tout cas, une chose est sûr, Jean-Lou Joulin n'a pas peur du froid puisqu'il va continuer ses tournées jusqu'en décembre. Il reprendra la route la saison prochaine à partir de mars. Santé !
Les communes ou s'installe le Bar'Ouette
Semaines paires (du mardi au samedi) ! Drevant, Bouzais, Morlac, Marçais, Orcenais.
Semaines impaires (du mardi au samedi) : Ineuil, Faverdines, Epineuil, Nozières, Orcenais.
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