Un quotidien titrait hier, "Emmanuel Macron a-t-il la foi ?" à vrai dire cela ne me regarde pas et sa quête spirituelle ne concerne que lui. Nous sommes en laïcité et c’est bien ainsi, laissant la liberté et aux uns et aux autres et nous obligeant tous au respect. Par contre j’espère bien qu’il a foi dans la rencontre, dans la reconnaissance de ce qu’il peut apprendre de l’autre en sa différence, y compris de cette sagesse qu’il appelait de ses vœux lors de sa venue au Collège des Bernardins en avril dernier.
Le président de la République française va à Rome pour recevoir son titre de chanoine honoraire de la Basilique du Latran. Si pareil titre sonne désuet à nos oreilles "post-modernes" le symbole à son importance.
Le Latran est la cathédrale de l’évêque de Rome depuis Constantin au IVe siècle. Et depuis le XIIIe s. où les papes préférèrent résider près de Saint-Pierre, s’y instaura une longue tradition francophile, les rois de France successifs s’attachant à développer leurs liens avec Le Latran en concédant revenus et œuvres d’art. C’est sur cette tradition que s’est appuyé Henri IV, dans ses négociations avec la papauté pour faire reconnaître son passage au catholicisme et la légitimité de ses droits au trône.
À son tour, en remerciements des libéralités du roi, le chapitre de la basilique lui donna le titre de chanoine honoraire. La France s’inscrivait alors dans la géopolitique romaine aux côtés de l’empereur germanique, chanoine de Saint-Pierre, du roi d’Espagne chanoine de Sainte-Marie-Majeure et, avant la Réforme, des rois d’Angleterre chanoines de Saint-Paul-hors-les-murs… Les chefs d’État français ont hérité de cet honneur tout symbolique, qui signe un lien singulier entre la diplomatie vaticane et la France.
C’est dans cette longue histoire, qui ne touche en rien notre principe de laïcité, que s’inscrit Emmanuel Macron. Aujourd’hui dans le monde incertain où nous vivons, il nous faut espérer que la rencontre du pape François et du président français, tous deux attentifs à la complexité des choses, puisse faire avancer la fameuse troisième voie humaniste - entre capitalisme libeÌral et marxisme, chère à Emmanuel Mounier et à laquelle le Président se référait aux Bernardins.
Ne doutons pas que le pape François saura faire don à Emmanuel Macron et de son engagement pour les plus vulnérables, dont aujourd’hui spécialement les migrants et réfugiés, et de sa liberté de dire à temps et à contretemps. Pour ce temps déchiré, qu’ils fassent tous deux avancer l’espoir, dont Ricœur dit : "Viser plus, demander plus. C’est cela l’espoir ; il attend toujours plus que de l’effectuable." Alors allons-y.
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