Un an après sa mort, le 5 décembre dernier, voici que nous parvient un dernier petit livre de Jean d’Ormesson, l’immortel académicien. C’est dire l’émotion qu’on peut légitimement ressentir à la lecture de ce court texte, d’autant plus qu’il revient, comme en condensé, sur les thèmes qui obsédaient l’écrivain dans les dernières années de son existence.
Se faisant scientifique, paléontologue, explorateur, Jean d’O, pour les intimes, ne cessait de réfléchir à la création du monde. Le Big bang, Darwin vu par d’Ormesson… pour tout vous dire, ce n’est pas forcément le plus intéressant, non, ce qui me touche, c’est cette inquiétude de l’homme vieillissant qui s’interroge sur les débuts du monde et les premiers pas de l’humanité. "C’est la pensée de ces primates hissés par miracle à la dignité de créatures conscientes qui permet l’éclosion de tout ce qui fait le charme et la grandeur du monde où nous vivons : le passé et l’avenir, l’histoire, le souvenir et l’attente, l’espérance et l’angoisse, la gaieté et la tristesse, la poésie, le désespoir et tout le reste…" Le reste, vous l’avez compris, c’est la mort.
De la mort, justement, Jean d’Ormesson n’a jamais eu peur de parler… Et il trouve des formules belles et lapidaires pour l’évoquer : "Inutile, si nous vivons, d’espérer échapper à la mort" écrit-il, alors que sur une page manuscrite reproduite dans le livre on peut lire : "Grâce à Dieu, je vais mourir. Comme tout le monde. Comme vous. Avant vous, sans doute ma vie est déjà longue, j’approche du bout du chemin". Rien de morbide pour autant dans ces quelques pages, non, plutôt un amour de la vie, et une reconnaissance, qu’on retrouve dans le titre Un Hosanna sans fin : "Quelle qu’elle soit, la vie est belle", écrit-il encore. Comme un appel à être attentif à soi, aux autres, à la vie qui nous est donnée, et cette invitation à goûter l’existence : "La pensée des hommes est l’enchantement du monde".
Un petit livre, qui peut aussi nous inviter à relire d’Ormesson le romancier. Les romans comme Histoire du juif errant, Au plaisir de Dieu », mais aussi les derniers textes regroupés dans le tome 2 de la Pléiade qui vient de sortir, La douane de mer ou les écrits plus philosophiques comme C’est une chose étrange à la fin que le monde. Il y a de l’enthousiasme, de l’énergie, de l’ampleur dans l’écriture de d’Ormesson, comme une urgence de vivre, de remplir à ras-bord les 92 années d’une vie bien remplie, marquée par l’inquiétude, l’énergie, le panache, le doute et la foi ensemble… A quelques jours de Noël, comment ne pas reprendre ces lignes : "Je ne prétends pas que Dieu existe : je n’en sais rien. (…) Mais il est permis d’admirer et d’aimer Jésus sans trop se poser de questions. Si quelqu’un a laissé une trace éclatante dans l’esprit des hommes, c’est bien le christ Jésus".
Un hosanna sans fin, Jean d’Ormesson, publié aux éditions Héloïse d’Ormesson.
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