Les mésaventures de Novak Djokovic en Australie ont soulevé plusieurs questions : comme le joueur de tennis, les autres sportifs non-vaccinés seront-ils écartés des compétitions ? Quelles mesures mettre en place ? Est-ce suffisant pour limiter les contaminations ?
Un visa annulé, malgré une exemption de vaccination due à un test positif au Covid-19. Quelques jours dans un centre de rétention, avant d’être libéré… Puis un second visa annulé. Depuis son arrivée à Melbourne, le 5 janvier, Novak Djokovic a vécu de nombreux rebondissements. Certains estiment que le numéro 1 mondial du tennis ne s’est pas plié à l’obligation vaccinale, et qu’il ne devait donc pas disputer l’Open d’Australie, qu’il a remporté à neuf reprises. D’autres pensent que l’affaire a pris de trop grandes proportions. C’est le cas, par exemple, de Romain. À 28 ans, cet ancien rugbyman de haut niveau a choisi, comme Novak Djokovic, de ne pas se faire vacciner. "Je n’en ressens pas le besoin, avoue-t-il, lui qui joue désormais à Ampuis (Rhône). Je suis en bonne santé, jamais malade et je n’ai pas de comorbidité. Si je calcule le rapport bénéfice-risque, je n’en vois pas l’intérêt."
Le corps d’un sportif de haut niveau peut-il, en effet, davantage faire face au Covid-19 ? Pour le docteur Alain Frey, c’est avant tout une question d’âge. "Je ne mets pas à part le sportif de haut niveau par rapport à une personne du même âge qui ne l’est pas, explique le coresponsable du service de médecine du sport à l’hôpital de Poissy/St Germain (Yvelines), et médecin de l’équipe de football du Red Star. Entre 15 et 30 ans, les capacités immunitaires arrivent à se défendre, sauf exception des immunodéprimés." Malgré tout, le docteur Frey recommande à tous les sportifs de se faire vacciner. C’est aussi la solution qui a été choisie au sein de l’équipe de France féminine de handball. "On a réfléchi à cette question avant les Jeux olympiques, se souvient le docteur Cindy Conort, qui fait partie du staff médical. On a fait une réunion tous ensemble. J’ai expliqué aux joueuses comment fonctionnaient les vaccins et quels seraient les bénéfices. Et tout le monde a décidé de se faire vacciner." La vaccination a d’ailleurs été obligatoire pour participer au championnat du monde de handball féminin, en décembre 2021. Elle ne l’est pas encore en France, pour les sportifs.
Mais ils devraient bientôt être soumis au pass vaccinal : c’est ce qu’a récemment confirmé Roxana Maracineanu, la ministre déléguée aux Sports. Elle a également précisé que des athlètes étrangers, comme Novak Djokovic, pourraient participer aux grandes compétitions organisées sur le sol français. Une exception que ne comprend pas Michel Savin. Dans le cadre des débats parlementaires concernant le projet de loi qui prévoit de transformer le pass sanitaire en pass vaccinal, le sénateur Les Républicains de l’Isère avait proposé un amendement pour exclure également du dispositif les sportifs français professionnels et de haut niveau. "On va donner une dérogation aux athlètes étrangers mais pas aux Français qui ont un suivi régulier avec les clubs ou les entraîneurs", souligne l’élu, en posant aussi la question de l’évolution du contrat de travail de ces sportifs non-vaccinés, s’ils ne peuvent plus exercer leur métier.
L’instauration du pass vaccinal ne perturbe d'ailleurs pas que les professionnels. Les clubs amateurs commençaient à reprendre vie, après une période compliquée, en 2020, où ils ont perdu beaucoup de licenciés et de bénévoles. Alors, Fabrice Canet accueille cette nouvelle restriction avec appréhension : "Il y avait déjà des tensions avec certains parents concernant le pass sanitaire, regrette le président de la Saint-Charles Charenton Saint-Maurice, un club de basketball situé en région parisienne. Je n’avais pas envie de le faire, mais j’ai été obligé par la municipalité à contrôler ces pass. J’aurais préféré que ce soit le rôle d’autres personnes détachées du lien que nous avons avec les licenciés."
D’autant qu’à cela, s'ajoute la gestion des cas positifs qui se multiplient, et qui entraînent le report de plusieurs rencontres, puisque la vaccination n’empêche pas les contaminations. Chaque club a donc prévu un protocole, pour les athlètes testés positifs et qui peuvent parfois avoir des symptômes, notamment respiratoires ou cardiaques. Dans le football, ceux qui n’en ont plus peuvent reprendre l’entraînement au bout de cinq jours, s’ils sont négatifs. Ensuite, il faut tenir le rythme du calendrier : c’est le défi que vont devoir relever les joueurs de l’Union sportive du littoral de Dunkerque. Depuis le 29 décembre, 14 footballeurs ont été testés positifs. "On va devoir rattraper les matchs reportés, note Nicolas Buteau, le préparateur physique de ce club de Ligue 2. On aura eu un mois sans match, et maintenant on va devoir les enchaîner tous les trois jours pendant deux semaines. C’est difficile à gérer, car on ne sait pas dans quel état vont revenir les joueurs." Pour la 21e journée de Ligue 2, trois matchs ont pour l’instant été reportés.
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