Aujourd’hui, c’est la Journée Internationale des personnes âgées. Je pourrais vous parler de chiffres, de démographie, de droits, de solitude, de mort sociale, de belles initiatives solidaires ou de je ne sais quoi. Et bien non.
Je vais vous parler d’un mot. "Vieillir". Voilà bien un mot qui n’a pas la côte. Sauf si on parle de fromage ou de vin ! Moins quand on parle d’un être humain… Et pourtant. C’est notre sort commun. Moi voyez-vous je ne compte plus les cheveux blancs que j’ai la flemme de cacher et à 43 ans je ne me lève plus le matin comme à 20.
Vieillir, on le fait tous. Mais on n’aime pas y penser, encore moins de manière positive dans notre culture occidentale. Forcément, on a tendance à ne voir que ce qu’on perd, et moins ce qu’on gagne. On pense la vie comme un sablier qui s’écoule. On déplore, alors, que le temps qui nous reste à vivre diminue, inlassablement. Mais nous pourrions retourner notre regard. Et contempler plutôt notre vie qui grandit. Et se dire waouh, un jour de plus s’est encore ajouté à ma vie. Ceux qui se savent condamnés par la maladie font exactement cette expérience profonde et aimeraient tant nous la laisser en héritage. Ils nous supplient d’apprendre à vivre.
Alors certes, vieillir n’est pas toujours une partie de plaisir. On sent ses forces physiques qui s’amenuisent autant qu’on sent douloureusement des endroits de son corps méconnus jusqu’alors. Le temps fuit, et avec lui, les vessies aussi… Il y malgré tout des vieillesses sereines. J’ai lu cet été un merveilleux petit livre, qui date un peu mais qui n’a pas pris une ride. Un livre à deux voix puissantes, celle de Marie de Hennezel et celle de Bertrand Vergely. Il s’appelle "Une vie pour se mettre au monde" et j’avoue qu’il m’a fait fondre.
Il y a des vieillesses sereines, nous disent-ils. Elles le sont parce qu’elles vivent dans la maturité de ce qui leur arrive. Elle ne se perdent pas dans de vains combats. Elles n’essayent pas de lutter contre le temps en essayant de jouer à être jeunes. Elles vivent le présent comme un "présent" et non comme une offense qui leur ait faite.
Résultat : elles sont mieux que jeunes, elles sont vivantes.
Les jeunes sont portés par la vie. Les vieillards portent la vie. Ils la portent en disant OUI à ce qu’ils sont, malgré l’âge, les épreuves, les difficultés. C’est ce qui leur donne la lumière. C’est un OUI qu’ils s’adressent à eux-mêmes et à la vie.
Victor HUGO, dans un de ses poèmes raconte Booz, un homme de 80 ans.
"Les femmes regardaient Booz plus qu'un jeune homme,
Car le jeune homme est beau, mais le vieillard est grand.
Le vieillard, qui revient vers la source première,
Entre aux jours éternels et sort des jours changeants ;
Et l'on voit de la flamme aux yeux des jeunes gens,
Mais dans l'œil du vieillard on voit de la lumière".
Blanche Streb est essayiste, chroniqueuse, conférencière, auteure de "Éclats de vie" (éd. Emmanuel, 2019) et "Bébés sur mesure - Le monde des meilleurs" (éd. Artège, 2018). Elle est aussi directrice de la Formation et de la recherche d’Alliance Vita. Chaque semaine, écoutez son édito dans La Matinale RCF.
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