Le ministre de l'Intérieur est revenu sur le bilan des blessés, dans les deux camps, depuis deux mois. Les critiques s’accumulent autour de l’usage de la force par la police et la gendarmerie. Une force qui serait disproportionnée et qui entraînerait des blessures graves.
Mille sept cents manifestants blessés et autour d’un millier de policiers et gendarmes blessés depuis le début du mouvement des "Gilets jaunes'. Ce sont les derniers chiffres avancés par le ministère de l’Intérieur. Auditionné mardi dernier devant les députés, le ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, a indiqué que quatre personnes ont été gravement blessées à l'œil à la suite d'interventions policières depuis le début du mouvement.
Des statistiques contestées par le collectif militant 'Désarmons-les !', engagé contre "les violences policières' qui évalue 'plutôt entre 2.000 et 3.000 le nombre de manifestants blessés'. Et une centaine de blessés graves, par des grenades et des tirs de lanceurs de balles de défense (LBD), dont une quinzaine ont perdu un œil.
Le ministre de l'Intérieur précise que la police des polices a été saisie de 81 enquêtes. L’ACAT, ONG chrétienne de défense des droits de l'homme, suit de près cette problématique. Marion Guémas est chargée des questions de police à l’ACAT. Pour elle, cette tendance actuelle semble confirmer une évolution déjà constatée il y a deux ans en arrière au moment des manifestations sur la Loi Travail. Le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner met en avant de son côté le niveau de violence inédit durant ce mouvement.
En France, la doctrine du maintien de l’ordre a pour principe d’éviter l’affrontement direct avec les manifestants en cas de dérapage. En les tenant à distance notamment. D’où l’utilisation de grenades lacrymogènes, de grenades détonantes et de lanceurs de balles de défenses. Mais cette doctrine a été bousculée ces dernières années par l’émergence de groupes de casseurs très mobiles. Les attentats terroristes n'ont évidemment pas amélioré les choses, comme l'explique Mathieu Zagrodzki, chercheur associé au Cesip, spécialiste de questions polices et sécurité.
Parmi les moyens qui fâchent, les lanceurs de balles de défense LDB40. Ce sont des armes qui tirent des balles rondes en caoutchouc à courte et moyenne distance. Une sorte de flash ball évolué. Le terme est resté bien que le flash ball n’équipe plus la police en France depuis 2016. Le calibre de cette arme est de 40 mm. L’équivalent d’une balle de ping-pong. Il a une portée plus importante que son prédécesseur. Il est également censé être plus précis. Mais l’utiliser n’est pas sans difficultés, précise Mathieu Zagrodzki.
Eric Morvan, le directeur général de la Police nationale, a rappelé il y a quelques jours dans une lettre envoyée aux forces de l’ordre, les conditions d’utilisation de cette arme au cours des opérations de maintien de l’ordre. Pour la majorité des syndicats de policiers, elle est indispensable pour éviter dans les situations extrêmes de recourir à une arme à feu. Selon eux, le bilan aurait été pire sur le plan humain, sans ces armes.
Le Défenseur des droits, Jacques Toubon, a réitéré jeudi dernier sa demande de suspension des LBD, en raison de leur 'dangerosité'. L’ACAT et d’autres associations l'ont également demandé. Mais pour Marion Guémas il faut une réflexion sur d’autres méthodes de maintiens de l’ordre.
En attendant une éventuelle nouvelle doctrine du maintien de l’ordre en France, le ministère de l’intérieur a lancé, le 23 décembre dernier, un appel d’offres pour l’acquisition de près de 1.300 nouveaux LBD. Et les policiers armés de lanceurs de balles de défenses seront aussi équipés de caméras piétons.
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