Début janvier démarre le "mois sans alcool", inspiré du Dry January aux États-Unis. L'occasion de vérifier si l'on se sent vraiment libre vis-à-vis de l'alcool. En France, 8% de la population adulte en serait dépendante, soit près de 4 à 5 millions de personnes. Or, l’alcoolisme est une maladie souvent mal comprise, y compris par les médecins. On en parle avec le Docteur Jean-Pierre Aubert, auteur de "Histoires d'alcool - Peut-on en parler à son médecin ?" (éd. Cerf).
Comme chaque année depuis trois ans, au 1er janvier commence le "mois sans alcool". Une initiative portée par la fédération d'associations France assos santé, inspirée du Dry January aux États-Unis. Un mois pour s’abstenir… Et vérifier que l’on est réellement libre vis-à-vis de l’alcool.
Comment savoir si on est dépendant de l’alcool ? Il existe une réponse statistique : il faut s’inquiéter quand on consomme plus de deux verres par jours quand on est une femme, ou plus de trois si on est un homme. Mais il existe une réponse plus "philosophique", selon Jean-Pierre Aubert : pour savoir si on est dépendant, il faut se demander si l’on se sent privé de liberté vis-à-vis de l’alcool. Or, on a beau se croire capable d’arrêter quand on en a envie, tant que l’on n’a pas essayé, c’est difficile d’en être sûr.
En France, l’alcool coule à flot. Il est même "extrêmement valorisé", remarque le médecin. Une personne qui boit est vue comme un bon vivant, un joyeux drille… Il a ainsi la conscience "de quelque chose de positif", socialement valorisé : le déni de la dépendance sera d’autant plus fort. Parfois c’est l’entourage proche qui délivre les premiers petits signes "auxquels il faut être attentif", insiste le médecin, car dire à quelqu’un qu’il a un problème avec l’alcool, c’est difficile.
Quand on est dépendant à l’alcool, faut-il stopper net sa consommation ? De même qu’il y a "mille façons d’être en difficulté par rapport à l’alcool", il y a différentes façons de sortir de la dépendance. Pour le médecin, "il faut en parler" et « décider d’une stratégie". "Une stratégie de diminution de la consommation est tout aussi légitime et intéressante qu’une stratégie d’arrêt de la consommation." Seulement voilà, les soignants ont du mal à prendre en charge les patients malades de l’alcool.
Depuis plus de 40 ans, Jean-Pierre Aubert accompagne des personnes souffrant de dépendance à l’alcool. Si son livre a pour titre "Histoires d'alcool - Peut-on en parler à son médecin ?", c’est qu’il observe que les soignants sont "en difficulté par rapport à l’alcool". Pour lui, cela vient des années d’études en internat, quand le futur médecin rencontre pour la première fois des malades de l’alcool dans les services d’urgences. Ils sont souvent sales, grossiers… Et cela laisse des traces dans la carrière du soignant. "Ça va structurer toute notre vie ultérieure", confie Jean-Pierre Aubert.
De leur côté, "les patients le ressentent" et "en viennent à se dire que ce n’est pas la peine d’aller voir les médecins, les soignants parce que globalement on se fait maltraiter". Or, quand on est accompagné par un médecin, dans 30% des cas, on peut sortir sa dépendance au bout d’un an. "Globalement, il n’existe pas de traitement médicamenteux de l’alcool, prévient Jean-Pierre Aubert, il y a une petite aide qui peut être apportée par certains médicaments."
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