Aix-en-Provence
Le 13 mars dernier, le Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge publiait le rapport « Quand les enfants vont mal : comment les aider ? », un rapport qui alerte également sur la progression de la consommation de médicaments psychotropes par des enfants et des adolescents. Pourquoi le mal-être des ados a augmenté et comment y faire face?
Ce sont les questions que nous abordons, cette semaine, dans “C’est que du bonheur!” avec Alessandra Guerra, psychologue clinicienne libérale et au service de psychiatrie adolescent de l'hôpital Montperrin d’Aix-en-Provence.
Alessandra Guerra, psychologue au service de psychiatrie des adolescents à l’hôpital Montperrin d’Aix-en-Provence, constate, depuis plusieurs mois, que les adolescents vont très mal et fait face à une augmentation d’environ 30% de scarifications ou encore tentatives de suicides.
Selon elle, la crise du Covid et plus précisément, le déconfinement sont les principales causes de ce mal-être des ados. “Le déconfinement est venu révéler quelque chose de difficile pour les ados, analyse-t-elle, l’adolescence c’est la période où l’enfant fait l’apprentissage du lien social. A la puberté, il y a une telle révolution pubertaire, hormonale, pulsionnelle qui est naturelle pour que l’adolescent puisse se tourner vers l’extérieur et puisse fonder sa propre famille (...) et côtoyer l’extérieur pour construire des choses qui vont lui appartenir. Or le confinement a été violent et brutal et a duré et mis en relief toutes les incohérences des adultes et ce temps d’apprentissage pour construire sa propre vie lui a manqué”.
Le confinement a aussi séparé les adolescents des grands-parents, qui sont pourtant fondamentaux dans la construction de l’histoire familiale. Une période qui est “venue renforcer toutes les fragilités de l’adolescent qui finalement a découvert qu’il était très bien dans sa chambre, avec ses réseaux sociaux et il n’avait plus à faire d’effort pour aller vers l’autre”.
Pour accompagner au mieux ce mal-être adolescent, Alessandra Guerra aimerait s’adresser à la fois aux jeunes et à leurs parents. Aux ados, elle répète qu’il n’y a pas à complexer d’aller voir un psy:
souvent le jeune me dit, “je ne suis pas fou". Bien sûr qu’il n’est pas malade mais il a besoin d’un coup de pouce et d’un lieu où il puisse dire que ça ne va pas!
Durant cette période d'“explosion physique et hormonale”, l'ado a du mal à exprimer ce qu’il ressent et ce qui se passe à l’intérieur de lui. Or “voir un psychologue l’aide à mettre des mots sur les maux”, précise Alessandra Guerra. Les jeunes ont envie de comprendre ce qui se passe dans leur vie, pourquoi il y a ce mal être qui les ronge, pourquoi ils ont perdu cette force de vie… Tous ces chamboulements sont normaux. Voir un professionnel permet à l’ado de comprendre qu’il n’est pas seul dans cette traversée.
En revanche, elle met en garde sur tous les “coachs de la pensée” et “tout ce qui relève de l'écoute pas formée”. Pour elle, les psychologues cliniciens sont “le bras droit du psychiatre” et formés à “l’écoute clinique”.
Dans les ateliers en groupe de l’hôpital Montperrin auxquels elle participe, Alessandra Guerra est émerveillée par le bienveillance et l’entraide qui règnent entre les ados et elle souligne que la majorité peuvent sortir de cette phase difficile mais “à condition de prendre le mal-être au sérieux dès le début”.
Quant aux parents, Alessandra Guerra aimerait s’adresser d’abord aux parents d’enfants plus jeunes car l’adolescence se prépare dès la petite enfance pour apprendre à se faire confiance et faire confiance aux autres. Il s’agit d’être dans la valorisation, l’attention, le soutien et de proscrire toute sanction physique ou humiliation.
Elle conseille aussi de soutenir les parents d’un ado qui va mal car c’est une période douloureuse pour eux également et un parent soutenu “pourra ainsi mieux accompagner son enfant” en gardant la bonne distance.
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