Et si la clef du bonheur se trouvait dans un ouvrage du XVIIe siècle plutôt que dans les livres de développement personnel très en vogue ces dernières années ? Quatre siècles plus tard, les travaux philosophiques de Spinoza sont toujours d’actualité. À l’occasion de la publication d’une nouvelle traduction de ses œuvres complètes dans la Bibliothèque de la Pléiade, le philosophe Maxime Rovere nous délivre les conseils et astuces de Spinoza pour vivre la joie.
Pour comprendre la philosophie de Baruch Spinoza (1632-1677), il faut d’abord comprendre l’époque dans laquelle il vit. Né en 1632 et issu d’une famille juive, Spinoza grandit à Amsterdam, une ville qui fourmille grâce à son commerce mais où la religion est plongée dans une "grande zizanie", expose Maxime Rovere. Là-bas, les prêcheurs orientent leur discours vers la mort et la souffrance. Considérant que cette approche ne mènera pas les Hommes très loin, Spinoza "embrasse le projet qui consiste à défaire les esprits de leurs préjugés" en entamant des réflexions sur la joie, le désir et la vie.
"Pour lui, la joie est partout. C’est à la fois le but, la voie et le moyen", résume Maxime Rovere, écrivain et philosophe qui a consacré plusieurs livres à Spinoza. Bien qu’elle soit omniprésente, la joie chez Spinoza "n’est pas l’émotion d’un être sautillant qui traverserait la vie en méconnaissant ce qu’elle a de dramatique comme la mort ou la maladie", nuance-t-il, c’est plutôt celle de quelqu’un qui est concentré sur sa force de vie et dans laquelle il trouve les moyens de s’émerveiller et de se réjouir".
Pour cela, Spinoza invite à concevoir la vie en termes d’affects, c’est-à-dire en qualité d’expérience qui donnent l’impression que notre puissance augmente ou diminue. "La logique de Spinoza c’est qu’en comprenant les mécanismes qui font qu’on vit certaines expériences, il est possible de les transformer", simplifie Maxime Rovere, qui prend comme exemple le livre adapté en film "Vous n’aurez pas ma haine". Dans ce texte écrit suite à l’attentat du Bataclan dans lequel il a perdu sa femme, Antoine Leiris a en quelque sorte "compris que la tristesse qu’il a à perdre sa femme n’a pas pour cause les terroristes qui l’ont tuée, mais son amour pour sa femme", remarque le philosophe. Il choisit donc "d’interpréter les choses d’une manière qui l’aide à vivre et pas d’une manière qui le rend encore plus malheureux", ajoute-t-il. Voilà, une façon d’appliquer la philosophie spinozienne.
Comprendre nos émotions, simplifier des situations complexes à l’aide de modèles permet donc de retrouver la joie de comprendre. Autrement dit la connaissance est une source de joie pour Spinoza. C’est ce qu’il appelle mystérieusement "l’amour intellectuel de Dieu", soit la science intuitive. "Il nous incite à utiliser le mot dieu d’une tout autre manière, pas du tout en référence à des textes sacrés mais plutôt à concevoir Dieu comme le principe même de l’existence que vous touchez du doigt à chaque fois que vous comprenez, explique Maxime Rovère, une fois que vous avez compris quelque chose, vous ne pouvez pas faire autrement, c’est une nécessité. Cette implacabilité, c’est Dieu."
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