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Aux racines de l'art contemporain, par Guillaume Goubert

Un article rédigé par Guillaume Goubert - RCF, le 7 mai 2024 - Modifié le 7 mai 2024
Les Histoires de l'artAux racines de l'art contemporain, par Guillaume Goubert

“Le monde comme il va”, une exposition à la Fondation Pinault nous donne l’occasion de réfléchir sur notre rapport avec l’art le plus récent. Cherche-t-il à nous émouvoir, à nous toucher ou seulement à nous choquer, à nous provoquer ? Cet art est-il sérieux ou bien se paie-t-il notre tête ?

"Rock on the top of another rock" par Fischli et Weiss à Bâle ©Wikimedia Commons"Rock on the top of another rock" par Fischli et Weiss à Bâle ©Wikimedia Commons

La dernière exposition à la collection de François Pinault se prête à des interrogations sur le sens de l’art contemporain. L’industriel aujourd’hui âgé de 87 ans, après avoir fait fortune dans le bois, les grands magasins et les produits de luxe a réuni en plusieurs décennies plus de 10 000 œuvres d’art. Il ne s’est pas contenté d’acheter des valeurs sûres, des artistes confirmés. Il a su aussi s’intéresser à de nouveaux venus.

L’exposition présentée actuellement à la Bourse de commerce (qui est le site parisien de la collection Pinault) offre un panorama très large de l’art contemporain. Elle est intitulée “Le monde comme il va” avec la volonté de réunir des artistes qui donnent - je cite - “une vision à la fois kaléidoscopique et instable du présent”.

Quelle est mon impression en sortant de cette exposition ?

Des moments de grand agacement et aussi de belles surprises. J’ai envie de dire : comme il se doit. L’art contemporain est forcément expérimental, il explore des voies nouvelles. Chacun, selon ses goûts, sa sensibilité, peut apprécier, ou non, telle ou telle recherche. Ensuite, le temps fera le tri entre les gadgets et les créations dépassant l’air du temps.

Au chapitre des agacements, je citerai une œuvre de Bertrand Lavier intitulée “Dino”. Il s’agit d’une Ferrari accidentée récupérée telle quelle dans une casse. Ou bien une sculpture de la superstar américaine Jeff Koons dénommée “Balloon Dog” (Magenta). Elle représente une baudruche en forme de chien haute et longue d’environ 3 mètres. Mais ce n’est pas de la baudruche. C’est de l’acier inox, peint en mauve. Dans les deux cas, c’est spectaculaire mais ne signifie franchement pas grand chose.

Ce qui m’a plu dans cette exposition

J’ai découvert un duo d’artistes suisses, Peter Fischli et David Weiss, modelant de petites saynètes en argile. Il y en a 76 présentées à la Bourse de commerce. Par exemple, une représentation du futur psychanalyste Jacques Lacan prenant conscience de son image dans un miroir à l’âge de deux ans. J’ai trouvé très réjouissant ce mélange d’humour et de fausse naïveté.

Le plus important pour moi a été de constater que la peinture demeure pour les artistes le plus beau des moyens d’expression. Il y a dans cette exposition de magnifiques tableaux. Tout particulièrement, une toile du peintre écossais Peter Doig où l’on voit un homme marcher dans un paysage tropical, flottant dans une lumière irréelle.

Et puis j’ai ressenti un choc, dû au peintre irakien Mohammed Sami avec un tableau immense, environ trois mètres sur six, intitulé “Mille et une nuits”. Il représente un ciel nocturne traversé d’éclairs. Le tableau s’impose immédiatement au regard. Mais, en lisant la notice sur le mur, on comprend que l’artiste évoque ici les nuits de bombardements qu’il a connues pendant la guerre d’Irak. Ce qui suscite un surcroît d’émotion pour le spectateur. En voilà une preuve, l’art contemporain, ce ne sont pas seulement des provocations et des gadgets.
 

EffervescenceEffervescence et les vertiges de l'art contemporain
Les Histoires de l'art © RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
Les Histoires de l'art
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