Dans Marque Page, et une fois n’est pas coutume, nous allons nous vêtir de nos plus belles combinaisons spatiales pour une nouvelle émission consacrée à la SF en bande dessinée. Nous vous présentons aujourd’hui 3 récentes bandes dessinées où les vaisseaux spatiaux sont aussi nombreux que les extraterrestres qu’ils rencontrent.
Orbital de Sylvain Runberg et Serge Pellé chez Dupuis
Orbital, le centre névralgique de la Confédération, ville gigantesque rassemblant plusieurs centaines de peuples aliens, est une brèche sur plusieurs espaces-temps différents. À l'abri derrière d'immenses portes Crop, c'est de cet endroit que le destin de la galaxie est contrôlé. Et surtout qu'un semblant de paix essaye d'être maintenu.
Les Terriens ont finalement été intégrés à cette Confédération... Non sans mal. Un affrontement sauvage entre isolationnistes et pro-confédérés a agité leur planète avant que la décision ne soit prise. Lors du dernier meeting pro-confédérés, un attentat terrible a fait disparaître des milliers de personnes. Dont les parents de Caleb Swany.
Des années après, ce dernier est intégré à l'Office Diplomatique Intermondial. En binôme avec Mézoké Izzua, issuë du peuple sandjarr, ils vont avoir pour rôle de veiller sur les peuples et d'empêcher de futurs conflits. Leur première mission va les entraîner dans une lutte entre colons humains et Jävlodes. La seconde sera à leur image : une cérémonie de réconciliation entre leurs deux peuples qui s'étaient affrontés lors d'une guerre atroce, 15 années auparavant. La troisième et quatrième mission les verra lutter contre une machination qui menace l'équilibre de la confédération.
Orbital est une série créée il y a bientôt 20 ans, dont le premier tome est sorti en 2006 aux éditions DUPUIS sur un scénario de Sylvain Runberg et des dessins de Serge Pellé qui ont signé 8 albums. Une série qui peut faire penser bien sûr à Valérian et Laureline ou encore la série Sillage, même si le ton se veut peut-être un peu plus sombre et adulte. Une série fortement recommandée pour les amateurs de SF mais qui est actuellement en pause...
Outlaws de Sylvain Runberg et Eric Chabbert chez Dupuis
Espace confédéré. Année 2779. Un vaisseau mené par le commandant Grello arrive en vue de l'Astroport de Lugmila. À son bord : un chargement de clandestins échappés de leurs planètes respectives, qui se voient forcés de travailler six mois pour le terrible cartel des Cimes, mafia qui a organisé leur passage. Parmi ces hors-la-loi, une mystérieuse humaine, représentante d'une race honnie pour être la dernière à avoir intégré la Confédération. Taciturne et têtue, elle va se trouver au cœur d'une incroyable lutte de pouvoir d'où le cartel des Cimes pourrait ne pas sortir gagnant. Mais elle, peut-être...
Les auteurs nous offrent pour le moment, non pas un space opéra d’aventures mais une plongée dans une mafia galactique et comme souvent avec le scénariste, une critique sociétale avec le sort des clandestins. Les connaisseurs de la série principale ne seront pas trop dépaysés et nous aurions aimé un peu plus de nouveautés surtout que le scénariste, semble nous proposer un nouveau duo de personnages à l’instar de Caleb et Mézoké. Ici, Kristina et Zachary mais attendons de voir ce que nous réserve Sylvain Runberg pour le second volume et l'immersion probable dans les profondeurs d'une ville confédérée qui devrait éveiller notre curiosité. Et même si le personnage de Kristina est une jeune femme déterminée au tempérament frondeur et plus gris que son grand frère, elle est aussi plus énervante et moins attachante. Côté dessin, par contre, Eric Chabbert, reprend ici l’univers de Serge Pellé et lui rend bien honneur ! La fidélité à Orbital est bien là dans les personnages et les différentes races d’extraterrestres, dans les ambiances, ses personnages sont peut-être un peu moins réalistes et la mise en couleurs moins rugueuse que celle de Serge Pellé mais on ne peut pas dire que ce n’est pas réussi ! Nous attendons impatiemment le second tome pour être convaincu par cette série dérivée !
Prima Spatia de Denis-Pierre Filippi et Silvio Camboni chez Vents d'Ouest
Dans un univers futuriste, Alba, 17 ans, vit cloîtrée sur un astéroïde et son domaine luxueux. Ses parents l’ont toujours tenue à l'écart du monde. Mais le jour où elle est enlevée, tout bascule ! Secourue par la Flèche, Alba doit s’adapter à sa nouvelle vie à bord de ce navire cosmique et trouver sa place au sein de son équipage qui explore les différentes bulles d'espaces secondaires à la recherche de créatures stellaires… Ces créatures impressionnantes représentent la source économique principale des différentes espèces qui les traquent sans relâche. Mais les prendre en chasse n’est pas sans danger. Alors, quand Alba ose s’aventurer sans scaphandre dans l'espace pour les approcher, son geste provoque la stupéfaction générale ! Intrigué, l’équipage commence à percevoir la singularité de son hôte. Alba sent bien qu'une connexion particulière la lie à ces êtres incroyables. Mais, ce qu'elle ignore encore, ce sont ses véritables origines. Les secrets qui l'entourent pourraient bien aller jusqu'à déclencher une révolution et remettre en cause l’ordre établi ainsi que le fragile équilibre unissant les multiples civilisations de cet univers.
Une bien belle entrée en matière avec ce premier tome de Prima Spatia, une entrée en matière qui nous plonge dans deux histoires principales parallèles autour de la jeune Alba, l’héritière du titre de ce premier volume. Une histoire politique et la tentative de kidnapping pour faire pression sur le père d’Alba, diplomate, qui essaie de gérer des conflits entre races extraterrestres et donc une histoire de chasse aux créatures célestes, qui, il est vrai, fait écho au Moby Dick de Melville avec l’équipage de la flèche où chacun à son histoire propre et son lot de mystères, ce qui permet d’enrichir le récit. Et si le scénario offre de belles possibilités pour la suite, la partie graphique proposée est d’ores et déjà au top niveau. Le dessinateur, accompagné des excellentes couleurs de Segala, offre des planches de toute beauté. Son dessin semi-réaliste fourmille de détails, ses compositions propose un découpage réussi où des cases se superposent sur des pleines pages permettant une lecture dynamique tout en proposant de grands panoramas plus réussis les uns que les autres. Sans parler des séquences finales de chasse ou encore de la couverture qui finissent de nous ravir les pupilles. Camboni, le dessinateur, propose un travail de premier plan servi par le talent de Francesco Segala qui finit de nous convaincre par son travail des couleurs, sur les ambiances, textures et autres effets. Un coloriste qui aurait mérité d’avoir son nom sur la couverture !
ARCA de Romain Benassaya et Joan Urgell chez les Humanoïdes Associés et Editions Critic
À leur réveil, des colons terriens découvrent que leur vaisseau est prisonnier d’un étrange labyrinthe…
Éric Rives se réveille d’un long voyage en vaisseau spatial qui devait le mener, lui et les autres passagers, jusqu’à la Griffe du Lion – terre promise où ils espèrent trouver de meilleures conditions de vie que sur l’orbite terrestre qui dépérit. Mais l’équipée réalise rapidement qu’elle n’est pas arrivée à destination et que le voyage a duré bien plus longtemps que les deux cents ans initialement prévus… Avec l’aide de sa coéquipière Jia, Éric part explorer l’extérieur du vaisseau. Ils découvrent alors qu’ils sont enfermés dans un labyrinthe géant défiant toutes les lois de la physique…
Voilà (ci-dessus) le résumé simplifié de cette histoire et nous ne voulons pas trop en dire pour vous laisser le plaisir de la lecture. Une lecture passionnante pour peu que vous aimiez la SF avec une histoire futuriste, se déroulant dans l’espace et vous proposant quelques concepts scientifiques. A priori, ici, pas de robots mais quelques étranges créatures notamment ces insectes jardiniers permettant de créer une atmosphère respirable ainsi que de la nourriture aux passagers de l’ARCA. Sans trop en dévoiler, on peut dire que Eric, le héros de cette histoire est en conflit avec son épouse qui ne souhaite pas le voir partir explorer le labyrinthe dans lequel ils se trouvent et qu’à son retour des rivalités grandissantes apparaîtront entre celles et ceux souhaitant rester sur place où une vie a commencé à se mettre en place et tous ceux qui souhaitent continuer le voyage et en savoir plus sur cet étrange endroit. Une histoire sur une base plutôt déjà lue et vue de nombreuses fois : quitter une terre polluée et inhabitable mais le récit ne perd pas de temps et se lance rapidement avec son personnage d’Eric, dans l’exploration de ce territoire inconnu où se retrouve l’ARCA et ses passagers. Une tension s’installe entre les différentes sensibilités de passagers (entre ceux voulant créer une nouvelle vie sur place et ceux voulant poursuivre leur voyage) et cela permet à l’auteur de nous montrer une société et l’évolution de cette dernière entre les envies des uns et des autres.
[...] On vous parlait d’Asimov et Melville tout à l’heure, ici, on y retrouve plutôt du Dune et de l’Alien : Dune, vous le verrez, par son bestiaire, Alien, par l’ambiance de survival de naufragés dans l’espace. Et malgré la densité de l’histoire qui se relance sans cesse avec de nouvelles questions, le scénariste parvient à rendre le tout fluide, cohérent et compréhensible avec un rythme presque parfait : on sent l’accélération des événements sur les dernières pages et la fin du récit est assez brutale, laissant de nombreuses questions en suspens. Ce qui fait rater le coche de coup de coeur de la semaine à cette BD car au dessin, Romain Benassaya a trouvé un excellent compagnon de route en Joan Urgell, et son très beau dessin en couleur directe (ou du moins ce qui semble être de l’aquarelle ou des encres de couleurs). Le trait réaliste allié à une parfaite maîtrise de la couleur fait de cet album un vrai plaisir pour les yeux, le dessinateur propose, en outre, un bestiaire et des designs tout à fait soignés. Les scènes d’action aussi bien que les discussions, sont parfaitement rendues et Joan Urgell sait nous proposer des ambiances aussi bien oppressantes que des séquences explosives et saisissantes. Cet ARCA - en dehors d’une couverture peu attractive - est une vraie réussite graphique, quel dommage que cette fin arrive si rapidement et nous laisse quelque peu sur la notre !
Programmation musicale :
Alpha Centauri, Florent Marchet (Bambi Galaxy, 2014)
Où étais-tu, Florent Marchet (Bambi Galaxy, 2014)
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