Charles de Foucault vient de recevoir la 1ere médaille d’or décernée par la société de géographie de Paris pour son ouvrage, Reconnaissance au Maroc, écrit à partir des notes relevées au cours de son exploration du Maroc.
La voie dans laquelle Charles s'était engagée dans l'Armée n'était pas celle, on le verra plus précisément, de sa Vérité, ni de sa Vie mais explorer le Maroc a révélé l'homme d'action, a relié le savant, le visionnaire qui devançait la politique française de la génération suivante et une aide utile aux armées françaises de demain.
Charles s’installe en Algérie après le voyage au Maroc. Là, il consulte des spécialistes et des résidents européens qui ont l'habitude du climat, du terrain … lors d’un séjour en France, il se munit d'un appareil photographique pour ses excursions en Algérie !
C'est dans ce cadre qu'il rencontre, chez le commandant Titre, sa fille Marie-Marguerite. C'est la première fois qu'il sort du cadre de la sensualité féminine pour s'éprendre d'une jeune fille de « bonne famille » avec l'idée de fonder une famille. Ils se trouvent beaucoup de points communs et cette jeune fille de 23 ans qui a toujours vécu en Algérie finit de l'aider à s'y adapter.
De surcroît, protestante par sa lignée maternelle, elle vient de se convertir au catholicisme.
Le revers de la médaille, c'est que la famille maternelle de Marie-Marguerite la prive de sa part d’héritage sous le prétexte de son abjuration. Charles et Marie Marguerite se fiancent en mai 1885.
Mais la famille de Charles ne l’entend pas ainsi : on ne les a pas consultés... La jeune fille est roturière « coloniste» (on ne dit pas encore «pied-noir») et sans fortune ! il s'ajoute à tout cela qu'elle est issue d'une lignée protestante : pas les mêmes repères, pas les mêmes valeurs… On lui reproche sa vie de débauche… on lui demande de récupérer l’argent prêté à un de ses amis…
Venu partager sa joie, parler de ses beaux projets d'avenir, Charles se retrouve secoué sans ménagements. il obéira à sa famille, mais il leur laissera la responsabilité de la décision…il « craque », il implose, il est exténué, déboussolé, déprimé peut-être même suicidaire … ce n’est pas lui mais son beau-frère qui répondra à la lettre pathétique du prêtre qui a suivi la conversion de Mademoiselle Titre.
Il embarque le 14 septembre à Port-Vendres pour Alger pour se rendre à El Goléa. Avec 2 mules et un domestique arabe, Charles de Foucauld accomplit un immense voyage en direction de Ouargla, Tougourt ! Il parcourt encore toute la région du Djérid, entre le chott El-Gharsa et le chott El Djérid. Charles avance seul avec sa mule, se nourrissant de ce qu'il a dans ses poches, couchant à même le sol : il s'est entendu avec son guide pour prendre une avance de deux jours.
C'est là semble-t-il que s'est opéré le retournement, la véritable et bouleversante conversion ! C'est une mue dont Charles n’a pas encore conscience.
Il embarque pour la France et arrive à Nice le 23 janvier 1886. Ce n'est plus le même homme : il est physiquement athlétique, et intimement, plus fort. Il se rendra à Paris en février : il lit , il écrit, il s'interroge et attend les signes de sa nouvelle voie.
Sa famille, qui lui est reconnaissante de s'être conformé à ses vœux, le reçoit. On le trouve donc dans des dîners somptueux, dans les Salons très prisés. Il y croise et y converse avec la meilleure société de son milieu qui rassemble des gradés, de hauts fonctionnaires, des érudits, des hommes d'affaires très riches, et leurs épouses, bien nées et bien dotées …
Le 20 mai 1886, il assiste à la première communion de son neveu qui lui rappelle la sienne et le livre de Bossuet offert par sa cousine Marie. Rouvert à cette occasion, il s'attarde sur un message qui prend désormais tout son sens : «la douleur nous donne le charme parce qu'elle nous purifie, nous ennoblit…».
Il s'extirpe de ce cocon familial qui n'est plus à sa taille et repart au Maghreb où, pour éviter le port d'Alger où se trouve Marie-Marguerite, il choisit de débarquer à Tunis d'où il rapportera tout un reportage photographique avec, d'ailleurs, de splendides portraits de femmes redécouverts récemment.
L'été finissant, de retour à Paris, un soir, chez sa tante Marie Moitessier, il fait enfin la rencontre qui va changer le cours de son existence et qui sera le début d'une profonde et longue amitié : il échange pour la première fois avec l'abbé Huvelin qui jouera un rôle aussi déterminant dans la conversion de Charles de Foucauld que fondamental jusqu'à sa mort !
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