Erwan Le Morhedec, avocat et essayiste, a écrit « Fin de vie en République » (Cerf) pour alerter contre l’imminence d’un changement de paradigme : la légalisation de l’euthanasie en France. En dialogue avec les soignants à qui l’on souhaite confier la tâche de donner la mort aux souffrants, il affirme que franchir cette ligne, déjà traversée en Belgique, risque de générer chez chaque personne vulnérable l'impossible sentiment d'être de trop.
L’euthanasie est un terme qui renvoie à un sujet grave, communément lié à ce qu’on nomme les enjeux bioéthiques, et qui désigne usuellement le « fait de donner délibérément la mort à un malade ». Aujourd’hui, en Belgique, et depuis 2002, cette pratique est dépénalisée, ce qui signifie que, sous certaines conditions – principalement la liberté consciente du patient et un état de souffrance insupportable ressenti par ce dernier –, les médecins qui réalisent une euthanasie ne sont pas poursuivis en justice. En France, en revanche, l’euthanasie est encore considérée par la loi comme un assassinat qui, si exercé, peut théoriquement être sanctionné par une réclusion à perpétuité.
Le débat fait pourtant rage chez nos voisins, et certains sondages indiquent que 93% des français seraient favorables à la légalisation de l’euthanasie. En avril 2021, une loi visant à reproduire, en France, la situation juridique belge en matière d’euthanasie, a été examinée par l’Assemblée nationale, sans que cela ne débouche encore sur une dépénalisation ou une légalisation de la pratique euthanasique. On le comprend vite : le sujet est difficile, le contexte est touffu et les mots choisis sont importants. Pour aborder cette lourde thématique qu’est l’euthanasie, nous avons donc invité Erwan le Morhedec, alias Koztoujours, avocat et essayiste, qui a récemment publié « Fin de vie en République. Avant d’éteindre la lumière » aux éditions du Cerf. Il s’agit d’un texte à charge contre l’euthanasie, et notamment – cela nous concerne – contre la manière dont celle-ci est pratiquée en Belgique.
Les soins palliatifs reposent sur une approche globale, pluridisciplinaire, par laquelle on ne s’intéresse pas uniquement au donné médical de la personne, mais également à sa situation physique, psychique, physiologique et aussi familiale… La meilleure manière d’accompagner une personne en fin de vie implique d’accompagner également son entourage
A travers un exposé précis et argumenté, nourri de nombreux échanges avec des personnes travaillant dans le milieu hospitalier et d’une profonde analyse philosophique, notre invité nous explique les risques qu’une population encourt en légalisant l’euthanasie : intolérance face à la vulnérabilité, négation du mystère la mort, culpabilisation des souffrants, développement d’une médecine « blindée » où le soignant devient un prestataire de service… Erwan Le Morhedec ne nie néanmoins jamais l’existence de situations dramatiques, et appelle, loin des sphères du pur débat intellectuel, à développer concrètement les soins palliatifs, sur lesquels il apporte de nombreuses précisions. « Les soins palliatifs reposent sur une approche globale, pluridisciplinaire, par laquelle on ne s’intéresse pas uniquement au donné médical de la personne, mais également à sa situation physique, psychique, physiologique et aussi familiale… La meilleure manière d’accompagner une personne en fin de vie implique d’accompagner également son entourage », explique-t-il. Aujourd’hui, en France, on compte moins de 3 lits en unités de soins palliatifs pour 100 000 habitants (Source : Rapport d’information du Sénat sur les soins palliatifs).
Liens utiles :
http://www.senat.fr/rap/r20-866/r20-8661.html
https://www.editionsducerf.fr/librairie/livre/19430/fin-de-vie-en-republique
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