Affiche du film. Crédit Walt Disney productions
Près de 55 ans après sa sortie au cinéma, Mary Poppins demeure une référence de la comédie musicale et un conte intemporel pour petits et grands. Magnifique Julie Andrews dans un film des studios Disney, de Robert Stevenson, sorti d’abord aux États-Unis le 27 août 1964, puis en France, un an plus tard, en septembre 1965.
Sœurs Suffragettes (Sisters Suffragettes)
Anne Germain dans la version française, dont nous avons déjà parlé dans l’émission consacrée aux Demoiselles de Rochefort, prête sa voix à Mrs Banks, rôle tenu par Glynis Johns, qui incarne Winifred, la femme de George Banks, un employé de banque fort absorbé par son travail. Cette militante de la cause féministe chante ici les louanges des Suffragettes, ces activistes en jupon et corset dans l’Angleterre du début du XXe siècle qui obtiendront l’égalité civique et le droit de vote des femmes en 1928. Dans cette scène haute en couleur, la nurse, une certaine Katie Nounou, souhaite donner sa démission à la suite d'une énième fugue de Jane et Michaël, les enfants Banks.
Après qu’un policier les ait ramené avec leur cerf-volant déchiré au foyer familial, une discussion s'engage entre M. et Mme Banks pour définir les qualités de la nouvelle nurse qui va être embauchée. Discussion à laquelle se mêlent Jane et Michaël.
Une nurse anglaise
Pendant ce temps, sur les toits de Londres, l'amiral Boom tire au canon depuis le toit de sa maison comme tous les jours à 18 heures précises pour donner l'heure.
Si la première lettre est publiée dans le Times, l'autre, déchirée par George Banks et jetée dans la cheminée, a été happée par un courant d'air facétieux qui a entraîné les morceaux par le conduit de cheminée…
Le lendemain, de nombreuses nurses se présentent. Mais une forte bourrasque fait s’envoler les prétendantes les unes après les autres sous l’œil mi-amusé, mi-éberlué des enfants Banks, accoudés à la fenêtre de leur chambre. C’est alors que descendant du ciel tel un ange, Mary Poppins et son parapluie font leur apparition. George Banks, qui n’a rien vu de la scène, la reçoit.
Elle sort l'annonce des enfants et poursuit par un discours qui le laisse sans voix. Désarçonné par l'aplomb de la jeune femme, il l'engage sur le champ.
Julie Andrews a 28 ans lorsqu’elle endosse le chapeau et la robe de popeline de Mary Poppins.
Fille aînée d’un père, professeur de menuiserie et d’une mère professeure de piano, elle a 5 ans lorsque ses parents divorcent. Sa mère part s’installer avec un comédien canadien, un certain Ted Andrews, avec qui elle se remarie peu de temps après.
Le couple, qui se produit régulièrement dans les music-halls londoniens, remarque que Julie possède une voix exceptionnelle pour son âge avec plus de quatre octaves. Ils l'incitent alors à travailler ce don.
Julie Andrews monte sur scène pour la première fois au London Hippodrome dans la revue Starlight Roof en 1947. Elle est alors âgée de 12 ans.
Elle fait ses grands débuts à Broadway en 1954 dans la comédie musicale The Boy Friend, de Sandy Wilson, créée l'année précédente à Londres. Deux ans plus tard, elle est retenue pour le rôle féminin principal dans My Fair Lady, d'Alan Jay Lerner et Frederick Loewe mais en 1963, les studios de la Warner Bros lui préfèrent Audrey Hepburn (qui pourtant n'est pas chanteuse) pour l'adaptation au cinéma.
Voilà alors que Walt Disney lui propose au même moment le rôle de Mary Poppins, la nounou magicienne. Un rôle qui fera immédiatement de Julie Andrews une vedette du grand écran.
La nurse ne tarde pas à faire connaissance avec ses nouveaux petits protégés et prendre possession de ses appartements… en sortant des objets tous plus encombrants et improbables les uns que les autres de son sac magique comme un porte-manteaux, une plante verte ou encore un miroir. Vient alors la première leçon : ranger la nurserie dans une chanson célébrissime : A Spoonfull of sugar, Le Morceau de sucre, avec la voix d’Eliane Thibault dans la version française.
Le Morceau de sucre (A Spoonfull of sugar)
En pleine décennie des années 60 où le cinéma fait preuve d’une grande créativité, Mary Poppins marque l’avènement de la fée moderne sur grand écran. A la fois figure enchanteresse dotée d’une féminité surnaturelle – volant, parlant aux animaux, chantant et dansant avec talent - ET incarnation, d’autre part, de la nouvelle citoyenne urbaine, émancipée et non dépourvue d’humour. L’esprit novateur de la réalisation de Robert Stevenson, qui combine les prises de vue réelles et l’animation, fait de Mary Poppins un film symbole. La scène de l’envol des nurses ou le voyage, plus tard, dans un paysage impressionniste mettent en exergue la féerie de l’enfance et l’adage du : « Tout est possible quand on croit très fort à ses rêves. »
Au parc, la nurse et ses louveteaux rencontrent Bert, le ramoneur (joué par Dick van Dyke et doublé par la voix inimittable de Michel Roux), qui réalise sur le sol des dessins à la craie.
Chem, cheminée
Bert et Mary semblent se connaître et Bert, qui connaît les dons de magicienne de Mary, lui propose de se servir d'un des dessins, un paysage de campagne anglaise, comme portail vers un monde enchanté en images animées. Plongés dans ce nouvel environnement, les enfants courent vers une attraction et laissent Mary et Bert profiter de la balade, puis d'un café où ils sont servis par quatre manchots.
Dick Van Dyke (Bert) et Mary Poppins (Julie Andrews). Crédit Edward Colman Disney
Quelle jolie promenade (Jolly Holiday)
Près du carrousel, les chevaux se détachent par magie du manège et entament alors une course irréelle dans la campagne, rattrapant une chasse au renard dans la plus pure tradition anglaise. La chevauchée se poursuit sur un champ de course, permettant à Mary de gagner l'épreuve.
Pour justifier sa victoire, Mary utilise le fameux terme de « supercalifragilisticexpiali docious », associé, depuis, au monde merveilleux et à la grande histoire des comédies musicales.
Supercalifragilisticexpialidocious
Bert, Mary et les enfants, rayonnent mais voilà que les réjouissances sont interrompues par la pluie qui fait disparaître les dessins à la craie et rappelle nos héros à une réalité plus banale.
Le soir, lorsque Jane et Michael demandent à Mary combien de temps elle restera avec eux, cette dernière leur répond : « Jusqu'à ce que le vent tourne » avant de leur chanter une berceuse pour qu'ils s'endorment. Et le sommeil ne tarde pas à venir, malgré eux, les emportant dans leurs rêves et le souvenir de cette journée merveilleuse.
Ne dormez pas (Stay awake)
Le lendemain matin, les enfants et Mary se rendent en urgence chez l'oncle de Mary, Albert, qui est collé au plafond à la suite d'une crise de rire.
Cet homme facétieux leur propose, ni plus ni moins, que d’en faire de même et les invite à venir prendre le thé avec lui. Devant cette énormité, Bert et les enfants s'envolent à leur tour.
Le soir, au dîner, M . Banks apprenant la nouvelle se met en colère mais bien vite, Mary Poppins parvient à retourner la conversation, en suggérant qu'il leur fasse découvrir le lieu où il travaille pendant qu'elle prend son jour de congé.
Le lendemain, à la banque, les collaborateurs de M. Banks, dont le vieux directeur Mister Dawes Sr., tentent de persuader Michaël d'investir deux pences qu'il lui arrache des mains…
Contrarié, l'enfant se met à crier, créant une panique indescriptible dans l’établissement qui est contraint de fermer pour éviter un krach boursier.
Apeurés, les deux enfants s'enfuient et échouent dans les bas-fonds de Londres.
Sur les bords de la Tamise, ils croisent, par chance, Bert. Celui-ci les réconforte et leur explique sur le chemin de la maison que leur père les aime, bien qu’il semble obnubilé par son travail.
Une digression plus sérieuse à cet instant du film et une façon de faire passer un message à portée plus sociale à la fois sur la cupidité et sur l’ambition.
Tout le monde connaît Mary Poppins. Mais ils sont peu nombreux à pouvoir citer Pamela Travers, qui créa en 1934, à travers un livre, cette super-nanny aux pouvoirs magiques. L'adaptation au cinéma par Walt Disney en 1964 fut pour le moins mouvementée.
C’est d’ailleurs ce que relate le film Dans l'ombre de Mary, la fiction savoureuse, signée John Lee Hancock, sortie en 2013, sur la vraie Pamela Travers. Le tandem formé par Tom Hanks et Emma Thompson se révèle efficace. Car si la comédie musicale qui révéla Julie Andrews fut le chef-d'œuvre que l’on connaît- cinq fois oscarisé – et aussi le dernier film de Walt Disney, qui mourait deux ans plus tard, ce fut aussi son pire cauchemar.
Extrait du film Dans l’ombre de Mary en VF
Tom Hanks et Emma Thompson dans cet extrait du film Dans l’ombre de Mary, où transparaît bien la femme de caractère qu’était Pamela Travers, qui avait vécu une enfance difficile, entre un père adoré mais alcoolique, et une mère démissionnaire.
Dans le film, les séances de travail avec les scénaristes sont assimilées à des séances de torture, tant Emma Thompson rature, s'insurge, vitupère et pinaille sur chaque expression. Emergent alors, peu à peu, les raisons secrètes pour lesquelles Mary Poppins lui tient viscéralement à coeur. Rarement un film sur la création n'aura aussi clairement montré combien le vécu d'un écrivain influe sur son oeuvre. Alliant fantaisie et gravité, Emma Thompson laisse entrevoir les plaies béantes de son personnage derrière ses manières de pimbêche casse-pieds. Une composition proprement bouleversante qui a fait date, depuis, dans la carrière de l’actrice anglaise.
Celtic soul from Saving Mr Banks
Mais revenons à l’œuvre proprement dite et replongeons-nous dans le Londres de Julie Andrews déambulant sur les toits, toujours de nuit (à l’image de l’ambiance générale du film d’ailleurs) en compagnie de Bert et des enfants, une fois de plus émerveillés devant les pouvoirs de Mary qui transforme une fumée de cheminée en escaliers qui leur permettent d’atteindre un point culminant pour contempler les lumières de la ville qui s’offrent à eux.
Bert, les enfants, Michael et Jane, et Mary sur les toits de Londres. Crédit Edward Colman Disney
Entrons dans la danse
La chanson du ballet des ramoneurs, une des plus belles chorégraphies du film, un morceau de bravoure de près de dix minutes, qui s’achève sur un plan panoramique en ombres chinoises, sublimé par la photographie d’Edward Coleman, avant l’apothéose et un feu d’artifice inopiné, déclenché par l’amiral Boom.
Mary Poppins est sommé par M. Banks de lui fournir des explications sur la sortie nocturne des enfants et l’intrusion des ramoneurs dans sa maison.
La fin de l’histoire approche. George Banks est convoqué par la direction de sa banque pour fournir des explications suite à la panique déclenchée par les enfants.
Devant une assemblée d’employés austères qui lui fait face, il prononce le fameux mot magique de Mary Poppins...
Son attitude change alors du tout au tout. Sa rigueur légendaire tombe au profit d’une gaieté insoupçonnée. De retour chez lui, il retrouve Mme Banks et appelle Jane et Michael et leur montre le cerf-volant qu’il a réparé…
Let’s go fly a kite (Deux ailes de papier ficelle)
Toute la famille se rue alors dehors et retrouve au parc Bert et des cerfs-volant par dizaines. Il y a même là les austères banquiers. Tous apparaissent radieux. Tous sauf, peut-être, Mary Poppins, certes contente d’avoir ramené la joie de vivre dans le foyer des Banks, mais quelque peu nostalgique, déjà, de quitter Jane et Michael comme le lui rappelle le manche de son parapluie qui parle.
Le moment a sonné pour la nurse de regagner son nuage. Une autre mission l’appellera bientôt. Ainsi va la vie de Mary Poppins, vendeuse de bonheur, qui va semer ses graines désormais dans un autre foyer.
Mary Poppins est disponible en DVD et blue-ray chez Walt Disney France
La BO du film est elle disponible chez Disney Music ou en téléchargement payant
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