Le Musée de Cluny, à Paris, rouvre enfin ses portes. Il a fait l’objet d’une rénovation qui a duré, au total, une dizaine d’années. Cela en valait la peine. Le résultat est magnifique.
Il faut d’abord parler du lieu. Nous sommes vraiment au centre de la longue histoire de la capitale au croisement du boulevard Saint-Michel et du boulevard Saint-Germain. Dans l’enceinte du musée, on trouve les restes de thermes gallo-romains du premier siècle de notre ère. Puis un très bel hôtel médiéval du XVe siècle, résidence parisienne des abbés de Cluny. C’est là qu’au milieu du XIXe s’est constitué un musée d’art ancien qui progressivement s’est concentré sur le Moyen-Age.
Un musée qui avait grand besoin d’une rénovation de fond et de forme. C’est chose faite avec pour symbole un nouveau bâtiment d’accueil dû à Bernard Desmoulin. Cet architecte a su intervenir avec un remarquable doigté. Son travail est bien visible, habillé de plaques en fonte d’aluminium à la teinte dorée. Mais il s’accorde fort bien avec les murs antiques et médiévaux avoisinants.
La première des 21 salles, haute de 14 mètres, est le frigidarium des anciens thermes. Au total 1.600 oeuvres sont présentées couvrant une période d’un millier d’années. Près d’un tiers d’entre elles ont été restaurées à cette occasion, tout comme la chapelle des abbés de Cluny, petit bijou gothique flamboyant dont la polychromie a été remise en lumière. Il faut souligner que les collections sont loin d’être seulement françaises. Elles vont de Trébizonde, au bord de la mer noire jusqu’au Brabant aujourd’hui belge et de l’Allemagne jusqu’à l’Italie.
Je voudrais citer tout d’abord la salle consacrée aux sculptures de Notre-Dame de Paris. On sait que la cathédrale a subi le vandalisme révolutionnaire. En particulier la galerie des rois située à mi-hauteur de la façade. Elle ne pouvait échapper à la fureur d’une époque régicide. Les statues furent projetées au sol et on perdit la trace. La restauration de Viollet-le-Duc au milieu du XIXe siècle les remplaça par des fac-similé. Et voilà qu’en 1977, des travaux au siège d’une banque, non loin de l’Opéra, ont mis à jour des morceaux de sculptures médiévales dont personne ne peut dire comment ils sont arrivés là. En l’occurrence, 21 des 28 têtes des rois de Notre-Dame. Elles sont depuis exposés au Musée de Cluny.
On pourrait parler de la même manière de fragments de sculptures et de vitraux de la Sainte-Chapelle qui sont conservés là mais il faut surtout évoquer les tapisseries de la Dame à la Licorne, mondialement célèbres. On pourrait dire qu’il s’agit d’une sorte de Joconde médiévale. Avec le même beauté fascinante. Mais aussi la part indispensable de mystère.
Les panneaux de tapisserie sont au nombre de six. Cinq d’entre eux évoquent les sens, le toucher, l’odorat, etc. Le sixième panneau est énigmatique. On y voit ces mots : « mon seul désir ». Les interprétations sont nombreuses. Je retiens celle qui veut y voir une allégorie de la générosité ou de la charité.
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