Acteur souvent vu à Cannes comme dans « Rodin » de Jacques Doillon, en 2017, qui lui valut un prix d’interprétation (« le premier prix de toute ma carrière ») ou dans « Titane » de Julia Ducournau, palme d’or l’an dernier, Vincent Lindon est le président du 75è Festival de Cannes.
Si pour certains ce choix tardif a des allures de bouche-trou, le Festival s’en défend en expliquant qu’à chaque date anniversaire importante du Festival, le président était un comédien ou une comédienne français, que c’était un choix voulu. Et de citer en exemples Gérard Depardieu en 1992, pour le 45è anniversaire, et Isabelle Adjani en 1997, pour le 50è anniversaire.
Etre président entraîne une grande responsabilité
« Enorme responsabilité », reconnaît Vincent Lindon lors de la traditionnelle conférence de presse du jury avant l’ouverture officielle. « Je vais redevenir un spectateur, comme un enfant, ça doit passer par le cœur avant d’arriver au cerveau, sans aucun a priori. J’ai envie d’aimer et d’accepter tous les cinémas du monde. Je vais essayer d’être moi-même et d’être à la hauteur de cette responsabilité tout en partageant avec mes camarades jurés ces moments précieux ».
Parmi ces jurés qui vont l’aider dans sa tâche, Vincent Lindon pourra compter sur quatre femmes et quatre hommes. Et notamment sur le réalisateur français d’origine malienne Ladj Ly, Prix du jury en 2019 à Cannes pour « Les Misérables ». « C’est une expérience énorme, je suis honoré, a-t-il déclaré un peu surpris d’être là, mais c’est la preuve qu’on peut partir d’en bas comme moi et arriver ici à Cannes où j’ai eu un prix. Mon exemple est un espoir pour tous ».
Le réalisateur et scénariste américain Jeff Nichols (« Take Shelter »), autre membre du jury, y va d’un souvenir anecdotique : « Je me souviens, quand j’avais 21 ans, avoir fait un stage de serveur à Cannes. Un client m’avait filé un billet en guise de pourboire. Ça m’avait permis d’acheter une place et un costume pour aller voir un film. Bon, j’étais dans le fond de la salle, mais j’y étais, à Cannes ! J’espère être aujourd’hui toujours aussi enthousiaste et émerveillé qu’à 21 ans. Et puis j’aurai une meilleure place, j’espère ! »
Autre juré, habitué de Cannes, le cinéaste iranien Asghar Farhadi, Grand Prix du Festival il y a moins d’un an avec « Un Héros ». Un film pour lequel il fait l’objet d’une procédure judiciaire toujours à l’instruction suite aux accusations de plagiat d’un travail de fin d’études d’une étudiante. Farhadi a profité de la conférence cannoise pour récuser ces accusations, rappelant que, inspirés d’un même fait divers, les deux films avaient forcément des points de ressemblance.
La crise ukrainienne ne peut être mise entre parenthèses et incite à la retenue. Le jury pourrait-il se laisser influencer pour l’un ou l’autre film dont le thème rappellerait la guerre qui sévit là-bas ? « Les temps de crise qu’on connaît changent notre état humain, explique le Président Lindon. Inconsciemment, quelque chose va s’en dégager. Au point de changer notre vision des films ? J’espère que non. Mais des films comme « Voyage au bout de l’enfer » ou « Apocalypse Now » n’auraient jamais existé sans l’Histoire ».
Au Festival de Cannes, Pierre Germay.
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