Irak, Afghanistan, Ukraine, Palestine et plus encore, à tout juste 30 ans, ce jeune bruxellois couvre les conflits du Moyen Orient et de l’Ukraine pour des médias francophones et européens. Rencontre avec Wilson Fache, un journaliste qui n’a pas froid aux yeux.
Ce jeune homme qui a remporté, en 2019, le prix Bayeux dans la catégorie « jeune reporter de guerre » pour son reportage intitulé « Gaza, année noire », se livre sur son métier d’un point de vue professionnel et personnel.
Journaliste de guerre, comment y pense-t-on ?
« Personne n’est venu me chercher pour faire ce métier-là, c’est un métier que j’ai trouvé ».
Étudiant à l’école de journalisme de Bruxelles, l’IHECS, il y effectue son master et un stage obligatoire est à réaliser. Il part donc pour Nicosie, au sein des bureaux de l’Agence France Presse, et il y découvre, presque par hasard, cette profession. Par la suite, il part à Beyrouth pour un autre stage dans un quotidien libanais francophone « L’Orient-Le Jour ».
C’est ainsi qu’il a commencé, et plus jamais arrêté.
A 22 ans, il s’envole pour le Kurdistan irakien, à Erbil plus exactement, où il couvrira pendant deux ans et demi les conflits de cette zone : la guerre contre le groupe Etat Islamique, ainsi que la bataille de Mossoul, contre les djihadistes de Daesh.
Aujourd’hui, Wilson est basé en Europe et voyage dans les pays où l’actualité l’appelle.
Il nous confie qu’avec du recul, la guerre fait partie de sa vie depuis son enfance. En effet, ses grands-parents étaient résistants contre les nazis lors de la Seconde Guerre Mondiale. C’est dans son ADN. Il a baigné dans les récits des prouesses de ses aînés. Est-ce pour cela qu’il a choisi ce métier ? Peut-être. Une chose est certaine, Wilson continue d’alimenter, à sa manière, le bagage héroïque de sa famille.
La face cachée du métier
“Ce n’est pas un métier toujours facile, mais c’est un métier toujours passionnant”.
Avoir deux passeports pour passer d’un pays à l’autre, être dans des zones de conflits six mois par an, voir des collègues blessés, kidnappés. Devoir porter gilet par balle, casque et masque à gaz, prendre des risques pour couvrir l’actualité internationale : telle est sa réalité.
Se confronter aux problèmes politiques, économiques et sociaux des pays en conflit c’est également le quotidien de Wilson. Il est arrivé en Afghanistan après que les talibans ont repris le pouvoir. Côtoyer des femmes privées de leurs droits, des écolières qui ne peuvent plus aller à l’école dans ce pays devenu liberticide est une autre facette de cette vie.
Puis, à côté de cela, il y a les joies de la profession: donner une voix et de l’intérêt à ceux que l’on oublie, et que l'on réduit au silence. Rencontrer des populations qui sont touchées que l’on s’intéresse enfin à elles. Les gens ouvrent leur porte aux journalistes pour qu’ils puissent raconter leur histoire.
Enfin, une fierté et pas des moindres : les récompenses pour son travail. Les prix de différents concours récompensent tout au long de l’année les journalistes pour leur travail de terrain. Comme expliqué précédemment, Wilson a obtenu le prix Bayeux, en 2019, mais il a également été présélectionné pour le célèbre prix « Albert-Londres » qui récompense les meilleurs « grands reporters » francophones.
La réalité du journalisme
Après avoir acquis toutes les qualités indispensables pour être un bon reporter: l’écoute, l’empathie, la gestion du stress, il est nécessaire de vendre ses articles.
Malheureusement, comme beaucoup le savent, le journalisme est un milieu précaire. Wilson, de part son statut d’indépendant, réalise des reportages qu’il vend par la suite aux médias qui le rémunèrent en fonction de ce qu’il propose. Lui qui a une fibre pour la presse écrite ne peut en revanche plus se cantonner à cela pour vivre : il doit alors travailler pour la télévision afin de subventionner ses reportages pour son domaine de prédilection.
La famille dans cette vie ?
« Ils sont très fiers je pense, mais ils ont peur »
La peur, un sentiment finalement naturel, normal quand on sait ce que l’un des nôtres prend des risques la moitié de l’année. Puis l’habitude prend le dessus, les destinations angoissantes deviennent banales et des nouvelles les remplacent.
Faire venir ses proches sur des lieux qui, par nos clichés, peuvent effrayer, il l’a fait : des amis sont venus lui rendre visite en Irak et ont adoré. Une manière de montrer que les choses évoluent et qu’il faut faire disparaître nos a priori.
L’avenir
Beaucoup de projets sont en devenir pour ce bruxellois. Tout d’abord, une BD avec l’édition Delcourt, qui sera comme un « making-of » de sa colocation entouré d’autres correspondants de guerre à Erbil, en Irak. De plus, il a la volonté de se concentrer sur des sujets « magazine », plus appliqués, et passer aux formats documentaires.
« Écrire un livre », nous confie-il est également dans un coin de sa tête. Puis enseigner, transmettre son savoir de journaliste serait également à envisager.
To be continued …
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