Décidément le Brexit a des conséquences en cascade. En quittant l’Union européenne, Boris Johnson croyait (disait-il) que le Royaume-Uni allait "reprendre le contrôle de lui-même" : en réalité il semble en train de le perdre, dans deux au moins de ses propres régions !
D’abord en Ecosse, où le gouvernement régional d’Edimbourg – nationaliste et pro-européen – reparle de quitter le Royaume-Uni. Et depuis 48 heures c’est un peu la même chose en Irlande du Nord où l’ancien parti dominant (inconditionnel de l’union avec l’Angleterre) vient d’être battu par les nationalistes du Sinn Féin, partisan de l’union du Nord avec la République d’Irlande du Sud.
C’est un tremblement de terre sur le plan symbolique, quand on sait que le Sinn Féin était la vitrine politique de l’IRA pendant les années de guerre contre l’armée anglaise dans les rues de Belfast ou de Derry, et jusqu’en 2005… Voir ce parti, qui était la voix des dominés, devenir aujourd’hui dominant et remettre en question la division de l’île imposée par Londres en 1921, est un événement historique.
Mais ce qu’il faut bien voir, c’est que cet événement n’aurait pas été possible sans le volet commercial de l’accord de Brexit entre Londres et Bruxelles : l’Irlande du Sud étant membre de l’Union européenne, et l’Irlande du Nord membre du Royaume-Uni, cet accord place la frontière européenne dans la mer, entre la Grande-Bretagne et l’Irlande, pour ne pas remettre une frontière entre les deux Irlande et faire ressurgir les troubles et les violences.
Les Irlandais du Nord ont voté contre le Brexit et s’opposent à l’accord commercial et au contrôle des marchandises. Le parti anglais en Irlande du Nord, lié au gouvernement de Londres, s’est retrouvé en porte-à-faux. La victoire du Sinn Féin devenait inévitable…
Et voilà comment, en Irlande comme en Ecosse, les nationalistes celtiques marquent des points en jouant la carte européenne : paradoxe qui déconcertera les Français, pour qui les nationalismes sont incompatibles avec l’Europe. Comme quoi les Latins ont une autre logique que les Celtes ; mais ça, on le savait depuis deux mille ans.
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