Marie-Hélène Lafage | Nommer les arbres et les oiseaux pour entrer en relation

En 2020, le philosophe Baptiste Morizot avait fait ce triste constat : certains enfants sont capables de reconnaître 1000 marques commerciales, mais sont incapables d’identifier 2 feuilles d’arbres… Comment ne pas nous interroger ? Dans son livre « Manières d’être vivant », ce philosophe affirme que la crise écologique est d’abord une crise de la sensibilité, de l’émerveillement, de notre capacité à entrer en relation avec les autres formes de vie. De son côté, dans l’encyclique Laudato si’, le Pape François nous invite à faire de l’écologie une voie de conversion chrétienne autour de 4 relations : la relation à Dieu, à l’autre, à soi et à la création. Alors finalement, connaître la nature autour de soi, être capable de la regarder, c’est percevoir Dieu à travers ce qui nous unit aux autres créatures, c’est développer notre capacité d’attention et de contemplation. Un beau chemin de conversion !

Prendre conscience de la fragilité de la biodiversité 

Je pense ici aux personnes âgées qui déplorent le fait qu’aujourd’hui on observe moins de vie, moins de papillons, qu’on ne voit plus d’écrevisses dans les ruisseaux. Les chiffres sont là : on a mesuré en Allemagne des pertes de biomasse d’insectes de l’ordre de 80% en 30 ans ; 24% des oiseaux communs spécialistes ont disparu en France métropolitaine entre 1989 et 2021. On doit mesurer le rôle de cette biodiversité dans nos vies : celui, par exemple, des pollinisateurs pour l’agriculture. Mais les espèces n’ont pas besoin d’être « utiles » ou  « remarquables » pour avoir de l’importance ! Il y a une biodiversité urbaine qui est essentielle, tout autant que le panda à l’autre bout du monde. Dans Laudato si’, le Pape François déplore ainsi que le fait qu’ : « à cause de nous, des milliers d’espèces ne rendront plus gloire à Dieu par leur existence et ne pourront plus nous communiquer leur propre message. »

Actions pendant le Carême 

Cela peut commencer par des actions toutes simples. Lorsque je vais au travail le matin, je m’arrête pour observer les arbres, j’essaie de les appeler par leurs noms. Je peux même me lancer dans un herbier ! Le Printemps est particulièrement propice à tout un tas d’observations. On peut participer au comptage des oiseaux des jardins avec la Ligue de Protection des Oiseaux, organiser un « blind test des chants d’oiseaux » en famille ou entre amis pour voir qui est capable de les reconnaître. On peut rejoindre une association naturaliste près de chez soi. Enfin, cela peut être l’occasion de méditer à partir des textes de St-François, de Laudato si’ ou de l’exhortation apostolique Laudate Deum, où le Pape nous rappelle que « Dieu nous a unis à toutes ses créatures ».