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L'abbé Paul Couturier, pionnier de l'œcuménisme

Un article rédigé par Véronique Alzieu, Odile Riffaud - RCF, le 15 janvier 2024 - Modifié le 15 janvier 2024
Halte spirituelle, l'intégralePaul Couturier, pionnier de l'oecuménisme

 

Avant de devenir un pionnier de l'œcuménisme et de la rencontre entre chrétiens, l'abbé Couturier était un homme "replié sur lui-même" et "ayant peur un peu de tout". Il a littéralement découvert le sens de la rencontre. 

 

Avant Paul Couturier, "on ne peut pas dire qu’il y avait vraiment un mouvement œcuménique" ©DRAvant Paul Couturier, "on ne peut pas dire qu’il y avait vraiment un mouvement œcuménique" ©DR

 

Il est assez saisissant de constater que le pionnier de l’œcuménisme, grand artisan du dialogue entre chrétiens, a d’abord été un homme "replié sur lui-même" et "ayant peur un peu de tout" - bien qu'habité par "une grande profondeur spirituelle" au dire de son biographe. Le parcours de Paul Couturier (1881-1953), l’abbé Couturier, est celui d’un homme qui a littéralement fait la découverte de la rencontre avec l’autre. 

L’un des plus grands connaisseurs de la vie et de l’œuvre de Paul Couturier, le Père Pierre Michalon (1911-2004) nous a quittés il y a 20 ans, le 2 janvier 2004. Auteur de plusieurs ouvrages sur Paul Couturier, Pierre Michalon était lui-même un artisan fervent de l’œcuménisme, membre du Groupe des Dombes pendant 40 ans. Pour lui rendre hommage, et à l’occasion de la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens, RCF vous propose de retrouver son entretien dans Halte spirituelle.

 


Du 18 au 25 janvier, la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens

Créée en 1908, le mouvement de prière pour l'unité des chrétiens est devenue une semaine à l'initiative de l'abbé Couturier. Cette année, le thème est : "Tu aimeras le Seigneur ton Dieu… et ton prochain comme toi-même."

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Paul Couturier, du repli sur soi à la découverte de l’autre

Avant d'encourager les chrétiens à mieux se connaître, Paul Couturier a fait lui-même l’expérience de la rencontre, jusqu’à se laisser transformer en profondeur. Pourtant, c’était un homme "replié sur lui-même, un peu tendance vieille France, ayant peur un peu de tout, scrupuleux", décrivait Pierre Michalon.

Un homme replié sur lui-même mais dont plusieurs avaient deviné la grande profondeur spirituelle. Ainsi ses élèves au lycée des Chartreux, prestigieuse institution lyonnaise, "ont senti que c’était un homme qui avait une qualité intérieure mais qu’ils définissaient très mal" - même si Paul Couturier n’avait vraisemblablement pas de don particulier pour enseigner... De même, cet industriel dont l'abbé Couturier a fait la rencontre en 1920, Victor Karlian, qui "a eu le génie de discerner la valeur spirituelle profonde de cet homme". Très ouvert au catholicisme social, Victor Karlian a été une première rencontre décisive dans la parcours du jeune prêtre.

En 1923, Paul Couturier a fait littéralement la "découverte des autres", décrivait son biographe. En s'occupant, à la demande de son diocèse, des réfugiés russes orthodoxes de Lyon, qui avaient fuient la révolution soviétique. Cela lui a permis de "découvrir une autre spiritualité que le monde catholique dans lequel, de manière un peu restreinte, il vivait". Et pour son biographe, "cela a provoqué pour lui une illumination".

"Que tous soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et moi en toi." (Jn 17, 21) Ce verset bien connu aujourd'hui de deux qui s'intéressent à l'œcuménisme, Paul Couturier a eu l'occasion de le méditer lors d’une retraite spirituelle en Belgique en 1932. "Pendant un mois, il a médité cela. À la suite de cette retraite d’un mois, il a eu l’idée d’une ouverture vers les frères non catholiques en pensant qu’il y avait quelque chose de fondamental qui n’était pas mis en lumière et que lui se sentait appelé par Dieu à proclamer."

 

→ À LIRE : Protestants et catholiques : Jésus aurait-il voulu que les chrétiens restent unis ?

 

Les chrétiens dans une impasse

Avant Paul Couturier, "on ne peut pas dire qu’il y avait vraiment un mouvement œcuménique", estimait Pierre Michalon. Il y eu cette première démarche en 1948, avec la création du Conseil œcuménique des Églises. Mais c’était "une espèce de parloir où les Églises chrétiennes – à ce moment-là il n’y en avait que 148 qui avaient consenti à se retrouver ensemble – pouvaient se rencontrer pour se connaître".

Entre chrétiens, "on était dans une impasse". On ne parlait pas d'œcuménisme mais plutôt d’unionisme. Ce terme renvoyait à l’idée d’une union "par le recentrement sur un point, le point étant, quand on est catholique, l’Église catholique romaine"...

Bien que conscients des divisions entre Églises, les chrétiens pensaient que la réconciliation passait par le retour à l’Église que le frère éloigné avait quittée. "Par exemple, les protestants espéraient le retour des catholiques - et des orthodoxes - à la puissance de la parole de Dieu… à une vérité plus pure de l’Évangile. Et les orthodoxes espéraient le retour des catholiques à l’Église des premiers conciles œcuméniques. Au fond c’était la bataille des retours !"

 

Paul Couturier a été fasciné par cette idée : il faut qu’on puisse se rencontrer !

 

Naissance de l'œcuménisme

Dans ce contexte, l’intuition de l’abbé Couturier a été de prendre le chemin inverse. Il "a été fasciné par cette idée : il faut qu’on puisse se rencontrer !" Mais "comment faire se rencontrer dans la loyauté des chrétiens qui sont si profondément, psychologiquement peut-être mais aussi doctrinalement séparés les uns des autres ?"

Son intuition novatrice a été de considérer les valeurs communes aux chrétiens. La première étant "celle jaillie du baptême" et le "centrage des vies chrétiennes et des Églises chrétiennes sur la personne de Jésus Christ". En laissant entendre que peut-être les chrétiens étaient "moins séparés qu’ils le croyaient eux-mêmes", l’abbé Couturier, "sans en avoir conscience au départ peut-être", supposait son biographe, "a changé la donne".

 

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