Sans fondateur, sans supérieur, sans clôture, l’Ordre des vierges est déroutant pour la mentalité contemporaine alors que cette forme de vie est la plus ancienne dans l’histoire de l’Église. À l’occasion de la journée de la vie consacrée le 2 février, rencontre avec Viviane Bruneau-Shen et Christine Rault, vierges consacrées en Normandie.
Elles ont été consacrées à 25 ans d’intervalle, pourtant leur vocation est la même. « On vit comme tout le monde avec cette spécificité d’être toute au Seigneur », témoigne Christine Rault. Consacrée en 1990 dans le diocèse de Coutances et Avranches, Christine constate avec joie que cette vocation semble répondre aujourd’hui à un appel. « Cela correspond certainement à un signe du temps, à un besoin de notre époque et à la manière dont l’Esprit Saint se manifeste aujourd’hui dans le monde et dans l’Église », ajoute Viviane Bruneau-Shen qui a été consacrée dans le diocèse de l’Orne en 2015.
Elles sont aujourd’hui 650 en France à vivre cette vocation. Cette forme de vie qui remonte aux premiers temps de l’Église, a été réintroduite dans les années 1970, avec le Concile Vatican II. Les vierges consacrées ne formulent pas les trois vœux religieux d’obéissance, de chasteté et de pauvreté mais « un ferme propos de virginité ». Cet engagement, elle le prononce entre les mains de leur évêque. « L’évêque est comme un père pour nous et nous avons un lien filial avec lui, mais il n’est pas notre supérieur. »
Contrairement à des religieuses, les vierges consacrées ne vivent pas en communauté, mais dans le monde, subvenant à leurs propres besoins. Autre particularité, l’Ordre des vierges n’est pas constitué en hiérarchie.
Dans l’Ordre des Vierges consacrées, il n’y a pas de fondateur, pas de supérieur, pas de règle de vie, pas de clôture, pas d’habit et pas de signe distinctif. Ce qui est très déroutant pour notre mentalité contemporaine qui a du mal à se représenter ce qu’était l’Église primitive.
« Les gens voudraient nous définir par un charisme, une mission. Mais le cœur de cette vocation se situe au niveau de l’être. La vierge consacrée est le signe de l’Église épouse du Christ. La consécration des Vierges n’est qu’un déploiement de la grâce baptismale reçue puisque tout l’Église est la véritable épouse du Christ », explique Viviane Bruneau-Shen.
Que dire de ce mot « vierge » qui peut surprendre dans la société contemporaine ? « À cause de ce petit côté désuet, justement, ça parle. Cela permet d’aborder tout de suite le cœur de la vocation. Pour ma part, je suis très heureuse que l’Ordre s’appelle comme ça », témoigne Viviane.
« Dans ce monde où la sexualité est souvent vécue de manière superficielle, où on n’en perçoit pas toute la profondeur, cela interroge. Penser que ce soit possible aujourd’hui qu’une femme s’engage à demeurer vierge ça peut surprendre beaucoup, mais ça permet aussi à bien des personnes de se dire que leurs désirs plus profonds peuvent aussi avoir une place », ajoute Christine Rault.
« La virginité va bien au-delà du rapport à la sexualité, c’est avant tout la virginité du cœur, qui est une grâce. La virginité pour moi est liée à la liberté, celle du créateur, et celle de l’âme qui reçoit ce dont du créateur », complète Viviane.
L’intégrité physique n’est d’ailleurs pas « un prérequis déterminant en l’absence duquel il ne serait pas possible d’admettre à la consécration » peut-on lire dans l’instruction « Ecclesia sponsae imago » au paragraphe 88. Pour mieux définir cet ordre, le Vatican a en effet publié, en 2018, un document présentant la mission de ces femmes qui choisissent cette forme d’engagement au service de l’Église.
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