"De notre révolution ne surnagent qu'une grande lassitude et quelques victoires"... "On dit que les rêves ou les utopies soulèvent les montagnes mieux que la foi". Ainsi se termine le dernier roman d'Yves Bichet, "Les enfants du tumulte", qui suit le premier tome "Indocile".
Yves Bichet ne donne pas dans la mélancolie. Il s'agit davantage d'"une évocation des grands vents ébouriffants qui ont soulevé la société de 1968". Il souligne l'allégresse de l'époque, l'utopie qui se met en place et se propage... Puis, c'est la désillusion : "quand le boomerang revient, c'est le moment des espérances trahies, le désenchantement quand la fête s'arrête".
L'auteur était âgé de 17 ans à l'époque. Dans son livre, il avait envie "de convoquer ces moments d'ouverture à tous les possibles". Jeune, il n'avait aucune conscience politique : "j'ai été aspiré par le mouvement". "Je pense que les étudiants et lycéens ont pensé qu'ils pouvaient changer le monde et arrêter avec la société de consommation".
Mai 68, "c'était le nouveau monde qui inventait des slogans" : Mangez de la salade, Cache-toi, objet... "Une période généreuse, candide". Il compare cette révolution au mouvement actuel et témoigne de leurs différences : "aujourd'hui, l'idée n'est pas de changer le monde, mais de lui réclamer des choses"...
Dans ce nouveau roman, on retrouve les mêmes personnages que dans le premier tome. Dans le premier ouvrage, ils sortaient de la guerre d'Algérie dans un état d'échec, pressés de tirer un trait sur cette époque peu glorieuse et violente. "Là, c'est l'inverse : c'était intéressant de passer de personnages dans la défensive à un autre type d'engagement, à la joie, la jubilation".
Ces personnages ne bénéficient pas des possibilités engendrées par mai 68. Ils sont banals. "Ce sont les exclus, les bousillés", explique l'auteur. "Chacun est victime de ses utopies et de sa candeur. J'avais envie de rendre hommage à ceux qui ne s'en sont pas sortis par le haut".
On va, progressivement, vers une tragédie collective. Refusant le monde tel qu'il est, tel qu'il va, les personnages dérivent...
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