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Sainte Catherine Marie Drexel

Un article rédigé par Jean Luc Moens - 1RCF Belgique, le 15 mai 2024 - Modifié le 15 mai 2024

Fille d'un riche banquier, elle a consacré sa vie aux amérindiens et aux noirs américains.

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« Il est plus difficile à un riche d’entrer dans le Royaume de Dieu qu’à un chameau de passer par le chas d’une aiguille », a dit Jésus. Quand on entend une phrase comme celle-là, on peut penser qu’il n’y a pas de riches qui arrivent au plus haut de degré de la sainteté. Détrompez-vous ! Il y en a ! Le 3 mars, nous fêtons l’une d’entre elles, une américaine : sainte Catherine Marie Drexel. Nous verrons que sa sainteté a été magnifiquement préparée par ses parents qui ont vécu une vraie vie chrétienne tout en étant immensément riches.

 

Son histoire

Katharine Mary Drexel (en français Catherine Marie Drexel) est née à Philadelphie aux USA 26 novembre 1858 dans une famille très riche. Elle est la seconde fille d’un banquier américain, Francis Anthony Drexel. Sa maman, Hannah Langstroth, meurt quatre semaines après sa naissance, la laissant, elle et sa sœur Élisabeth, orphelines. Son père se remarie avec une catholique fervente, Emma Bouvier, avec laquelle il aura une autre fille, Louise. Emma s’occupe avec amour de l’éducation des trois filles de la famille.


Il ne faut pas croire que la richesse de la famille fasse des trois filles Drexel des enfants gâtées. Les parents veillent à ce que leurs enfants soient au contact des réalités quotidiennes de la vie. Les filles apprennent la cuisine, la couture. Elles taillent et cousent elles-mêmes leurs robes, par exemple.


Anthony et Emma sont des chrétiens fervents. Anthony prend un temps de prière personnel lorsqu’il revient du travail chaque jour. Il considère avec sa femme que leurs biens matériels leur sont donnés pour les partager avec les plus nécessiteux. Ils soutiennent de nombreuses œuvres charitables dans la ville de Philadelphie. Ils mettent aussi leurs filles en contact avec les pauvres pour apprendre à les servir : trois fois par semaine, Emma et ses filles accueillent des miséreux dans leur maison. Tous les matins, la famille entière assiste à la messe. Chaque jour aussi, ils prient tous ensemble.


La famille fréquente la paroisse saint Jean l’Évangéliste de Philadelphie. C’est là que Catherine fait se première communion. C’est là aussi qu’elle reçoit le sacrement de confirmation des mains de l’évêque de la ville, saint John Neumann, le premier évêque américain à avoir été canonisé. J’aime signaler quand les chemins des saints se croisent !


Anthony Drexel fait de fréquents voyages d’affaires en Europe. Il y emmène ses filles qui ont l’occasion de découvrir les merveilles du vieux continent. Mais toutes ces beautés laissent un sentiment d’insatisfaction dans le cœur de Catherine. Elle sent un autre appel…

En 1879, Emma tombe gravement malade. Elle meurt en janvier 1883. Catherine la soigne pendant les trois dernières années de sa vie. Elle découvre plus profondément ce qu’elle savait déjà : on a beau être très riche et comblé d’honneurs, on ne peut supprimer la souffrance ou éviter la mort. L’appel de Dieu se creuse en elle.
À la mort de sa femme, monsieur Drexel décide d’emmener ses trois filles en Europe.

 

La voix de la Vierge Marie, donner gratuitement, oui, mais où donner ?

À Venise, dans la basilique Saint-Marc, un événement marque un tournant dans la vie de Catherine. Alors qu’elle passe devant un tableau de la Vierge Marie, elle entend sa voix qui lui dit intérieurement : « Vous avez reçu gratuitement ; donnez gratuitement. » Elle reconnaît évidemment le passage de l’Évangile de Mt 10, 8, mais s’interroge : donner gratuitement, oui, mais où donner ?


La réponse va venir au cours d’un autre voyage, cette fois dans l’Ouest américain : Catherine découvre la vie des populations amérindiennes et est profondément touchée. Elle commence à les aider en mettant en pratique la parole reçue à Venise.


Le 15 février 1885, c’est son père Francis qui rend son âme à Dieu. Les 3 sœurs se retrouvent à la tête d’une fortune immense. La santé de Catherine flageole avec toutes ces épreuves.  Ses sœurs décident alors un nouveau voyage en Europe aux bains de Schwalbach en Allemagne pour permettre à Catherine de se rétablir.

 

Missionnaire

Au cours de ce voyage, les 3 sœurs cherchent à recruter des prêtres et des religieuses pour accompagner les populations amérindiennes en souffrance. Elles obtiennent aussi une audience avec le pape Léon XIII pour lui parler de la misère et des besoins des indiens d’Amérique. Le pape les écoute et s’adresse à Catherine :

Pourquoi, mon enfant, ne devenez-vous pas vous-même missionnaire ?

Celle-ci est estomaquée. Oui, elle ressent un appel depuis son adolescence, mais elle a toujours cru qu’elle serait religieuse contemplative, pas missionnaire en plein vent. Elle en a parlé à son directeur spirituel, Mgr James O’Connor, évêque d'Omaha (Nebraska), mais celui-ci l’en a découragé à cause de sa santé fragile.


De retour aux USA, Catherine et ses sœurs s’engagent davantage encore dans les missions indiennes. Elles visitent ensemble les tribus des Dakotas en traversant leur territoire avec les moyens de transport de l’époque : cheval, charriot, chemin de fer. Catherine rencontre le célèbre chef sioux Red Cloud (Nuage rouge). Elle découvre l’état pitoyable dans lequel les indiens sont obligés de vivre.
Dans les 4 années qui suivent, Catherine finance 13 écoles dans les missions indiennes. Elle commence aussi à s’intéresser aux anciens esclaves noirs émancipés officiellement mais vivant souvent dans une grande misère.


La question de la vocation consacrée de Catherine revient sur le tapis. Elle écrit à Mgr O’Connor et lui décrit la détresse de son âme devant son refus de la laisser avancer. Mgr accepte alors sa vocation et lui propose 3 institutions religieuses. Mais Catherine cherche une congrégation qui est au service des indiens et des noirs. Or il n’y en a pas ! Mgr O’Connor lui propose alors de fonder une nouvelle congrégation. C’est le choc pour Catherine. « La responsabilité d’un tel appel m'écrase presque, écrit-elle, parce que je suis infiniment pauvre dans les vertus nécessaires. »

Finalement, encouragée et soutenue par Mgr O’Connor, Catherine accepte de se lancer le jour de la fête de saint Joseph, 19 mars 1889. Elle écrit : « La fête de saint Joseph m’apporta la grâce de donner le restant de ma vie aux Indiens et aux Noirs, d’entrer pleinement dans vos vues concernant ce qui est le mieux pour le salut de ces peuples. »


Mgr O’Connor demande aux sœurs de la Merci à Pittsburg de former Catherine à la vie religieuse. Les sœurs l’accueillent dans leur noviciat le 7 novembre 1889. La mort inopinée de Mgr O’Connor vient perturber tous les projets. Mais le Seigneur veille. C’est l’archevêque de Philadelphie, Mgr Patrick Ryan, qui prend le relai. C’est ainsi que, le 12 février 1891, Catherine Drexel fait sa profession religieuse en tant que première « Sœur du Saint-Sacrement pour les Indiens et les Noirs » avec un quatrième vœu ajouté aux vœux de pauvreté, d’obéissance et chasteté : le vœu d’être « la mère et la servante des races indiennes et noires selon la Règle des Sœurs du Saint-Sacrement ; et de n’entreprendre aucune œuvre qui mènerait à négliger ou abandonner les races indiennes et noires ».

La nouvelle congrégation est lancée ! Au bout d’un an, elle compte déjà 21 recrues. Les épreuves ne manquent pas. La construction de leur couvent entraîne des ennuis de toute sorte. La fondatrice réagit dans la foi : « Chaque épreuve que nous subissons est un acte de la miséricorde de Dieu, afin de nous détacher de la terre et de nous rapprocher de Dieu. » Quelle foi !


La nouvelle de la création d’une congrégation pour aider les indiens et les noirs se répand rapidement. Les demandes de fondations affluent. Mgr Ryan demande la prudence. Mère Catherine attend 3 ans et demi avant d’ouvrir une première mission : un pensionnat à la Mission Sainte-Catherine de Santa Fe (Nouveau Mexique). Les sœurs deviennent très aimées des indiens. Un jour que mère Catherine veut aller dans un village soigner les malades du choléra, on l’en empêche : on tient trop à elle pour risquer de la perdre par contagion.


Mère Catherine s’est détachée de toute sa fortune pour les pauvres. Elle est très attachée à son vœu de pauvreté pour elle et pour ses sœurs. Elle écrit à l’une d’elle : « Si vous êtes détachée des choses de la terre, vous aurez le royaume de Dieu en vous. Si vous n’êtes pas détachée, vous vous persuaderez que beaucoup de choses sont nécessaires, et vous en arriverez à mener une vie de facilité. Dieu comble ce qui est vide. »

En juillet 1907, mère Catherine reçoit à Rome une première approbation de saint Pie X, et est élue Supérieure générale de l'Institut des « Sœurs du Saint Sacrement pour les Indiens et Gens de Couleur ». Elle a une grande dévotion pour le Saint Sacrement qu’elle veut transmettre à ses sœurs : « La Religieuse a besoin de force, leur écrit-elle. Proche du tabernacle, l'âme trouve la force, la consolation et la résignation. La Religieuse a besoin de vertus. Jésus dans le Saint Sacrement est le modèle des vertus. La Religieuse a besoin d'espérance. Dans le Saint Sacrement nous possédons le gage le plus précieux de notre espérance. L'Hostie contient le germe de la vie future. »


En 1912, Mère Catherine a un premier gros accroc de santé. Elle contracte la fièvre typhoïde. En 1913, elle obtient à Rome la reconnaissance définitive de sa congrégation.

En 1915, elle ouvre le premier institut catholique d'études supérieures pour les Noirs aux États-Unis : la Xavier University à La Nouvelle-Orléans.

En 1935, lors d’une visite pastorale, elle fait une crise cardiaque. Elle ne peut plus exercer ses responsabilités à partir de 1937. Elle va vivre le reste de sa vie quasiment grabataire, dans l’acceptation et l’offrande de sa maladie pour les missions. Elle peut se consacrer à la contemplation comme elle l’avait rêvé dans sa jeunesse. « J'ai découvert une manière extrêmement efficace de prier, confie-t-elle. Le Cœur de Jésus est aussi mon cœur, puisque je suis membre de son Corps, et avec son Cœur je prierai Dieu mon Père, et ma prière sera toujours écoutée. »

Le 3 mars 1955, mère Catherine Drexel meurt paisiblement à l’âge de 96 ans.
Elle est canonisée par Jean-Paul II le 1er octobre 2000. 
 

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