'La chasteté c'est la bonne distance à l'autre, que l'autre soit mon conjoint, un objet, l'argent...' Sr. Véronique Margron préfère parler de 'bonne distance', de 'juste distance' ou de 'bonne présence' pour définir la chasteté. Car 'ce n'est pas se se tenir 'à l'écart de', mais trouver la bonne relation qui fait que je ne met pas l'autre sous mon emprise et je ne me mets pas sous son emprise'. Dans son encyclique Laudato Si', le pape François invite à retrouver le sens du respect face au monde créé. Or, 'l'humain est marqué par un instinct, un goût de la domination, observe Sr. Margron, tout ça n'a rien d'inné'.
S'appuyant sur les travaux de cette grande figure de la théologie morale que fut Xavier Thévenot (1938-2004), Sr. Véronique Magron explique que la chasteté, c'est aussi une question de respect. 'Ce qui est nécessaire à cette distance c'est d'abord la considération du respect dans les relations humaines, et le respect ce n'est pas du tout quelque chose d'inné !' Respecter l'autre, ça s'apprend. Et 'ne pas faire faire intrusion dans son existence', plus il est proche, plus c'est difficile, 'puisque les relations deviennent mêlées d'affectivité et de subjectivité'.
Quand il est nourrisson ou encore dans le ventre de sa mère, le petit d'homme n'a pas l'idée de l'autre puisqu'il n'a pas idée de lui. 'Dans ce monde, il n'y a pas d'autre, il n'y a pas de limite.' Il ne connaît pas encore la frustration, l'autre est un prolongement de lui-même, il est dans une situation de toute-puissance. 'Une part du travail de la petite enfance c'est d'apprendre la frustration.' Et ce à quoi encourage la chasteté, tout au long de la vie d'adulte, c'est de 'pouvoir se situer dans des relations où justement on n'attend plus tout de l'autre'.
'C'est là toute la difficulté, il faut pouvoir consentir à ses limites tout en gardant en soi cette part, ce besoin, ce désir de créativité, d'invention.' D'un côté, l'homme a besoin de se dire que tout est possible, sinon il n'y aurait jamais eu de progrès scientifique. D'un autre côté il est nécessaire d'admettre, et on en fait nécessairement l'expérience dans nos vies, que tout n'est pas possible. Comment savoir où est la limite ?
Qu'est-ce qui est juste pour moi ? Qu'est-ce qui est juste pour l'autre ? 'Le critère c'est ce qui fait vraiment vivre et ce qui nous fait vivre ensemble.' Cette question-là, Jésus lui-même s'y est trouvé confronté, durant les 40 jours au désert où il a été tenté. Il est intéressant de voir que Jésus refuse de céder au tentateur 'pour rester dans la situation d'être un fils, un homme, de consentir à ses limites'. Il y a là un équilibre instable, toujours à rechercher.
Émission d'archive diffusée en janvier 2018
RCF est une radio associative et professionnelle.
Pour préserver la qualité de ses programmes et son indépendance, RCF compte sur la mobilisation de tous ses auditeurs. Vous aussi participez à son financement !