Alors voilà l'info, une brève est tombée, Kylian M'Bappé n'ira pas aux JO ! Le PSG, son club, ne l'y autorise pas ! Et la toile et les médias de s'enflammer !
Quand certains crient à l'inacceptable décision de priver le public de son champion, d'autres se révoltent contre cette incroyable déception que doit être de ne pas pouvoir participer à une évènement mythique de ne pas pouvoir aller au bout du rêve de tout sportif de haut niveau !
Prenons du champ ! Emotionnellement, on comprend la déception ! Rationnellement, cette situation est commune : il s'agit d'une situation archi-classique qui relève du lien de subordination de tous salariés vis à vis de son employeur.
Que l'on soit un talentueux footballeur ou un professionnel plus modeste !
Et il est étonnant que l'on puisse revendiquer qu'il en soit autrement dans l'application du droit du travail, alors que partout on entend la revendication de justice sociale, la volonté d'équité, sauf à vouloir justifier et illustrer, la fable de La fontaine "Les animaux malades de la Peste" et sa morale à propos des privilèges et de la justice sous l'ancien régime, "selon que serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir."
Eh bien c'est parce que précisément, il s'agit de frustration ou plutôt de gestion de la frustration. D'accepter les limites et les contraintes ! En clair d'apprendre à faire contre mauvaise fortune, bon coeur ! C'est pas facile ! Mais peut-on grandir sans frustration ?
La question qui nous est posée en tant qu'éducateur est le comment nous aidons les jeunes à assumer leur choix. Certes nous devons les accompagner pour que ces choix soient larges, audacieux, aussi proches que possible de leurs ambitions et de leurs rêves, c'est la part gratifiante de notre rôle. Mais ne devons-nous pas aussi les accompagner et redoubler d'attention lorsque l'adversité et la contrariété s'en mêlent ?
Ne devons-nous pas à être leur côté pour trouver ensemble les ressorts de la résilience qui leur évitent sur le ressentiment de creuser des puits d'amertume et de s'y noyer.
Pour comprendre que choisir c'est aussi parfois renoncer. Apprendre à distinguer contrariété et déception, d'injustice ou de traumatisme.
A travers eux, se manifeste bien souvent nos propres promptitudes, non pas à faire face à l'adversité et aux limites, mais à les refuser, à les esquiver, à nous contenter de l'expression de la colère quitte à tout casser.
La science nous enseigne qu'avant quatre ans, l'enfant n'est pas en capacité de gérer les émotions fortes et que ce qui peut passer pour des caprices est avant tout un appel à l'aide à ne pas se laisser submerger par elles et que le long chemin qui mène à l'âge adulte est justement l'acquisition de cette capacité à gérer ses émotions, non pas à éviter de les ressentir, mais à les canaliser et utiliser leur énergie pour construire un rapport et une relation positive ou distanciée aux autres, aux évènements et aux choses.
Lorsque la philosophe Hannah Arendt parle d'éducation de la jeune génération, elle nous rappelle que notre rôle d'éducateur, est d'accompagner les révoltes des jeunes dans un monde préexistant, mais avec une "perfectibilité indéfinie" selon les mots de Tocqueville.
C'est à dire que chaque génération vient au monde avec un pouvoir de créativité, qu’il convient tant de préserver des conservatismes l'inédit, pour transformer le monde, que d'orienter cet inédit pour éviter que le monde ne soit détruit par impulsivité.
C'est inconfortable comme position, mais n’est-ce pas celle des éducateurs d’aujourd’hui ?
Être éducateur, n'est pas ce pas aider à discerner la route à prendre plutôt que de choisir pour eux cette route ?
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