Aujourd’hui, les livres, bien que primordiaux, ne sont plus au centre de la bibliothèque. Cet espace se réorganise, se réinvente, pour créer du lien social et répondre à des besoins plus étendus que le seul emprunt d’un ouvrage. « Une bibliothèque, c’est un lieu d’apprentissage individuel, ouvert, le premier service public de proximité à l’accueil inconditionnel. Mais c’est également un lieu du collectif, où l’on peut se retrouver ensemble, un forum citoyen pour fabriquer les futurs possibles. » Plusieurs exemples en témoignent : apprentissage du code et du numérique dans les bibliothèques, développement des espaces de travail commun…
Ce qui compte désormais avant toute chose, c’est l’aspect de la médiation. Pour Jérémy Lachal, « l’information et l’éducation sont devenues les clés de la plupart des inégalités sociales. » C’est alors dans les bibliothèques que l’on peut trouver des solutions pour réduire ces inégalités. La bibliothèque dite « tiers-lieu » permet de se représenter cet espace idéal : « Les lieux de la vie sont ceux du domicile, du travail. La société a besoin d’un troisième lieu pour se développer. La bibliothèque a toute sa place dans cette dimension sociale. L’accès à la culture, à l’information, aux services publics de base, permettent de « faire société » ensemble. »
Bibliothèques Sans Frontières est intervenue en Haiti en 2010 après le tremblement de terre. « Nos partenaires nous ont appelés pour créer des bibliothèques dans les camps sous tente. On en a créé une vingtaine. Les humanitaires sauvent d’abord des vies avec les besoins essentiels : manger, dormir, se soigner. Ensuite il faut combler les besoins spécifiques de l’être humain : la capacité à lire, écrire, s’informer, s’éduquer. »
Sont ainsi nées les « Ideas boxes », médiathèques en kit qui tiennent sur deux palettes. Elles peuvent être envoyées très facilement sur le terrain. Une fois ouverte, elles présentent des espaces de 50 à 100 m2 : accès internet, tablettes, ordinateurs, livres numériques et papier, cinéma, outils créatifs…
L’association travaille dans 25 langues différentes, au contact de populations diverses dont les problématiques sont chaque fois particulières. En découle une nécessité d’adapter le contenu des médiathèques à chaque situation : Bibliothèques Sans Frontières fait donc appel aux acteurs locaux, aux associations sur place, pour réfléchir au contenu proposé.
Jérémy Lachal s’est penché sur les guidelines de l’ONU pour la prise en charge des populations déplacées et réfugiées. « Culture, information, sont des mots qui n’apparaissent quasiment jamais. 3% de l’aide humanitaire seulement sont consacrés à l’éducation. Des enfants manquent des années entières de cours. Ces camps sont des prisons à ciel ouvert, dont on ne sort pas… Quel futur dans ces circonstances ? C’est l’enjeu de notre travail. On se bat sur le terrain mais aussi auprès des instances internationales pour une meilleure prise en compte de l’humain en nous. On doit aider les gens à se reconstruire, à se projeter vers l’avenir. »
Avec des résultats mesurés et concrets : les « Ideas Boxes » ont des impacts éducatifs puissants. Au Burundi, au bout de trois mois, les résultats académiques des enfants sont meilleurs que sans cet outil. En Colombie , on a démontré des résultats sur la construction de la paix, la cohésion sociale, la résolution pacifique des conflits.
Aujourd’hui, Bibliothèques Sans Frontières se développe en France dans les centres d’accueil de demandeurs d’asile. Favoriser le dialogue interculturel, accompagner les demandeurs dans leur installation, leur recherche d’emploi, « cela ne peut que faciliter l’intégration ».
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