Dans une très belle chronique dans le journal la Croix, Frédéric Boyer file la métaphore de la face cachée de la Lune. Vous savez, cette prouesse technologique des Chinois d’avoir pu alunir sur la face cachée de la Lune afin de l’explorer avec leur petit robot au drôle de nom de Lapin de jade 2. Cette face que nous ne voyons jamais depuis notre vieille terre, de par le « verrouillage gravitationnel. »
Nous sommes nous aussi comme notre vieux satellite. Avec nos faces cachées, car c’est généralement toujours la même face que nous présentons aux autres, une face montrable, suffisamment rangée, socialement correcte. Et c’est bien ainsi car pour vivre ensemble il faut de l’urbanité, de la civilité, ce que notre temps paraît d’ailleurs bien souvent oublier… Mais nous avons aussi ce côté plus lointain de nous-même qu’il faut savoir visiter.
Non d’ailleurs qu’il soit forcément sombre, noir. Simplement il n'est plus en friche, nous ne le fréquentons pas. Pourtant, comme pour notre sœur la Lune, ce côté-là est indispensable, sinon il n’est plus possible de tourner rond ! Ce côté plus éloigné, ce sont à la fois nos rêves oubliés d’enfance, notre imagination, nos chagrins et nos espoirs qui viennent de loin. C’est cette part de nous-même où tout peut être possible, imaginable.
Où un chemin escarpé peut se frayer au cœur des décombres de nos malheurs et de nos impasses d’adultes. C’est, raconte Frédéric Boyer, « ce côté de nous-même où nous croyons au Père Noël tout en sachant que ce sont nos proches qui achètent les cadeaux ! ». Car l’enfant, lui, sait se promener en ses deux faces de son existence. Alors il faudrait pouvoir de temps à autre, sans pour autant y rester fasciner, pouvoir passer de ce côté caché de nos histoires.
D’autant qu’elle est partie prenante de nous-même et participe tout autant de nos existences que la part volontaire, raisonnable, connue. Job répondit à son Dieu quand celui-ci lui raconta avec éclat la création, « J’ai fait, dans mon ignorance, des discours sur des merveilles qui me dépassent et dont je ne sais rien. » (42, 3). Sans doute, mais il en va peut-être ainsi de nos existences avant tout, qu’elles recèlent des merveilles dont nous ne savons rien. Ainsi sommes-nous humains par ce va-et-vient entre nos hémisphères…
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