Solidarité Orient

Robert Chelhod : des semences d’espoir pour la Syrie dans le terreau de
l’Évangile

L’invité de ce jour est Robert Chelhod, fondateur en 1990 de la section syrienne du mouvement des Focolari. Ayant été missionné en 2008 au Liban, c’est à distance de son Alep natale qu’il a douloureusement vécu les années de guerre qui ont ruiné son pays. Il y est revenu en 2017 et y est maintenant conseiller de Missio, membre du conseil de la Bible Society, et président de l’association Seeds of Hope, qui met sur pied des micro-projets de restauration d’une économie rurale adaptée à la réalité. Il nous parle de la réalité de la Syrie aujourd’hui, qui est toujours un pays en guerre, où l’embargo décrété par la communauté internationale aggrave une situation économique désastreuse et frappe surtout la société civile. Il s’interroge sur l’avenir des chrétiens du pays et sur le rôle qu’ils peuvent jouer dans la reconstruction du tissu humain, la promotion d’une société pacifiée et citoyenne et le dialogue fraternel entre les religions.

Enseignant et historien, attentif à l’actualité religieuse, Benoit Lannoo est consultant de plusieurs médias belges, tant au nord qu’au sud du pays, notamment en tant que bon connaisseur et observateur des communautés chrétiennes orientales. De retour d’une mission en Irak, où il a notamment enquêté pour préparer un ouvrage sur le clergé marié dans les Églises orientales, il développe son analyse non convenue de la situation très difficile des communautés chrétiennes irakiennes, que d’aucuns jugent en voie de disparition, ainsi que sur les relations entre les Églises et le dialogue islamo-chrétien en Irak. Sans oublier de souligner la grande vitalité spirituelle, malgré toutes les épreuves, du petit reste des chrétiens de Mésopotamie.

24 e patriarche de l’Église chaldéenne catholique depuis 2013, élevé à la dignité de cardinal en 2018, S.B. Louis Raphaël Ier Sako était en Belgique pour consacrer, le 3 février dernier, en la basilique de Koekelberg, un prêtre chaldéen marié. Il évoque les tensions qui l’opposent au gouvernement irakien et à certaines factions politiques chrétiennes, dans un pays déchiré entre les communautés chiites et sunnites, où Mgr Sako n’a cessé de plaider pour la construction d’un tissu social empreint des valeurs de la citoyenneté. Tensions suffisamment graves pour que le patriarche ait décidé de quitter son siège de Bagdad et de se replier provisoirement à Erbil, dans le Kurdistan. Il dit sa certitude que les sociétés du Proche-Orient n’évolueront vers plus de stabilité et de paix que si elles optent
résolument pour une laïcité ouverte, respectueuse de la liberté de conscience.

Les amis du Monastère Mar Moussa : en mémoire du Père Paolo Dall’Oglio et
en communion avec Mgr Mourad, archevêque syriaque catholique de Homs


L’invitée de ce jour est Barbara Mertens, cheville ouvrière de l’association Vrienden
van Mar Moussa, qui soutient le monastère St-Moïse l’Éthiopien (Mar Moussa al-
Habbashi), refondé dans le désert de Nabek (Syrie) en 1982 par un personnage hors
du commun, le père italien Paolo Dall’Oglio, kidnappé et probablement exécuté par
Daesh en juillet 2013. Barbara évoquera le lien du P. Paolo avec l’islam, qu’il disait
nourrir sa foi chrétienne. Notre invitée a accueilli en décembre 2023, l’archevêque
syrien catholique de Homs, Hama et Nebek, Mgr Jacques Mourad venu en Flandre
présenter la traduction en néerlandais de son livre Un moine en otage (2018).
Proche collaborateur du P. Paolo, Mgr Mourad a été en 2015 captif des jihadistes : ce
fut pour lui une expérience spirituelle extraordinaire mais aussi, paradoxalement, de
rencontre avec l’islam

Sa Béatitude Ignace Youssef III Younan, patriarche d’Antioche des
Syriaques catholiques.

Né en 1944, S.B. Youssef III Younan est depuis 2009 patriarche de l’Église
syriaque catholique, une des Église orientales catholiques qui s’est formée
progressivement aux 17 e -18 e siècles, suite au ralliement à l’Eglise romaine d’une
partie de la hiérarchie et des fidèles de l’antique Église syriaque orthodoxe non
chalcédonienne. Ayant assisté à l’ouverture de la 2 e session de la 16 e assemblée
générale ordinaire du synode des évêques à Rome, il vient à Bruxelles visiter,
comme il le fait régulièrement, les fidèles de sa communauté résidant dans notre
pays. Il nous parle de l’état actuel de son Église, petite par le nombre de ses
fidèles (estimés à 250 000) mais grande par les persécutions et les tragédies
qu’elle doit affronter au Liban, en Syrie, en Irak, en Terre sainte… sans oublier les
problèmes posés par l’existence d’une importante diaspora qui a fui le Proche-
Orient.

L’Arche Al Fulk en Haute-Égypte, ou une certaine idée de la dignité de la
personne « différente » ancrée dans l’éthique pharaonique
Depuis plusieurs années, Solidarité-Orient soutient l’action d’une des deux sections de L’Arche en Haute-Égypte. Représentant l’association, le père jésuite copte catholique Adel Azer, nous parle de son grand idéal, l’insertion de la
personne handicapée dans la société et la reconnaissance de sa dignité. Il nous
décrit les initiatives prises en ce sens en Haute-Égypte. Christian Cannuyer,
égyptologue, en profite pour rappeler que le respect de la personne handicapée ou fragilisée est un impératif éthique qu’on trouve déjà dans des textes égyptiens de l’époque pharaonique, dès l’Ancien Empire, il y a plus de 4000 ans, qui ont sans
doute inspiré les « Œuvres de miséricorde » de la tradition chrétienne.

L’Église syriaque catholique en Europe et en Belgique
Les invités de l’émission sont Mgr Rami Flavien al-Kabalan, visiteur apostolique
pour les Syriens catholiques en Europe, et le père Thomas Habbabé, recteur de
la paroisse syriaque catholique Notre-Dame de la Délivrance à Bruxelles et
ancien boursier de Solidarité-Orient. Ils nous rappellent l’histoire de l’Église
syriaque catholique, enracinée, comme son Eglise mère l’Eglise syriaque
orthodoxe, dans la grande tradition d’Antioche, où selon les Actes des Apôtres,
les disciples de Jésus ont reçu pour la première fois leur nom de « chrétiens ».Ils
nous parlent de sa présence actuelle dans la diaspora européenne, plus
spécifiquement en Belgique, et de ce qu’elle peut y apporter à la vie des
communautés chrétiennes locales.

Entretien avec le père Roland Awkar, directeur de l’orphelinat des pères antonins maronites de Mrouj, dans la province du Metn, proche de Beyrouth, et avec Lorraine Cannuyer, qui a séjourné un mois dans cette institution admirable, dans le cadre d’un stage relevant de son cursus de future enseignante de français et de religion à la Haute Ecole de Louvain en Hainaut, à Leuze, stage qu’elle a assorti d’une mission d’information et d’échange avec des partenaires libanais de Solidarité-Orient. Ils évoquent le Liban et de ses chrétiens, qui traversent des heures douloureuses en raison de la crise économique effroyable, de l’impasse politique totale, et du contexte régional marqué par le conflit entre Israël et le Hamas, qui est soutenu par l’Iran et son supplétif libanais, le Hezbollah, en confrontation ouverte avec l’État hébreu dans le sud du pays du Cèdre.

Bernard Coulie, Professeur à l’Université catholique de Louvain, fut le recteur de cette institution de 2004 à 2009. Son enseignement et ses recherches sont centrés sur les études byzantines, mais aussi sur les espaces périphériques du monde byzantin que sont l’Arménie et la Géorgie. Récemment, il a été co-commissaire, avec Nino Simonishvili, de l’exposition "Géorgie, une histoire de rencontres "
tenue du 27 octobre 2023 au 18 février 2024 au Musée Art & Histoire de Bruxelles, dans le cadre d’Europalia Georgia. Il a codirigé avec sa collègue géorgienne un superbe livre publié à cette occasion aux éditions Hannibal Une histoire de rencontres. Patrimoine culturel, artistique et historique de la Géorgie. Il nous fait découvrir cette chrétienté caucasienne méconnue, la Géorgie,
qui se veut à la fois orientale et européenne, son histoire, son riche patrimoine artistique et spirituel, les défis qu’elle affronte aujourd’hui.

Le père Zadik Avedikyan, né en 1957 à Yérévan (Arménie), a été ordonné hiéromoine (1980) puis archimandrite et vardapet/docteur en théologie (1987) dans l’Église apostolique arménienne, à la suite de ses études au Grand Séminaire du Saint-Siège d’Etchmiadzine (Arménie) mais aussi à la Faculté de
théologie de l’Université catholique de Lyon (France). Après avoir été notamment secrétaire de S.S.
Vazken I er , Catholicos de tous les Arméniens, il a été envoyé en mission pour servir la communauté arménienne de France (Lyon, Vienne, Grenoble, Saint-Étienne, Romans, etc.) et fut recteur de la cathédrale arménienne de Marseille de 2003 à 2009 ; depuis 2009, il est en Belgique recteur de la paroisse Sainte-Marie-Madeleine des Arméniens à Bruxelles (rue Kindermans, 1A, Ixelles), fondée en 1990, et Vicaire du Délégué du Catholicossat de tous les Arméniens en Europe Occidentale. C’est donc un excellent connaisseur de la communauté arménienne en Europe. Il nous parlera surtout de l’Église arménienne en Belgique, de l’histoire de sa paroisse, et de la manière dont sa communauté vit son
héritage spirituel et liturgique, sa relation à l’Arménie natale et aux épreuves que traverse celle-ci.

14 mai. Ugo Zanetti, passeur de la sagesse des pères du Désert.
Ugo Zanetti, s.j., spécialiste des textes ascétiques et hagiographiques de l’Orient
chrétien antique, et surtout du monachisme copte et éthiopien, a enseigné ces
matières à l’Institut orientaliste de l’UCLouvain. Il est aussi collaborateur de la
Société des Bollandistes dont la vocation est d’étudier de façon critique les sources
relatives à la vie des saints. Moine du monastère de la Sainte-Croix de Chevetogne,
il a vécu également avec les moines du monastère fondé au 4 e siècle par saint
Macaire le Grand (notre image), dans le désert de Scété (aujourd’hui le Ouadi
Natroun, en Égypte, à l’ouest du Delta du Nil). Ce grand savant ne dédaigne pas de
faire découvrir à un large public non spécialisé l’étonnante actualité du monachisme
ancien, qui se perpétue de nos jours en Égypte et en Éthiopie, et qui a tant donner à
l’homme du 21 e siècle en quête d’un recentrement de sa relation à lui-même, à ses
semblables et à Dieu.

L’émission d’aujourd’hui accueille Tigrane Yégavian, jeune et brillant géopoliticien,historien, poète à temps gagné, spécialiste de l’Arménie, lui-même d’origine arménienne mais ayant surtout vécu au Portugal et en France. Cet arabisant bardé de diplômes enseigne à Paris,
à l’Institut chrétiens d’Orient et à la Schiller International University, et est l’auteur ou le directeur de plusieurs ouvrages, notamment Géopolitique de l’Arménie, aux éd. Bibliomonde en 2022, et Haut Karabagh, Le Livre Noir, aux éd. Ellipses, la même année… Il intervient
régulièrement dans nombre de médias français, où par la pertinence incisive de ses analyses, il s’est fait un nom qui compte. Après la conquête du Haut-Karabagh par l’Azerbaïdjan et l’exode des quelque 120 000 Arméniens qui y vivaient depuis 2500 ans, il lance un cri
d’alarme : c’est à terme, toute l’Arménie qui est en danger face aux appétits territoriaux du dictateur azéri, qui ne cesse de nourrir un discours de haine, encouragé par l’apathie de la
communauté internationale.

Créée en 2017 à Lyon, l’association Mesopotamia (www.mesopotamiaheritage.org) développe un pogramme de valorisation patrimoniale et testimoniale des
communautés chrétiennes et yézidies d’Irak, fragilisées l’extrême par l’invasion des troupes criminelles de Daesh dans la région de Mossoul. Ancien journaliste à RCF, auteur-photographe de plusieurs livres remarquables sur les chrétiens d’Orient, Pascal Maguesyan, lui-même d’origine arménienne, en est la cheville ouvrière. Il témoigne avec un proche collaborateur, Azeez Sadeq, un jeune chrétien syriaque-catholique de Bakhdida (Qaraqosh), qui a dû fuir son village investi par le Daesh en 2014 et vit maintenant dans la région lyonnaise.

Nabil Azer Nessim, chrétien copte, s’est longtemps engagé dans son pays au service d’une association qui travaillait en Haute–Égypte auprès de personnes défavorisées, en particulier auprès d’enfants porteurs de handicap, un véritable tabou dans la société égyptienne, où le handicap est perçu comme une malédiction de Dieu. Établi en Belgique, Nabil Azer Nessim a continué à travailler dans cette voie et a créé, en lien avec des prêtres œuvrant sur place, l’association Amitié-Haute-Égypte-Belgique, qui vise essentiellement à aider l’intégration des personnes les plus fragilisées sans faire aucune distinction entre coptes et musulmans, ce qui contribue grandement à faire évoluer les mentalités dans le sens d’un plus grand respect des différences religieuses. Il nous présente plus particulièrement deux projets pour lesquels il a pu compter sur l’aide de
Solidarité-Orient, dans le Fayoum et dans le diocèse copte catholique d’Abou Qorqas, récemment créé.

Professeur émérite à la Faculté de théologie de Lille, ancien collaborateur du Centre Informatique et Bible de l’abbaye de Maredsous, Samir Arbache, d’origine syrienne, fidèle de l’Église grecque-melkite-catholique, a consacré toute une vie de recherche aux plus anciennes versions arabes des Évangiles.
Il vient de publier, aux éditions Safran (Bruxelles), la traduction en français et l’analyse linguistique soutenue par l’outil informatique d'un manuscrit du plus ancien texte arabe des quatre évangiles (Sinaï Arabe 72), traduit du grec et copié en 897 après J.-C. au monastère Saint-Chariton, situé entre Jérusalem et la Mer Morte. Ce document exceptionnel illustre comment les chrétiens et les musulmans du Proche-Orient, ayant adopté la même langue, ont réussi pendant plusieurs siècles à fonder une civilisation bien plus interculturelle et plurielle qu’on ne le croit souvent.

Le 28 janvier dernier, S.B. Youssef Absi, patriarche d’Antioche, d’Alexandrie, de Jérusalem et de tout
l’Orient des grecs-melkites-catholiques, a célébré une liturgie solennelle en l’église Saint-Jean
Chrysostome, rue de l’Orient (Bruxelles), dans le cadre des célébrations du tricentenaire de la
communion retrouvée entre son Église et le Siège de Rome. Il nous parle des origines de cette Église,
à la fois catholique et de tradition byzantine, des conditions parfois difficiles dans lesquelles elle a
vécu sa relation avec Rome, de sa vocation d’Église au cœur de l’Islam et du monde arabe, des défis
que pose une diaspora désormais plus nombreuse que les fidèles vivant au Proche-Orient.