Vendée
C’est la première fois depuis dix ans que le nombre d’ordinations sacerdotales en France passe sous la barre des 100. L'Église catholique a annoncé 88 nouveaux prêtres en 2023. Pourquoi cette baisse de vocations sacerdotales ? Pour Mgr Jérôme Beau, être prêtre aujourd'hui c'est faire un choix de vie "paradoxal", à contre-courant de la société. Un choix qui "demande une force de caractère".
Les ordinations sacerdotales ont lieu traditionnellement à proximité de la fête de saint Pierre et saint Paul, célébrée le 29 juin. Un certain nombre d’ordinations ont donc eu lieu ce week-end. Deux tiers des diocèses n’ont pas d’ordinations cette année. Comment expliquer cette baisse du nombre de vocations sacerdotales ? Étienne Pépin a posé la question à Mgr Jérôme Beau, archevêque de Bourges et président du conseil épiscopal pour les ministères ordonnés et les laïcs en mission ecclésiale.
Être prêtre aujourd’hui c’est quand même une belle aventure mais une aventure difficile
C’est la première fois depuis 10 ans que le nombre d’ordinations sacerdotales en France passe sous la barre des 100 - l’année dernière ils étaient 122 ordinants. Parmi ces 88 nouveaux prêtres, 56 sont ordonnés pour leur diocèse, 19 sont issus d’une congrégation, communauté ou société de vie apostolique, 18 sont religieux et 5 sont traditionalistes.
Aujourd’hui près des deux tiers des diocèses ne comptent aucune nouvelle ordination. Les provinces les plus fécondes en vocations sont Paris et Rennes, avec 10 nouveaux prêtres chacune. La communauté Saint-Martin, qui détenait habituellement des records (26 ordinations en 2021 et 14 en 2022), ne compte cette année que sept nouveaux prêtres. Les dominicains sont encore parmi les principaux viviers avec quatre ordinations cette année. Ils dépassent cette fois la communauté Saint-Jean qui n’en compte qu’une. Les prochaines années s’annoncent un peu plus florissantes, si l’on en croit le nombre de jeunes dans les séminaires. Un chiffre en progression…
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"Être prêtre aujourd’hui c’est quand même une belle aventure mais une aventure difficile", admet Mgr Jérôme Beau. La vie d’un prêtre, surtout dans les diocèses ruraux, est perçue comme solitaire. "On sent que... la vie du prêtre dans nos diocèses ruraux, c’est aussi la peur d’une certaine solitude", perçoit Mgr Beau.
De nombreuses neuvaines de prière pour les vocations sont régulièrement proposées dans les diocèses ou sur internet. Mais sans doute est-on prêt à prier pour les vocations sans aller jusqu’à désirer s’engager soi-même… Mgr Beau soulève en tout cas la question : "Les communautés chrétiennes, les chrétiens, cherchent moins à avoir des prêtres à leur image qu’à soutenir les vocations que Dieu appelle."
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"Répondre oui à l’appel et s’y engager ça demande une force de caractère", constate Mgr Beau. Il faut faire face à la diminution du nombre de prêtre, à la désaffection des églises par les fidèles, à l’indifférence vis-à-vis de la question religieuse… Plus fondamentalement, l’engagement à la prêtrise est un choix à contre-courant du reste de la société. Mgr Beau parle d’un "paradoxe". "C’est d’abord un engagement à vie… On voit bien que notre société a du mal à l’engagement, même dans la vie professionnelle… Là on leur propose l’engagement pour toute leur vie, ce qui est quand même déjà quelque chose énorme !"
Paradoxe aussi d’une "vie de pauvreté dans une société de consommation, dont l’argent est le mode de reconnaissance". Paradoxe enfin d’une "vie de fraternité alors même qu’il y a un certain individualisme dans la société". Mais cette "vie paradoxale", si elle en rebute plus d’un, est précisément porteur de sens. "On leur propose une vie dont le paradoxe va écrire une bonne nouvelle pour le monde d’aujourd’hui."
On peut supposer qu’une institution en crise, marquée par de nombreux scandales de pédocriminalité, peine à susciter des vocations. Mais pour Mgr Beau ce n’est pas l’Église qui appelle, c’est d’abord le Christ. "C’est le Christ qui les a saisis, ce n’est pas le modèle de l’Église, ce n’est pas le modèle de nos communautés qui les appelle, c’est le Christ…" Pour l’évêque de Bourges, ceux qui s’engagent dans la prêtrise, "conscients de cette crise des abus" et d’une "histoire marquée douloureusement et scandaleusement", "sentent dans l’appel, non pas de redresser ou de réformer l’Église, mais d’être signes de la beauté de la réponse vraie, chaste, exigeante, pleine d’espérance, à l’Évangile aujourd’hui pour être pasteur selon le cœur de Dieu."
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