Le secteur du prêt-à-porter est en pleine crise. À l'image de Camaïeu, Pimkie, Kookaï et plus récemment André, les enseignes vendeuses de vêtements accumulent les difficultés financières. En cause : le développement du numérique et l'avènement du marché d'occasion. Le milieu de gamme n'a pas su réinventer face à l'ultra fast fashion et le luxe accessible.
Le moral dans les chaussettes. Les salariés de l’enseigne André apprenaient début février que leur entreprise était placée en redressement judiciaire par le tribunal de Nanterre. Après Camaïeu, Kookaï, Pimkie, c’est une nouvelle enseigne de prêt-à-porter qui accumule les difficultés économiques et financières. Le constat est clair : le secteur en plein boom il y a quelques années est en crise. Les causes multifactorielles résultent à la fois d’une mauvaise stratégie des magasins mais aussi du manque de digitalisation de ces enseignes historiques.
En 2023, les Français consomment différemment. Avec l’ère du numérique, l’achat de vêtements se fait aussi beaucoup sur Internet. "Le fait de tous avoir des ordinateurs et des smartphones fait que nous avons des habitudes d’achat qui sont différentes. On achète en boutique et sur son ordinateur. On découvre aussi de nouvelles marques grâce à Instagram ou TikTok", assure Yann Rivoallan, président de la Fédération Française du Prêt à Porter Féminin.
Seul hic, certaines enseignes ancrées dans l’inconscient des Français et qui ont pignon sur rue, n’ont pas pris le pas du numérique et se font dépasser par d’autres entreprises extrêmement présentes sur Internet.
Les enseignes telles que Camaïeu ou Pimkie sont dites "milieu de gamme". Elles s’inscrivent dans un continuum qui ne trouve plus sa cible. Désormais, le luxe accessible attire un public qui cherche à acheter éthique et responsable de l’environnement. "Je prends l’exemple de Bash. Depuis plus de 10 ans, le e-commerce de cette entreprise est extrêmement performant avec du très bon contenu et avec une proximité de ses clients qui est forte", révèle Yann Rivoallan. Aujourd’hui, 30 % du chiffre d’affaires de Bash est réalisé par la vente en ligne. Une part non-négligeable pour une enseigne qui a su se réinventer.
A contrario, et c’est tout le paradoxe, si le luxe accessible attire, l’ultra fast fashion trouve également sa cible. En première ligne : le géant chinois du e-commerce Shein. L’entreprise surfe sur une industrie textile qui produit vite, pas chère et souvent de mauvaise qualité. En 2022, Shein représente à elle seule un chiffre d’affaires de 10 milliards d’euros et prétend expédier dans 220 pays. Une performance qui participe à la chute de nos enseignes françaises.
La seconde main est également l’une des raisons de la crise du prêt-à-porter en France. La plateforme Vinted facilite les échanges et la vente de produits d’occasion. Selon certains chiffres, un Français sur trois profiterait du marché de la seconde main pour acheter moins cher, plus responsable et ainsi éviter la surconsommation. Une sorte de vente en ligne qui explose et qui croise le destin tragique de la vente en magasin. L’entreprise Petit Bateau propose même un marché d’occasion sur sa boutique pour rentrer dans les normes de responsabilité sociétale de l’entreprise.
Selon les spécialistes, il y a une correction du marché. "Je veux rester optimiste par rapport aux acteurs qui arrivent à prendre le tournant de l’éco-responsabilité et d’une certaine sobriété", explique Gildas Minvielle, directeur de l’observatoire économique de l’Institut Français de la Mode. Il compare également le secteur du prêt-à-porter à celui de l’alimentaire sur notre territoire. "La malbouffe est terminée. Cela ne plaît plus à personne. Dans notre secteur, les acteurs vont massivement se diriger vers de nouvelles exigences".
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