Mars 2024 a été le plus chaud jamais enregistré à la surface de la Terre. Cela fait dix mois d'affilée que les records de température s’accumulent. Mais le réchauffement de la planète affecte aussi durablement les océans avec de multiples conséquences pour la vie marine et notre avenir.
C’est un record absolu. L ’eau à la surface des océans, hors zone polaire, a atteint en mars 21,07 °C de moyenne, selon les données de l’observatoire européen Copernicus. En février, on avait déjà observé 21,06 °C et en août le précédent record était de 20,98 °C. Ce n’est pas un phénomène isolé, c’est une tendance de hausse globale en parallèle avec les températures de l’air.
"El Nino tend à réchauffer des régions distantes comme l’Atlantique et l’océan Indien tropical ; Mais en général, le pic des températures se maintient au de la de la fin d’El Nino qui a lieu actuellement. Ce phénomène se superpose au réchauffement climatique dû aux émissions de gaz à effet de serre" explique Jérôme Vialard, climatologue et océanographe à l’Institut de recherche pour développement.
Le réchauffement peut affecter non seulement la surface, mais aussi les eaux plus profondes. Ces records de températures marines ont plusieurs conséquences. "Tout d’abord, cela influe sur la montée des eaux. L’eau plus chaude des océans se dilate et prend davantage de place, donc le niveau monte en plus des effets de la fonte des glaciers et des calottes polaires." indique Jean-Baptiste Sallée, directeur de recherche au CNRS, océanographe climatologue, co-redacteur du dernier rapport du GIEC. L'excès de chaleur va aussi accentuer certains phénomènes comme les ouragans.
Le réchauffement des océans menace aussi directement la vie marine. De telles températures soulèvent par des questions sur la résilience des écosystèmes marins, face à la pression répétée de périodes d'eau plus chaude. Il faut parfois quelques dixièmes de degré pour perturber des organismes vivants. La répétition des vagues de chaleur marine inquiète les scientifiques.
"On peut arriver dans les cas extrêmes de canicules marines à des événements de maladie et de mortalité massive qui vont, un peu comme un incendie dans nos forêts, dévaster des paysages marins. En Méditerranée des grandes gorgones, des coraux, des éponges ont été massivement touchée en 2022" constate Thierry Perez, directeur de recherche au CNRS et responsable de la Station Marine d'Endoume près de Marseille. "Quand la durée de l’exposition est longue, c’est en général à ce moment que la catastrophe survient."
Sous l’effet des changements de températures. Des espèces de poissons, par exemple migrent vers le Nord. Dans le cas de la Méditerranée on observe la présence d’espèces plus méridionales. "Ces espèces rentrent en compétitions avec celle qui était présentes avant elles. Et puis il y a des espèces exotiques introduites en Méditerranée par l’action de l’homme : l’ouverture du canal de Suez pour les espèces de mer rouge, les ballasts des bateaux, les fermes aquacoles. Quand ces espèces apprécient des eaux chaudes, le réchauffement favorise leur implantation" explique Thierry Perez.
Autre phénomène observé par les scientifiques, des impacts sur les algues marines. Les forêts de laminaires présentes par exemple en Bretagne, en Afrique du Sud ou en Californie sont fragilisées sous l’effet de la chaleur et risque de disparaître entrainant l’écosystème qu’elles abritent. Ces canicules marines font donc peser une menace sur la pèche dans plusieurs régions du globe.
Le réchauffement des océans risque de nous priver aussi d’un allié dans la lutte contre le dérèglement climatique. Recouvrant 70 % de la Terre, les océans contribuent notamment à absorber une bonne partie du CO2 produit par l'activité humaine. Comme les forêts, ce sont de véritables puits de carbone et la machine pourrait se gripper.
"Une température plus chaude fait que les gaz vont moins bien se diluer dans l’eau. Un océan plus chaud va se découpler un peu comme de l’huile et de l’eau. La couche de surface se réchauffe plus que les profondeurs et cela rend l’océan plus difficile à mélanger. Cela veut dire plus de difficulté à injecter des gaz dans les couches profondeurs des océans." explique Jean-Baptiste Salée climatologue et océanographe au CNRS
Enfin, ce réchauffement des mers peut aussi avoir un impact sur l’acidification des océans et perturber aussi les courants marins.
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