Ils travaillent en soins palliatifs, en Ehpad, en comité d'éthique. Cinq soignants chrétiens nous partagent leur quotidien et leur vision de la fin de vie. Et nous confient leur regard sur une possible légalisation de l'euthanasie et du suicide assisté.
Sandrine Guyony est psychologue au sein d'une équipe mobile de soins palliatifs : "Mon quotidien, ce sont des moments d'humanité, de rencontre. Paradoxalement, il n'y a pas d'endroits où il y a plus de vie, que là où l'on accompagne la fin de vie ! Mon moteur, c'est d'accompagner au mieux. Et je souhaite que la médecine garde cette humanité"
On pose la question aux soignants alors que le système de santé va si mal !
Dr André Dartiguepeyrou, médecin gériatre à la retraite, préside le Comité d'Ethique du Centre Hospitalier Alpes Léman : "Ethiquement, l'on peut débattre de tout. Je ne porte pas de valeur sur la question de l'aide active à mourir. Avant d'en débattre, il me semble toutefois qu'il faudrait d'abord appliquer la loi en vigueur. Elle donne droit au refus de soin, au soin palliatif, à la sédation profonde et continue jusqu'à la mort. Et surtout, ce qui me semble inacceptable aujourd'hui, c'est que la question se pose aux soignants alors que le système de santé va si mal ! Ce mauvais moment me choque. "
Il faut donner les moyens à la médecine palliative
Dr Iwona Cassar est médecin d'une unité de soins palliatifs à Sallanches : "Un patient sur deux ou trois arrive dans mon service me dit qu'il veut que sa vie s'arrête. Ensuite, avec une bonne prise en charge de la douleur, quasi toutes les demandes d'euthanasie disparaissent, l'envie de vivre des moments précieux qui ont du sens revient. Pour moi le débat est trop polarisé : c'est la souffrance horrible ou l'euthanasie. J'expérimente tous les jours qu'une autre voie est possible : le soin palliatif. Encore faut-il donner ses chances à cette médecine ! Je dois refuser deux à trois demandes de prise en charge par jour, dans mon service."
Un mystère qui nous touche, en tant que croyants, aux extrémités de la vie
Blandine Feugier, aumônier responsable de la pastorale de la santé du Diocèse d'Annecy : "En début et fin de vie, il y a un mystère qui, en tant que croyant, nous touche. Et je suis témoin que dans ces moments, dans cette temporalité, se vivent et se disent des choses fortes. Des mots d'amour, des demandes de pardon. Dans la volonté de tout maîtriser, je crains qu'on ne les empêche... et qu'on se prenne trop pour Dieu."
Dr Alain Semmelen, généraliste et coordinateur d'un EHPAD à Tanninges, a travaillé 15 ans en soins palliatifs : "On fait assez peu intervenir dans la discussion les personnes qui sont réellement concernées. J'ai constaté dans ma pratique comme des personnes favorables à l'euthanasie changeaient d'avis quand elles étaient bien prises en charge, en fin de vie. Et puis, avec les difficultés actuelles de la médecine, le moment est mal choisi pour débattre".
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