Le 24 janvier 2020, Agnès Buzyn est encore ministre de la Santé. Elle surveille ce nouveau virus apparu en Chine, à Wuhan, mais affirme que les "risques de propagation" dans la population française sont très faibles. Pourtant, quelques heures plus tard, trois premiers cas positifs sont confirmés en France. L’un deux est hospitalisé au CHU de Bordeaux, et il est pris en charge par le professeur Denis Malvy. "Cela faisait déjà quelques semaines que nous savions qu’une nouvelle émergence se présentait, donc nous étions mobilisés, se souvient-il. Notre équipe est formée pour prendre en charge des patients atteints d’infections à risques épidémiques et biologiques, c’est-à-dire hautement transmissibles et pathogènes."
Quelques jours plus tard, l’Organisation mondiale de la santé déclare l’état d’urgence sanitaire, un mois après la découverte du virus en Chine. En France, les premiers groupes de contamination – les premiers clusters – sont détectés en Haute-Savoie, dans l’Oise mais aussi dans le Haut-Rhin. Mi-février, un premier décès hors de l’Asie est à déplorer après la mort d’un touriste chinois à l’hôpital Bichat, à Paris. Et dans la nuit du 25 février, un premier Français meurt du Covid-19.
Pourtant, le gouvernement peine à prendre la mesure du phénomène : alors que la France doit en réalité faire face à une pénurie de masques pendant les premiers mois de l’épidémie, et que l’OMS ne recommandera le port du masque qu’en juin 2020, Sibeth Ndiaye rappelle, le 4 mars sur France Inter, qu’il ne faut pas en acheter. "Nous avons donné des instructions aux pharmacies pour qu’elles ne distribuent des masques que sur prescription médicale ou qu’aux professionnels de santé", déclare alors la porte-parole du gouvernement.
Petit à petit, le sommet de l’État prend tout de même conscience de l’ampleur de la pandémie : elle est "inexorable", dit Emmanuel Macron le 5 mars. La semaine suivante, le président intervient à la télévision, pour annoncer le maintien du premier tour des élections municipales mais la fermeture des établissements scolaires. Et puis le 16 mars, le couperet tombe : "Après avoir consulté, écouté les experts et le terrain, et en conscience, j’ai décidé de renforcer encore les mesures pour réduire nos déplacements et nos contacts au strict nécessaire", déclare Emmanuel Macron le 16 mars. Le mot n’est pas prononcé, mais c’est bien un confinement qui se met en place dès le lendemain, et qui durera finalement jusqu’au 11 mai.
Une mesure inédite, d’après Patrice Bourdelais, directeur d’études émérite à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS), et spécialiste de l’histoire des épidémies : "Autant, à l’époque médiévale ou moderne, on pouvait boucler une ville, un secteur voire une région, précise-t-il. Autant, assigner les personnes à résidence, c’est assez exceptionnel." De mars à mai, la France tourne donc au ralenti : on apprend à participer à des visioconférences, on regarde Koh-Lanta à la télévision le vendredi soir et on applaudit les soignants qui, eux, sont débordés et doivent s’adapter. "Il y a eu un travail extraordinaire de leur part, souligne le professeur Denis Malvy, du CHU de Bordeaux. Je pense aux cadres infirmiers qui ont fait un travail de partage d’informations et de mobilisation remarquable. C’est quelque chose qui était totalement inédit, que je n’avais jamais connu."
Progressivement, la situation sanitaire s’améliore : les bars, cafés et restaurants rouvrent dès le 2 juin et, au cours de ce mois, le nombre de cas positifs tourne autour des 500 par jour. Les Français passent donc un été presque normal, même si le masque devient obligatoire dans de plus en plus de villes. Mais cette parenthèse va être de courte durée, puisque les chiffres commencent à repartir à la hausse après la rentrée. Un second confinement est finalement annoncé fin octobre, et jusqu’au 15 décembre.
Peu après, les premiers vaccins arrivent, mais la découverte des nouveaux variant du Covid-19 laisse planer le doute sur la fin de la pandémie. "Ce qui est assez inquiétant par rapport aux épidémies précédentes, note Patrice Bourdelais, c’est que, en dépit de notre niveau de recherche sans précédent et de la rapidité à mettre au point un vaccin, les mutations sur le virus se succèdent. Si ces nouveaux variants sont sensibles aux anticorps produits par la vaccination, l’épisode pourrait se terminer à la fin de l’année 2021. Si ce n’est pas le cas, nous ne savons pas." En attendant, un énième conseil de défense sanitaire est prévu ce mercredi 27 janvier.
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