Les formations de soignants ont le vent en poupe. 10% des inscrits sur la plateforme Parcoursup, pour faire ses voeux après le bac, ont demandé à intégrer un institut de formation en soins infirmiers. Ce sont les études les plus demandées depuis trois ans. En pleine épidémie de Covid-19, cela semble être une bonne nouvelle. Mais l’engouement se dégonfler souvent une fois la formation intégrée.
C’est un sentiment de désillusion qui se dégage chez des étudiantes infirmières. Et parfois il ne faut même pas avoir terminé ses études pour être confronté à une réalité difficile, pendant les stages. "En stage, il manque de personnel, de matériel, donc on compense. Quand il n'y a rien qui va dans le service, avoir un étudiant en plus, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Il y a beaucoup de désillusion chez les étudiants en soins infirmiers", déplore Bleuenn Laot, étudiante infirmière et présidente de la fédération nationale des étudiants en soins infirmiers.
Les conditions de travail sont pointées du doigt, les salaires jugés trop bas. Certaines infirmières quittent la France pour travailler à l’étranger, au Luxembourg par exemple où leur salaire est multiplié par deux. D’autres quittent carrément la profession. "Vous avez 30 % des jeunes infirmiers diplômés qui abandonnent le métier dans les 5 ans qui suivent le diplôme parce qu'ils sont dégoûtés des conditions dans lesquelles on veut les faire travailler", affirme Thierry Amouroux, le porte parole du syndicat national des professionnels infirmiers. Avec les négociations du Ségur de la santé, les infirmières ont pu obtenir une revalorisation de leur salaire de 183 euros net par mois. Mais rien n’a été ajouté pour celles qui travaillent en réanimation.
Pour d’autres personnes, d’autres corps de métier, la situation peut-être encore plus dramatique, au point de mettre fin à ses jours. Depuis le début de l’année, 5 internes en médecine se sont suicidés à cause d’une surcharge de travail. Une mobilisation a eu lieu samedi devant le ministère de la Santé à Paris pour leur rendre hommage. "La vocation d’être auprès des patients est si forte qu’on a dû déplorer 5 décès d’internes. Ils voulaient tout donner aux patients, et on a un épuisement réel. Être épuisé au travail c’est dangereux pour les soignants et les patients", déplore Gaëtan Casanova, président de l’Intersyndicale nationale des internes.
Lui-même interne en anesthésie et réanimation à Paris, la crise sanitaire a renforcé son engagement face à un hôpital public qui a révélé ses limites. "Ce sentiment de devoir est devenu encore plus fort pour moi car je suis inquiet pour la prise en charge des patients. Quand on a des soignants qui sont épuisés, c’est l’hôpital qui meurt et si l'hôpital meurt, il entraîne avec lui les patients", alerte-t-il.
La crise sanitaire a modifié la façon de travailler de nombreux médecins et elle a pu mettre en lumière des services essentiels. À commencer par la réanimation, le dernier maillon de la chaîne de soin. "Si on me disait que mon métier futur n’était que de faire de la prise en charge de malades Covid, je changerai parce que l’intérêt de la réanimation c’est la polyvalence. Mais c’est pas désagréable de sauver la vie de quelqu’un et de lui offrir des jours ou mois supplémentaires de vie", affirme le professeur Damien Roux, médecin interniste dans le service de réanimation de l’hôpital Louis Mourier à Colombes dans les Hauts-de-Seine.
Un dernier maillon essentiel donc alors que les services de réanimation continuent d’être saturés. Pourtant, les départs de soignants existent. Près de 3 % d’entre eux auraient quitté leur poste après la première vague, selon une enquête du Syndicat des médecins réanimateurs.
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