L'élection historique de Claudia Sheinbaum, première femme élue présidente du Mexique, a été entachée par la violence. Au moins 27 candidats à des élections locales, qui se tenaient en même temps que les législatives et la présidentielle dimanche, ont été tués. Comme les précédentes campagnes électorales au Mexique, celle-ci a été marquée par une violence inouïe, car la menace des cartels plane. Pour garder son influence, le crime organisé fait pression sur les candidats aux élections locales et n'hésite pas à les éliminer. Les précisions de Jules Girardet est chargé de mission au CCFD Terre Solidaire, spécialiste de l'Amérique latine.
La campagne des élections générales au Mexique a été marquée par une extrême violence.
Le crime organisé et les cartels font pression sur les candidats aux élections locales et n'hésite pas à les assassiner.
Jules Girardet est chargé de mission au CCFD Terre Solidaire. Spécialiste de l'Amérique latine, il rappelle qu'en 2018, les élections générales avaient été aussi accompagnées de grandes violences. "Il n'y a pas que les assassinats", alerte t'il, " il y a aussi les menaces, les séquestres, les intimidations, les tortures, les cas de violence. Ce sont surtout les élections au niveau municipal et au niveau des gouvernements des États qui sont visés. Les cartels menacent, intimident et écartent les candidats qui les gênent."
À quelques jours des élections générales, la conférence épiscopale a appelé les citoyens à voter sans peur. Elle a exigé des autorités électorales de se conformer à la loi avec éthique et impartialité. Elle a aussi mis en garde les forces armées, leur demandant de défendre la démocratie face aux actions qui ne respecteraient pas les résultats. Sur le terrain, l'Église joue aussi un rôle important de médiation.
"L'État mexicain, par définition, ne négocie pas avec les cartels même s'il a pu le faire par le passé de façon confidentiel," explique Jules Girardet. "L'Église catholique essaie en revanche de jouer un rôle de médiation pour obtenir une trêve entre cartels ennemis". "Elle peut parfois se retrouver dans une situation dangereuse," ajoute t'il "mais ce rôle de médiation est salué de l'État mexicain. Et d'ailleurs, la conférence épiscopale mexicaine a interpellé les candidats avant le vote et les a appelé à une fête civique sans violence ni fraude."
L'église catholique mexicaine est une institution reconnue. Elle agit sur le terrain social mais aussi lorsqu'il s'agit de défendre les droits humains. Jules Girardet prend l'exemple du centre Bartolomé de Las Casas, au Chiapas. "C'est une organisation issue de l'Église catholique qui documente les violations de droits humains et surtout qui accompagne les victimes de torture mais aussi celles qui ont été écartés de la course électorale." Il rappelle que "la population mexicaine paye le prix lourd de ces affrontements. On recense plus de 120 000 disparus. L'Église est encore présente pour accompagner les familles de disparus dans leur combat pour la justice, la reconnaissance et la réparation."
Pour l'Église catholique, ce rôle de médiation n'est pas sans risque. Selon l'aide à l'Église en détresse, le Mexique est le pays d'Amérique latine le plus dangereux pour exercer le sacerdoce. Au cours des 18 dernières années, soit trois mandats présidentiels, 40 prêtres ont été tués dont deux prêtres jésuites abattus dans une église en juin 2022.
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