Les nominations décalées s’enchaînent dans la future administration de Donald Trump. Le nouveau président américain installe au sommet du pouvoir un casting haut en couleur, des personnalités controversées ou sans compétences directes avec le poste, choisies pour leur loyauté sans faille.
Un ancien présentateur télé au Pentagone, un antivaccin à la santé, ou le milliardaire Elon Musk pour sabrer dans les dépenses publiques, depuis son élection chaque jour Donald Trump bouscule un peu plus les codes avec les nominations de sa future administration.
Mercredi Linda McMahon, ancienne présidente de fédération de catch a été choisie pour diriger l’éducation nationale. Donald Trump ne retient pas les compétences pour choisir un profil. "Son principal critère, c’est la fidélité" estime Ludivine Gilli, directrice de l’observatoire de l’Amérique du Nord à la Fondation Jean Jaurès.
"Les personnes choisies ont vanté les louanges de Donald Trump lorsqu’il était au plus bas. Aujourd'hui, elles sont récompensées. Elles sont la voix de Donald Trump et donc traduiront exactement ce qu'il leur demandera" ajoute Jean-Eric Branna enseignant à l’université Paris 2 Lors de son premier mandat, Trump a été marqué par les défections dans son camp et a enchaîné les limogeages. Il n’a pas voulu refaire ce qu’il a décrit comme "sa plus grosse erreur". Un profil tranche toutefois avec cette quête de loyauté absolue : le sénateur de Floride Marco Rubio nommé ministre des Affaires étrangères avec lequel il a eu en 2016 des relations conflictuelles.
"Vu à la télévision" est aussi un plus sur un CV pour Donald Trump. Mehmet Oz, ancien chirurgien star des plateaux télé a ainsi été nommé mardi pour piloter l'énorme programme public d'assurance-maladie américaine. Pete Hegseth, animateur Fox News TV et ancien militaire de la garde nationale, se retrouve propulsé à la tête de l'armée la plus puissante du monde. (3,4 millions de soldats et d'employés civils et un budget de plus de 850 milliards de dollars annuel).
"Servir dans la garde nationale ne donne absolument pas les compétences pour gérer le ministère de la Défense. C’est un monstre non seulement sur le plan financier, mais également sur le plan stratégique. Ce choix de Donald Trump provoque beaucoup de réserves, y compris du côté républicain" explique Ludivine Gilli. Autre nomination problématique celle de Tulsi Gabbard à la très sensible direction du renseignement. Cette transfuge du Parti démocrate est connue pour des prises de positions favorables à la Russie.
Mais la nomination la plus controversée concerne le ministère de la Justice. Le choix de Matt Gaetz a provoqué une déflagration, jusque dans les rangs républicains : Cet élu de Floride, classé à l’extrême droite est un fidèle parmi les fidèles de Trump, mais sa probité a été mise en doute à plusieurs reprises. "Matt Gaetz est un personnage extrêmement sulfureux. Il a été mis en cause dans un certain nombre d'affaires, notamment pour des relations sexuelles facturées avec des mineures et également de potentiels détournements de fonds" rappelle Ludivine Gilli.
Elu de Floride à la Chambre des Représentants, Gaetz était l'objet d'une enquête de la commission d'éthique. Elle s'est arrêtée au moment où il a démissionné, juste avant d'être nommé par Donald Trump. Impliqué dans plusieurs procédures pénales comme celle de l’assaut du Capitole, le nouveau président, ne s’est pas caché de vouloir en finir avec "l'instrumentalisation" de l'appareil judiciaire. Gaetz pourrait ainsi devenir le bras armé de la vengeance du milliardaire.
Les choix de Trump sont aussi des choix de rupture dans la logique d’une campagne tournée contre l’influence de l’état fédéral.
"Il y a globalement dans les nominations de Donald Trump une volonté affichée de faire exploser le gouvernement, l'administration de l'intérieur. Donc on a vraiment l'impression qu'il nomme à certains postes des personnes totalement à contre-emploi, soit parce qu'elles ne sont pas qualifiées soit parce qu'elles veulent aller à l'encontre des missions de leurs administrations" analyse Ludivine Gilli.
Difficile de passer aussi à côté d’Elon Musk. L’homme le plus riche du monde qualifié de "meilleur pote" du président présidera une commission chargée de tailler dans la dépense publique fédérale mais ce choix entretient un autre phénomène dans cette future administration celle d’une confusion entre intérêts privés et intérêts publics.
"Comme il n'est que conseiller, pour l'instant, Elon Musk n'est pas touché par les conflits d'intérêts que l'on reprocherait à un ministre, mais il y en a quand même, ne serait-ce que parce qu'il touche de l'argent du gouvernement avec ses entreprises notamment. Space X" constate Jean-Eric Braana.
Ces nominations dans les différents ministères devront être confirmées par le Sénat à majorité républicaine. Donald Trump a laissé entendre qu’il pourrait passer outre leur avis. Un article de la Constitution américaine permet au président de procéder à des nominations sans qu'elles ne soient approuvées par le Sénat si l’assemblée n’est pas en session. Mais cette disposition est rarement activée, les sénateurs s'arrangeant pour siéger au moment des nominations. Et certains élus conservateurs ont exprimé leurs réserves sur la possibilité que Matt Gaetz puisse être confirmé à son poste à la Justice.
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