Il y a cinq ans jour pour jour débutait l’acte 1 des gilets jaunes. Coup d’envoi de la plus grave crise sociale en France depuis mai 68 avec des mois de mobilisation partout en France. Ce mouvement aura marqué durablement le premier quinquennat d’Emmanuel Macron et aura laissé des traces dans la société française.
En 2018, la grogne couve déjà depuis le mois d’octobre. Mais l’étincelle, c’est la hausse de la taxe sur les carburants. Le gouvernement n’a pas voulu retirer à l’époque. Pétitions en ligne, vidéo sur YouTube, groupe Facebook, le mouvement, sans véritable coordination se structure sur les réseaux sociaux. Très vite, il cristallise plusieurs revendications sur le pouvoir d’achat et la justice fiscale et sociale. L’appel à manifester avec un gilet jaune de sécurité, que tout automobiliste est tenu de posséder, va surprendre le gouvernement par son ampleur.
« Les gilets jaunes auront marqué l’histoire de France. L’un des points positif, c’est qu’il a libéré la parole. Les Français n’ont plus eu peur de parler de leur misère » estime Jacline Moureaud, l’une des figures du mouvement à l’époque. « Ce mouvement est né de la base et s’est toujours défié de toute émergence d’un leader. C’était sa force et sa faiblesse » rappelle Christian Le Bart politologue à Science Po Rennes, auteur du livre "petite sociologie des gilets jaunes" aux presses universitaires de Rennes.
Le mouvement a été aussi marqué par des violences. Le 1er décembre 2018 à Paris, la manifestation sur les Champs Élysées prend des allures d’insurrection avec des dégradations à l’arc de Triomphe. Au Puy-en-Velay, des manifestants tentent d’incendier la préfecture. La réponse policière a elle aussi laissé des traces. Les ONG de défense des droits de l’homme considèrent qu’elle a été disproportionnée.
« La réponse a constitué en partie des entraves à la liberté de manifester et l’utilisation d’une force excessive et abusive avec notamment l’augmentation des tirs de LBD. On a dénombré 2400 blessés entre novembre 2018 et 2019 » précise Domitille Nicollet, chargée de plaidoyer sur le droit de manifester et les violences policières à Amnesty International France.
Beaucoup d’ex gilets jaunes considèrent qu’il n’y a jamais eu de réponse politique à la crise. Malgré les cahiers de doléances suivis d’un grand débat national voulus par Emmanuel Macron pour tenter de retisser le dialogue. « La structure du mouvement n’a pas aidé l’Etat, mais la réponse politique reste assez sidérante de désinvolture. L’exécutif a été davantage dans le symbolique que le concret » relève Christian Le Bart.
5 ans après, le contexte social ne s’est pas amélioré et s’est même dégradé, mais un retour des gilets jaunes semble improbable. « Il y a eu une conjonction très ponctuelle entre des gens prêts à s’engager et une conjoncture. Les gilets jaunes ce n'est pas un groupe, un parti ou un syndicat. Ils sont nés d’initiatives individuelles; Les conditions assez miraculeuses du mouvement pourraient se retrouver mais pas en ce moment » souligne le politologue. « Le mouvement a été spontané. Un caractère impossible a reproduire aujourd’hui. Le gouvernement a posé des verrous. Mais c’est ancré dans le cœur des Français et ça peut potentiellement donner de nouvelles formes de contestations » prévient Jacline Moureaud.
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