Ce week-end, le président Emmanuel Macron s'est rendu à la conférence "Imaginer la paix", organisée par la communauté Sant'Egidio, pour notamment y évoquer l'Ukraine et une possible paix avec la Russie. Sa prise de paroles s'ajoute à celles d'un panel interreligieux et politique réunit pour réfléchir au futur des relations internationales dans un monde de plus en plus en guerre. Étienne Pépin revient sur ces journées de discussions.
Organisées par la communauté Sant'Egidio, les Rencontres internationales pour la paix réunissent cette semaine 150 leaders religieux, politiques et de la société civile pour "imaginer la paix." Une rencontre née en 1986, lorsque le pape Jean-Paul II a rassemblé pour la première fois les représentants des grandes religions à Assise afin de prier pour la paix.
Les 38ème Rencontres internationales pour la paix ont eu lieu pour la première fois étape à Paris du 22 au 24 septembre. Les thèmes de cette édition sont : “Imaginer la paix” et “Pour faire la paix, il faut parler avec ceux qui font la guerre”. Valérie Régnier, responsable de la communauté Sant'Egidio en France, exprime sa volonté de rêver la paix : "Cette quête de dialogue peut paraître naïve face aux 59 conflits en cours. Il n’y a jamais eu autant de guerres depuis 1945. Il faut alors préparer la paix, la rêver et l’imaginer. Il s’agit de résister à l’esprit du temps qui nous pousse au conformisme et à la résignation."
Il y a toujours à améliorer, à retisser les fils de la paix, entre ceux qui savent trouver la force d'espérer là où tant d’autres abdiquent.
Parmi les participants de ces rencontres internationales, de nombreux représentants religieux étaient présents : Justin Welby, primat de la Communion anglicane, Muhammad Abdul Khabir Azad, grand imam de la mosquée de Lahore au Pakistan, Tsunekiyo Tanaka, président du shintoïsme Jinja Honcho au Japon, ou encore Haïm Korsia, grand rabbin de France. Ce dernier partage également un rêve de paix : "Imaginer la paix, c’est déjà commencer à la construire. La paix, en hébreu, se dit 'shalom', ce qui signifie plénitude. La plénitude, c’est la perfection. Le problème : comment faire mieux que la perfection ? Il y a toujours à améliorer, à retisser les fils de la paix, entre ceux qui savent trouver la force d'espérer là où tant d’autres abdiquent. Et ce qui nous sauve, c’est notre capacité à imaginer malgré tout la paix."
Mgr Ulrich, archevêque de Paris, a, lui aussi, pris la parole dimanche. Selon lui, si l’on est capable de vivre des idéaux comme les Jeux Olympiques ou de rebâtir la cathédrale Notre-Dame de Paris, alors on est capable de faire la paix. "Si nous sommes capables de rassembler toutes les nations autour de l’idéal exprimé par l’olympisme, mais aussi de bâtir ou de rebâtir des cathédrales, imaginer la paix doit être à notre portée. S’il est un ouvrage à remettre cent fois sur le métier, c’est bien celui de la cohésion, qu’on appelle socialement la solidarité. Nous, chrétiens, y voyons l’expression de Dieu qui est charité. La République française, quant à elle, entend la promouvoir à travers la fraternité, le troisième terme de sa devise. Tout peuple est à la recherche de l’amitié sociale, sans laquelle aucune nation ne saurait vraiment exister."
Les Rencontres internationales pour la paix se succèdent d’année en année, pourtant la guerre continue. Andrea Riccardi, fondateur de la communauté Sant'Egidio, pose cette question : pourquoi la culture de la paix est-elle en crise ? Pour lui, ce n’est pas seulement à cause des guerres ou du terrorisme, mais bien à cause d’un héritage moral du XXe siècle. "Les guerres mondiales, la Shoah, les déplacements de populations, le recours à l’arme nucléaire... L’héritage incarné par les témoins de la Shoah a aujourd'hui disparu. Ceux qui savaient ce qu’était une guerre mondiale ne sont plus là, et il y a un silence. La mémoire de la guerre s'est dépréciée, l’esprit de paix s'est fragilisé."
La mémoire de la guerre s'est dépréciée, l’esprit de paix s'est fragilisé.
L'assemblée inaugurale d'hier s’est achevée avec l'allocution du président de la République Emmanuel Macron, qui a appelé à réhumaniser l’ordre international : "Avant même d’imaginer la paix, il y a ce besoin de réhumaniser. De connaître, de comprendre, d’avoir la patience d’observer, d’apprendre la langue. Ce chemin est indispensable. Les religions que vous représentez ici jouent un rôle fondamental à cet égard, et la France s'honore de les y aider, en particulier au Proche-Orient. Partout où l’on peut sauver une école, protéger une classe, on sauve un peu de ce chemin possible. Le regard est réhumanisé d’abord." Plus d’une centaine de personnalités des mondes religieux, politiques, économiques et culturels participeront aux 21 tables rondes sur les thèmes de la paix et du désarmement, de la crise environnementale, des migrants, de la démocratie et de la solidarité.
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