Le célèbre guide rouge dévoilait le 18 mars sa nouvelle sélection de grandes tables étoilées. Il y a quatre ans, l’Auberge du Pont de Collonges, le restaurant mondialement connu de Paul Bocuse, perdait sa troisième étoile, faisant de la capitale de la gastronomie une orpheline. Seuls quatre restaurants de la Métropole lyonnaise portent fièrement deux étoiles Michelin aujourd’hui.
Le guide Michelin, s'impose depuis 1931 comme une référence du milieu de la gastronomie et notamment en décernant ses fameuses étoiles. Un établissement obtenant une étoile signifie que le restaurant représente une bonne table dans sa catégorie. Avec deux étoiles, l’enseigne vaut le détour, et trois étoiles, la plus haute récompense, indiquent que le restaurant vaut le voyage. Pour décerner ces récompenses, le guide a recours à des inspecteurs anonymes. Chaque année, différents inspecteurs se rendent à plusieurs reprises dans les établissements afin d'évaluer la régularité du travail fourni par l’établissement et de prendre une décision collective.
Mais l'étoile n'est pas la seule récompense décernée par le guide rouge. On retrouve aussi le Bib Gourmand, attribué aux restaurants offrant un meilleur rapport qualité-prix. Une décoration qu’a obtenue le Siprès : ouvert l’été dernier dans le 7e arrondissement de Lyon, ce restaurant est né d’une rencontre entre le chef cuisinier Alexis Trimbour et le chef pâtissier Alexis Hostiguian. Pour ces deux trentenaires, les étoiles ne sont pas une priorité : « Cette récompense nous va bien parce qu'on reste libre, on peut continuer à faire ce qu’on fait sans se mettre la pression, sans se dire qu’il faut qu’on modifie telle ou telle chose, contrairement à l'étoile », confie le chef Hostiguian.
Cette pression avait aussi été exprimée en 2012 par le chef Cyril Lignac lorsqu’il avait gagné un macaron. Il avait finalement décidé de quitter le carcan du guide Michelin, disant vouloir se libérer du système de classement du guide. Un avis que partage Hubert Vergoin, chef du restaurant Substrat à la Croix-Rousse. Depuis 10 ans, ce restaurateur porte l’ambition de faire une cuisine de qualité tout en gardant une grande liberté. « On peut faire une assiette gastronomique dans un bistronomique. Je pense que c’est ce que nous avons réussi à faire avec toute une génération. Il y a des ouvertures récentes comme Leptine (anciennement Morfale) où l’on peut manger une cuisine tout à fait moderne, innovante et gastronomique, dans un lieu qui ne l’est pas du tout. On y écoute du Jul et du gros hip-hop, ce sont des conditions de dégustation qui ne sont pas du tout gastronomique mais ce qu’il y a dans l’assiette, c’est de la haute voltige », explique Hubert Vergoin. D’après lui, obtenir une étoile est aussi une question d’investissement : « Mon ami Nicolas Guilloton, chef à l’Atelier des Augustins, bataille depuis 10 ans pour obtenir une étoile en faisant une cuisine de qualité. Mais pour avoir une étoile, ce n'est pas uniquement dans l’assiette que ça se passe ». Il y a quelques mois, Nicolas Guilloton a décidé de faire d’importants travaux d’agrandissement, quitte à fermer plusieurs mois son restaurant. Un investissement payant puisque l’Atelier des Augustins vient justement d’obtenir sa première étoile.
Une étoile qui peut rapidement être rentabilisée : on estime qu’un restaurant étoilé voit sa clientèle augmenter de 25 à 30 %.
Bien qu’aujourd’hui la capitale de la gastronomie soit dépourvue d’établissement 3 étoiles, elle compte toujours des personnes qui œuvrent pour faire rayonner la cuisine lyonnaise. Il y a par exemple l’association des Toques Blanches qui regroupe de nombreux chefs cuisiniers. Son président Christophe Marguin estime que le guide Michelin n’est plus aussi pertinent qu’avant : « Le Guide Michelin est comme toute entreprise, je suis certain qu’ils ont des problèmes de recrutement. Les inspecteurs ne peuvent pas être toujours bons, l’humeur joue aussi et je pense que leurs choix sont moins pertinents. C’est pour ça que beaucoup de chefs délaissent cet objectif ».
Le guide n’est plus le seul moyen pour un restaurant d’être mis en avant : « Il y a des moyens de communication, notamment via les réseaux sociaux ou les podcasts. Il y a quand même plein de façons de communiquer sur la nouvelle et jeune cuisine, ce qui n’était pas le cas avant. Si on n'était pas dans les guides, on avait beaucoup de difficultés à faire parler de nous », explique Hubert Vergoin.
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