Alors que les écologistes viennent d'élire Marine Tondelier comme nouvelle secrétaire national d'EELV, comment le parti se prépare-t-il pour 2027 ?
Après la vague verte des municipales en 2020 et un nombre record de députés arrivés l’été dernier à l’Assemblée nationale, les Verts souhaitent capitaliser sur leur expérience du pouvoir. Zoom ce matin sur la ville de Lyon, qui a basculé il y a deux ans avec l'arrivée de Grégory Doucet à l'Hôtel de ville et Bruno Bernard à la Métropole de Lyon.
Samedi 10 décembre, le parti écologiste a élu sa nouvelle secrétaire nationale Marine Tondelier lors de son Congrès interne à Rungis. Europe-Ecologie-les-Verts tourne ainsi la page de l’ancien patron Julien Bayou, accusé de violences psychologiques, ce qu’il l’avait amené à démissionner de l’exécutif du parti. EELV souhaite ainsi se mettre en ordre de marche pour les prochaines échéances électorales avec en ligne de mire la présidentielle de 2027. Après la vague verte des municipales en 2020 et un nombre record de députés arrivés en juin 2022 à l’Assemblée nationale, les écologistes souhaitent capitaliser sur leur expérience du pouvoir.
A Lyon, une centaine d'élus sont arrivés dans les différentes collectivités locales après les élections municipales et métropolitaines de 2020. La quasi-totalité n’avaient jamais eu de mandat politique. Un vent de fraîcheur qui a porté aussi lors des dernières législatives : la députée lyonnaise Marie-Charlotte Garin, l’une des benjamines de l’Assemblée nationale à 27 ans, a trouvé à Lyon un moteur, dans son envie de faire bouger les choses pour la planète.
Je suis arrivée à Lyon pour mes débuts professionnels au moment de la démission de Nicolas Hulot du ministère de l'Ecologie [août 2018]. J'ai adhéré à EELV, puis j'ai milité un temps avec Extinction Rébellion et Alterniba. En 2020, je me suis investie dans la campagne des municipales. On a observé quelque chose d'assez particulier à Lyon. Enormément de citoyens se sont investis dans le mouvement, beaucoup de gens venus des associations avec des manières un peu différentes de faire de la politique : de la sociocratie, des élections sans candidats. J'ai le souvenir d'une assemblée générale où on a validé les pans du programme à 200 en intelligence collective. Je crois que ça a embarqué beaucoup de monde. C'est ce qui a fait que je suis restée à Lyon.
Au sein des exécutifs locaux à Lyon, on retrouve aujourd’hui beaucoup d’anciens leaders associatifs, comme Fabien Bagnon, ancien porte-parole de La ville à vélo et aujourd'hui vice-président de la Métropole de Lyon en charge de la voirie et des mobilités actives ; ou bien Benjamin Badouard, cofondateur de l'association anti-pub Plein la vue, co-président du groupe écologiste à la Métropole de Lyon et qui vient d'intégrer le bureau exécutif national d'EELV comme chargé des liens avec la société civile (associations et syndicats).
Au centre de cette galaxie associative et militante lyonnaise, l'association Anciela représente une planète de taille importante. Cette structure est née de la volonté de plusieurs étudiants en 2012 et accompagne aujourd'hui des initiatives d’entreprise, de citoyens ou d’associations en faveur de la transition écologique et solidaire. Un organisme de formation professionnelle en est né : l’Institut Transitions, qui accompagne les évolutions et reconversions professionnelles vers le monde de la transition écologique et solidaire.
Martin Durigneux est à la fois président d'Anciela et cofondateur de l'Institut Transitions.
A Lyon, il y a une ESS militante engagée très puissante et très ancienne. Pour donner une idée, pendant une période, les fédérations de protection de la nature de la région Rhône-Alpes représentaient plus de la moitié des salariés de toutes les fédérations de la nature en France.
Il y a aussi une culture catholique lyonnaise très forte, humaniste, influente, qui s'est renforcée avec l'encyclique Laudato Si' du Pape François.
En témoigne également l’essor de l’association des Alternatives catholiques, qui tiennent depuis six ans le café Simone dans le centre de Lyon et dont plusieurs membres gravitent autour - voire font partie - des cabinets politiques des exécutifs politiques locaux.
Lyon, une exception, vraiment ?
Pour autant, existe-t-il vraiment une spécificité écologique lyonnaise, qu’on ne voit pas ailleurs en France ? Pas vraiment selon Aurélien Martinez, l'auteur de « Quand les Verts arrivent en ville » (Bouquins, 2022), un livre-enquête pour lequel il s’est rendu dans la dizaine de grandes villes dirigées par des écologistes depuis les élections municipales de 2020.
Pour ce journaliste indépendant, ce récit de l’écosystème écologiste « à la lyonnaise » peut s’apparenter à une forme de storytelling.
Grégory Doucet [maire de Lyon] aimerait clairement faire de Lyon un laboratoire de l'écologie politique et aimerait qu'on raconte cette belle histoire, qu'il aurait un terrain favorable ici, qu'il y a de nombreux acteurs, que c'est pour ça qu'il a gagné en 2020 et que ça va continuer. Pourtant, en comparaison avec d'autres villes françaises, Lyon n'était pas forcément la plus en avance, elle était même plutôt en retard. Il y avait une conscience politique plus forte dans des villes censées être plus à gauche comme Poitiers ou Besançon. Lyon n'était pas identifiée comme prenable par EELV. D'ailleurs, Grégory Doucet a potentiellement gagné parce qu'il y a eu des divisions assez violentes chez ses adversaires.
Lyon reste une grande ville, dont l’évolution sociologique favorise l’arrivée d’élus verts, mais c’est le cas aussi à Bordeaux, Grenoble, Strasbourg ou Poitiers. Une carte électorale qui a favorisé l’élection de Marie-Charlotte Garin. Depuis six mois, la nouvelle députée écologiste a tout de même l’impression d’évoluer à Lyon dans une culture politique bien différente de ce qu’elle peut voir à Paris quand elle siège à l’Assemblée nationale.
Je crois qu'à Lyon, les élus sont beaucoup moins dans des logiques de "politique politicienne", avec beaucoup d'ego, où les gens veulent exister, où il peut y avoir de la manipulation, des coups bas. Ici, j'ai l'impression que le climat est très sain. Quand il y a des désaccords, les choses se disent de manière claire, bienveillante et exemplaire. Je trouve que c'est reposant et ça me donne des raisons d'être optimiste, de me dire que si sur un territoire comme le nôtre, on arrive à créer ce climat, il y a peut-être l'espoir qu'on puisse l'exporter le plus largement possible.
Depuis deux ans, les Verts à Lyon bénéficient d’une forme d’alignement de planète en terme politiques. Place désormais à l’exercice du pouvoir, avec les nombreuses attaques venues de l’opposition et la gestion des frustrations politiques, inévitables quand de nouveaux venus arrivent aux manettes de la gestion d’une ville. En 2020, les Verts ont été élus à Lyon sur un programme. En 2026, ils devront assumer un bilan.
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