Dieu s'invite au Festival d'Avignon
En partenariat avec LE JOUR DU SEIGNEUR
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Mercredi 5 juillet s'ouvre la 77e édition du Festival d'Avignon, soit la plus grande manifestation de spectacle vivant au monde. L'occasion de se pencher sur Jean Vilar, l'immense homme de lettres et de théâtre qui le fonda au sortir de la Seconde guerre mondiale.
"Avignon réunira et Avignon donc existera" : c'est ainsi que se serait exclamé Jean Vilar en 1947, avant la toute première édition de ce qui deviendrait le Festival d'Avignon, et c'est la formule qu'a choisie son directeur actuel, Tiago Rodrigues, pour mot d'ordre de la 57e. "En 1947, la France sort de la guerre, il y a encore des tickets de rationnement à Avignon, une pénurie de matériel : Jean Vilar décide de quitter Paris et ses lieux clos trop étouffants selon lui pour se rendre dans la Cour d'honneur du Palais des papes d'Avignon, retrace Violaine Vielmas, auteur d'une toute récente biographie de cet homme à partir de ses nombreuses correspondances épistolaires*. Très rapidement, il y a fait monter une scène avec l'aide du septième régiment qui était logé dans une caserne proche d'Avignon. Il répète, en quelques semaines, trois grandes créations en France et lance ce qui deviendra le Festival d'Avignon, qui s'appelait au début la Semaine d'Art".
La vie de Jean Vilar peut se résumer à son combat acharné pour rendre au théâtre sa dimension populaire. En 1951, il reprend le théâtre national de Chaillot auquel il rend son nom d'origine : Théâtre National Populaire. Un succès fulgurant puisqu'en douze ans, il enregistre plus de 5 millions d'entrées. Dans le même temps, le Festival d'Avignon porte des premiers fruits prometteurs. Pourtant, "il souffrait d'une concurrence assez rude avec les théâtres privés, qu'il jugeait trop mercantiles, trop soumis aux lois du marché et aux caprices du public, souligne Violaine Vielmas. Il souhaitait au contraire un théâtre exigeant, de qualité, mais qui reste ouvert à tout le monde. C'est pour ça que, dès le début, il y a cette idée de réunir".
Il souffrait d'une concurrence assez rude avec les théâtres privés, qu'il jugeait trop mercantiles, trop soumis aux lois du marché et aux caprices du public
La correspondance nourrie que débroussaille la chercheuse en lettres modernes dessine un personnage au caractère bien trempé. "L'échange le plus long est celui avec André Malraux", explique-t-elle, précisant que "se noue une amitié intellectuelle et une admiration réciproque très forte" entre lui et celui qui fut ministre des affaires culturelles de 1959 à 1969. "Sa dernière lettre, presque une lettre testamentaire car elle n'a pas été envoyée, est adressée à André Malraux. On y perçoit un Jean Vilar assez amer qui revient sur ses trente ans de théâtre au service du public et sur les combats qu'il a dû mener contre les tutelles et le manque de subventions".
Que retenir de ce passionné dont la postérité n'est sans doute pas à la hauteur de l'apport au monde culturel ? "Reste de Jean Vilar cet exemple d'un homme profondément engagé, qui n'a jamais dévié de son idéal, décrit Violaine Vielmas. C'est une figure que l'on mobilise beaucoup, notamment lors des discours de prise de direction des théâtres publics". La biographie épistolaire permet de mieux cerner un artiste à l'ambition aussi grande que noble. "Ce qui se dégage de ces correspondances, c'est l'image d'un homme resté intègre et droit toute sa vie. Il n'a jamais sacrifié son idéal de démocratisation du théâtre au profit de sa carrière personnelle". De Paulhan à Malraux, en passant par Ionesco, Anouilh, Picasso, Camus, Gide, Cocteau, Aragon, Pagnol pour ne citer qu'eux, la correspondance, qui s'étale de 1943 à 1971, n'est pas peu fournie.
*Violaine Vielmas, Jean Vilar, une biographie épistolaire, Actes Sud, 2023, 27 euros
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