Les fêtes de Noël sont l’occasion de faire la paix avec les autres, mais surtout avec soi-même. Que l'on soit croyant ou non, le besoin de se retirer du monde un moment pour faire le point peut être tentant. La retraite spirituelle, entre silence et échanges féconds, est un cheminement apaisé pour repartir sur des bases nouvelles.
Généralement, une retraite spirituelle s'effectue dans un lieu reculé, à l’image du sanctuaire Notre-Dame de la Salette, en Isère. Perché à 1800 mètres d’altitude, il présente un décor idéal pour opérer un recentrement sur soi : "Il se situe loin de la vie normale du village un peu plus bas. Il est au cœur de la nature, c’est la première chose qui parle aux pèlerins en arrivant", explique le père Antoni Skalba, recteur du sanctuaire. Une vue à couper le souffle qui ne lasse jamais Michelle, une auditrice habituée du lieu : "Cela faisait trois ans que je n’avais pas pu y aller. Avec le brouillard qui descendait et la neige, c’était magnifique". L'abbaye de Conques, dans l’Aveyron, constitue une étape majeure sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle. Elle n’a rien à envier à Notre-Dame de la Salette : "Quand les pèlerins partent du Puy-en-Velay et arrivent dans l’écrin du village resté dans son jus médiéval, cela vient poser un sceau sur leur démarche", raconte Frère Arnaud, le recteur de l’abbaye.
De plus en plus de personnes ressentent le besoin de faire le point sur leur vie en rompant avec leur quotidien : "Depuis le confinement, de plus en plus de personnes souhaitent faire des retraites spirituelles seules, mais accompagnées d’une Sœur. Ces personnes se retirent de leur vie professionnelle, sociale, familiale, pour faire le point, discerner et repartir sur des bases nouvelles", témoigne Sœur Annick Camene, directrice de l’Abbaye de Rhuys. Les communautés de religieux sont là pour accompagner les pèlerins dans leur cheminement, qu’ils choisissent de vivre leur retraite seuls ou en groupe, à l’image des Sœurs de l’abbaye de Rhuys, en Bretagne. Elles proposent des retraites animées sur sept jours et des séjours thématiques en parallèle des temps forts liturgiques, comme Noël ou Pâques.
Si les visiteurs n’ont pas besoin d’avoir la foi pour être accueillis dans un sanctuaire, l’objectif des religieux reste de donner un sens chrétien à la retraite. "Des gens viennent pour échanger à propos d’une spiritualité philosophique. Ces pèlerins manquent d’un phare pour vivre une vie avec un sens plus profond. Nous leur disons évidemment que ce phare qui manque, c’est l’évangile", révèle Sœur Annick. Il n’y a pas besoin de suivre les offices religieux, même si cela est apprécié par les communautés : "Être en communion avec la nature et faire le point sur soi-même ne suffit pas. Nous sommes là pour aider les pèlerins à trouver la paix intérieure du Christ", met en lumière Frère Arnaud.
Vivre au rythme des religieux pendant quelques jours permet de faire l’expérience d’un rapport au temps différent. Jacques, un auditeur, faisait des retraites d’une semaine quand il était étudiant dans l’abbaye de Cîteaux, en Côte-d’Or : "J’ai découvert une dimension du temps complètement nouvelle. Les moines vivent beaucoup plus proche de leur horloge interne que nous, dans le monde profane. Je vivais la plénitude de ces journées que je voyais s’écouler à échelle humaine. Quand je reprenais ma voiture, j’avais l’impression de retourner dans un monde où tout était précipité". Vivre une retraite spirituelle nécessite une forme d’acclimatation face à l’agitation permanente du monde moderne, rebondit Frère Arnaud : "Pour ceux qui ont l’habitude de vivre une vie active, changer la cadence est perturbant. Pour retrouver la paix intérieure, il ne suffit pas de poser ses bagages dans un monastère, il faut prendre le temps que les choses ralentissent".
Faire une retraite spirituelle permet de repartir pour une vie plus sereine, comme en témoigne Estelle, une auditrice qui s’est retirée en à l'abbaye d'Hautecombe en 2005 : "J’ai été entraînée là-bas deux semaines par des amis. J’ai pleuré pendant trois jours. Je me suis sentie dépouillée, comme si une vie nouvelle commençait". Vivre un temps reculé du monde, et parfois se recueillir dans la prière, peut être l’occasion de répondre à des crises existentielles : "le confinement a mis les gens face à eux-mêmes. Aujourd’hui, ils ressentent le besoin de savoir où ils vont et pourquoi, de savoir quoi faire de leur vie qui leur est donnée". C’est une opportunité de décharger tous ses soucis : "ce qu’on entend souvent, c’est que les visiteurs ont rechargé leurs batteries, qu’ils ont repris du courage. Même des jeunes viennent pour retrouver du discernement avant de prendre une décision importante", se souvient Antoni Skalba. "Les retraites religieuses représentent un moyen apaisé de se réconcilier avec sa vie", conclut-t-il.
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