Dans la soirée de mercredi 10 avril, le Parlement européen a définitivement adopté le pacte sur la migration et l’asile. Derrière ce terme un peu barbare, se cache de réels changements au sein de l’Union européenne en matière de politique migratoire. Ce pacte prévoit notamment de durcir et d'accélérer les contrôles aux frontières de l’UE, ainsi que de mettre en place un nouveau mécanisme de solidarité entre les Etats membres. Explications.
Quand il s’agit de politique migratoire, l’Union européenne ne lésine pas sur le processus parlementaire. Entamé en 2020, l’épineux chantier du pacte asile et migration s’achève deux mois avant les élections européennes. Dans la soirée de mercredi 10 avril, les députés européens ont adopté la dizaine de textes qui composent le nouveau Pacte sur la migration et l’asile. Ils doivent régir à la fois l’accueil, la solidarité entre les Etats, mais aussi le contrôle aux frontières.
C’est l’un des points clé du Pacte adopté par le Parlement européen mercredi 10 avril. Il prévoit que les pays membres des 27 s’engagent dans une procédure accélérée pour examiner les demandes d’asile, à proximité des frontières extérieures. “C’est probablement l’une des questions sur laquelle les Etats membres sont le plus à même d’avancer”, explique Yves Pascouau, conseiller municipal de Nantes et spécialiste des questions de l’immigration européenne.
Le texte prévoit ainsi un nouveau règlement sur le filtrage. Sur son site internet, le Conseil européen précise : “l’Union européenne souhaite assurer une identification rapide de la procédure correcte applicable à une personne entrant dans l'UE. Un mécanisme indépendant de suivi assurera le respect des droits fondamentaux tout au long du processus”. La vérification - le fameux filtrage - sera possible grâce à une identification, mais aussi des contrôles de santé et de sécurité, ou bien encore le relevé des empreintes digitales.
Deuxième élément phare de ce Pacte voté au Parlement européen : l’externalisation de la question migratoire. L’Union européenne souhaite traiter les vagues migratoires avant leur arrivée à la porte de l’Europe. “Pour le dire de manière un peu triviale, l’externalisation consiste à faire faire aux autres, le boulot que l’on ne veut pas faire”. En d’autres termes, le principe est d’engager les pays tiers par lesquels arrivent et transitent les personnes en situation de migration. “Ça peut être la Tunisie, l’Egypte, la Turquie, le Niger, le Nigeria”, précise Yves Pascouau.
Cette externalisation a évidemment un coût pour l’Union européenne. Cette demande est accompagnée d'un ensemble d'incitatifs qui vont être déployés en fonction des relations que les États membres et/ou l'Union européenne entretiennent avec eux. “Ça va être, dans le cadre de l'accord entre les États membres de l'Union européenne et la Turquie, le décaissement de 2 fois 3 milliards d'euros, de manière à inviter la Turquie à contrôler davantage ses frontières”, prend comme exemple le spécialiste.
Aujourd’hui, la politique migratoire européenne est fondée sur le règlement de Dublin, qui vise à déterminer quel Etat membre de l’Union européenne est responsable d’une demande d’asile. “Il ne fonctionne pas”, estime Yves Pascouau. “Il a pour effet de faire peser une charge très importante sur les Etats qui sont situés à la périphérie, notamment au sud de l’Union européenne”. La crise migratoire de 2015 l’atteste.
Désormais, le nouveau pacte asile et immigration accompagne ce dispositif de Dublin avec un mécanisme de solidarité obligatoire. Quelles options ce nouveau système offre-t-il aux pays ? “Schématiquement, soit je participe à la solidarité en accueillant sur mon territoire des demandeurs d’asile ou des personnes en quête de protection, soit je ne souhaite pas accueillir sur mon territoire ces personnes et donc je participe aux financements d’opérations liées à la gestion des migrations”. Cela peut être par exemple le financement des retours des personnes qui ne sont pas autorisées à entrer et à séjourner sur le territoire.
La nouveauté ici est la part belle donnée à la solidarité entre pays membres. “L’accueil sur mon territoire de personnes que mon voisin n’est pas à même d'accueillir correctement n'est plus une obligation. En revanche, si vous souhaitez contribuer en termes de solidarité, vous pouvez toujours payer pour le retour de personnes en situation irrégulière”, détaille Yves Pascouau.
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