Depuis des décennies, ils sont nombreux à venir murmurer à l’oreille des présidents. Le soir venu, artistes, industriels, hommes politiques viennent discuter avec le chef de l’État pour partager un verre ou discuter d’un dossier. C’est un rituel que le journaliste Renaud Revel a étudié. Il publie "Les visiteurs du soir" (éd. Plon).
"C’est un phénomène typiquement français, un rituel monarchique hérité de la cour de Louis XIV", affirme Renaud Revel d’entrée de jeu. "L’Élysée a toujours été le lieu vers qui allait l’arrière ban de la classe politique", poursuit-il.
Ce rituel des visiteurs du soir n’existe pas dans les pays voisins. "L’Élysée est un lieu à part. C'est un petit palais avec un labyrinthe de bureaux. Ses locataires ont souvent été très seuls", raconte l’auteur, prenant l'exemple de Georges Pompidou, François Mitterrand ou encore François Hollande qui avaient pour habitude de fuir les lieux le soir venu. "L’exercice du pouvoir est un exercice solitaire", affirme Renaud Revel.
"Une fois que le palais se vide entre 18h et 20h, on voit des gens arriver pour un dossier, une confidence", affirme Renaud Revel. Ces rendez-vous ne sont pas notés dans l’agenda du président. Ils se tiennent plus ou moins informellement. Les visiteurs sont "des gens sur lesquels le président peut s’appuyer, avec qui il peut s’épancher. Le président de midi n’est pas celui de 18h, il déboutonne et parle très librement", a constaté Renaud Revel.
Si cette tradition est ancienne et se perpétue depuis Charles de Gaulle, Emmanuel Macron a imposé un nouveau style. "C’est un technophile, il n’a pas de passé politique, pas de réseau, pas de premier cercle et donc pas de visiteurs. Il reçoit peu mais il traite des dossiers par SMS, très bien écrits. Le soir venu, Emmanuel Macron a une vie très classique et familiale, à l’inverse d’un Mitterrand et d’un Hollande qui dès 18h voyaient arriver un nombre incalculable de visiteurs", affirme le journaliste.
Chaque président reçoit des visiteurs à son image. "Si on regarde Pompidou, ses visiteurs étaient tout sauf de politiques : des artistes, des intellectuels. On voit ce qu’était Pompidou, c’est-à-dire quelqu’un de lettré", affirme Renaud Revel. À l’inverse, Emmanuel Macron reçoit plutôt des industriels et des hommes d’affaires. Jacques Chirac, lui, recevait très peu de visiteurs, estimant qu’il fallait "laisser la politique à des politiques", explique Renaud Revel.
Chaque matin, Pierre-Hugues Dubois reçoit une personnalité au cœur de l’actualité nationale ou internationale. Décryptage singulier de notre monde et de ses enjeux, mais aussi découverte d’un parcours, d’un engagement. Au cœur de la grande session d’information du matin, une rencontre quotidienne pour prendre de la hauteur avec bienveillance et pour donner du sens à l’information.
RCF est une radio associative et professionnelle.
Pour préserver la qualité de ses programmes et son indépendance, RCF compte sur la mobilisation de tous ses auditeurs. Vous aussi participez à son financement !