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"Tous les jours ce Bataclan, on en fait une force": le témoignage d'un rescapé des attentats du 13 novembre

Un article rédigé par Clara Gabillet - RCF,  - Modifié le 13 novembre 2020
Le dossier de la rédaction"Tous les jours ce Bataclan, on en fait une force": le témoignage d'un rescapé des attentats du 13 novembre
Cinq ans après les attentats du 13 novembre à Paris et à Saint-Denis, la page est presque tournée pour Pierre Cabon et son épouse Myriam, qui continuent leur passion : voyager.
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Le 13 novembre 2015 était une journée comme les autres pour Pierre Cabon. Ce jeune homme de 25 ans, à l’époque commercial, termine sa journée en allant au concert des Eagles of Death Metal au Bataclan avec deux amis. Mais très vite, la soirée devient un cauchemar. Des terroristes entrent dans la salle et tuent des dizaines de personnes, armés de kalachnikov. "À un moment on commence à entendre comme des ballons qui éclatent derrière nous. Ce sont les premiers coups de feu. J'ai l'impression de me faire toucher dès le début de l'attaque et j'ai un black-out de plusieurs minutes", raconte Pierre.

Pierre est un survivant. Il est touché par une balle qui atteint sa moelle épinière. Il s’effondre, a un trou noir et comprendra en se réveillant que ses jambes ne fonctionnent plus. Le jeune homme devient paraplégique, passe 15 jours en service de réanimation, puis part pour 7 mois de rééducation à l'hôpital des Invalides à Paris. "J'ai commencé à réapprendre à vivre en fauteuil. Ça a été le réapprentissage d'une vie classique où on reçoit les copains, on essaye de sortir du centre pour aller faire des balades dans Paris", se souvient Pierre.

"Il aurait pu y rester"

Le soir du concert, il est en couple depuis cinq mois avec Myriam. La jeune femme attend toute la nuit de l'attentat sans nouvelle de son état de santé, et apprend le lendemain qu'il est opéré. Un soulagement. Malgré le drame et avec le recul de plusieurs années, ces optimistes convaincus préfèrent voir le verre à moitié plein : Pierre est en vie. "La balle a traversé le poumon de Pierre, il aurait pu y rester. Ses copains sont encore vivants. Quand on met tout ça bout à bout, on ne peut pas se permettre de se plaindre", confie Myriam. 

Une de leur chance dans cet événement, c’est aussi que Pierre n'a aucun souvenir de l’attaque. "Pour le moment, mon cerveau n'a rien fait ressortir de ce qu'il a potentiellement enregistré pendant le black-out. Je n'ai rien qui me hante. On est assez détachés désormais", souffle-t-il, soulagé de ne pas avoir de choc post traumatique. 

Continuer  à vivre comme avant

La vie a suivi presque normalement son cours pour Pierre et Myriam. Ils ont emménagé ensemble et ont également continué leur passion : voyager. Au début ce n’était pas facile car il fallait transporter beaucoup de matériel pour Pierre. Puis il y a ce déclic, quand il part en séjour avec l’association "Comme les autres", qui permet aux personnes handicapées de faire des activités à sensations fortes. Le couple change aussitôt d’état d’esprit.

Ils partent quelques mois plus tard aux États-Unis pour leur voyage de noces. Un moment fort dont se souvient parfaitement Myriam : "On redécouvre les plaisirs de la nature. Et à un moment, on prend un hélicoptère pour survoler le Grand Canyon et on a une émotion incroyable car trois ans avant on ne pensait pas que c'était possible." Très vite une idée germe dans leur esprit : "On se dit qu'il faut qu'on crée quelque chose qui permette aux gens de dépasser les barrières psychologiques liées au fauteuil", poursuit la jeune femme.

Une association pour promouvoir le voyage à fauteuil

C'est ainsi que naît leur association et média "Wheeled world". Sur ce blog, ils partagent leurs voyages afin de montrer qu'ils sont accessibles même à fauteuil. Myriam et Pierre ont entamé un tour du monde, mis sur pause à cause du Covid-19. Un projet qui leur a permis de retrouver une vie normale après l’attentat. "Tous les jours ce Bataclan on en fait une force, affirme Pierre. On a voulu transmettre cette chance qu'on avait à d'autres. C'est pas une victoire sur le Bataclan, c'est la continuité de notre état d'esprit."

Leurs regards sont pétillants et leurs paroles remplies d'optimisme. Toutes leurs initiatives leur ont permis de continuer à vivre comme avant. "Il y a des choses qu'on nous a enlevées mais qu'on a récupérées. On nous a un peu enlevé de cette insouciance et cette spontanéité qui nous caractérisaient. Mais tout ce qui aurait pu rester, on l'a effacé", explique fièrement Myriam.

Cinq ans après les attentats, Pierre et Myriam n’appréhendent presque pas cette journée du 13 novembre ni le procès de ces attentats qui devrait avoir lieu en septembre prochain à Paris.

 

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