Familles monoparentales : un soutien essentiel aux mamans solos
En partenariat avec LE SECOURS CATHOLIQUE-CARITAS FRANCE
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C’est un chiffre qui donne le tournis. 90 % des familles monoparentales composées d’un ou plusieurs enfants handicapés sont gérées par des mères solos. Si chacun peut concevoir les difficultés auxquelles sont confrontés tous parents, le défi d’élever seule un enfant en situation de handicap est tout autre. Gestion du quotidien, isolement, affaiblissement physique, démarches administratives, c'est un vrai parcours du combattant. Une émission Je pense donc j’agis présentée par Melchior Gormand.
Pour les mamans solos, tenir le cap chaque jour relève parfois de l'insurmontable. Le combat quotidien de ces mères est un phénomène de société qui nécessite une meilleure visibilité. "Au début, on voulait faire un sujet sur les familles monoparentales avec des enfants handicapés, mais on s'est rendu compte que ce n'était presque que des mamans, alors on a voulu rendre visible l’invisible", explique Christel Quaix, journaliste à la revue Ombres & Lumière, publiée par l’Office chrétien des personnes handicapées (OCH).
Comment se déroulent les premières années pour ces jeunes mamans solos ? Comment s’organise le quotidien ? Sur quelles ressources ces mères peuvent-elles s’appuyer ?
Quand un enfant naît avec un handicap, c'est toute la famille qui prend un choc. Pour Domitille Coiffet, maman de trois garçons, dont le dernier, Clément, est atteint de déficiences psychomotrices, le choc a été double. À peine deux mois après la naissance de son fils, son conjoint est parti. "Quand on a appris son problème, j’étais déjà seule. J’ai dû encaisser ça sans soutien". L’accumulation de fatigue et de stress pèse sur le corps, et la mère célibataire en a fait les frais : "Trois ans après la naissance de Clément, j’ai fait un AVC, même si on ne peut pas être sûr de la cause, je suis intimement convaincue que c’est lié aux trois années difficiles que je venais de vivre". Aujourd’hui, Clément a 15 ans. Et depuis sa naissance, Domitille Coiffet n’a presque pas eu le temps de souffler.
Élever un enfant en situation de handicap demande une force inouïe. Sarah Moreno, elle, a tenu tant qu’elle a pu. Mère de quatre enfants, dont deux en situation de handicap, elle a passé l’été à s’occuper d’eux sans répit, mais non sans conséquences : “À la rentrée, j’ai fait un burn-out”. Un épuisement physique et mental qui touche de nombreuses mères, confrontées à une solitude pesante, à des nuits trop courtes, et à un quotidien parfois trop lourd à porter, en particulier les premières années.
Le handicap n’arrive pas seul
Ce combat est souvent invisible. Ludivine Joël, participante d'un Chantier-éducation-atypiques des Associations familiales catholiques, élève seule sa fille Giulia, 10 ans, hyperactive et atteinte d’un autisme léger. Elle a longtemps cherché des réponses, pour comprendre comment aider sa fille : “Durant les premières années, la crèche puis l’école maternelle me rapportaient les comportements déplacés de Giulia, mais je ne savais pas ce qu’elle avait. Je me sentais coupable”.
Cette culpabilité, beaucoup de mères seules la connaissent bien, alimentée par l’incompréhension de l’entourage et le regard parfois sévère du corps médical, qui peut laisser les mères dans le flou. Elise Etchamendy, psychologue à Paris, relate le cercle vicieux dans lequel s'engagent ces mères de famille : “Les premières souffrances arrivent vite après l’annonce du handicap. Puis s'ajoutent la solitude, les maux physiques et la précarité financière. Le handicap n’arrive pas seul”.
Avec le temps, ces mères apprennent à jongler entre leur travail, les soins à apporter et les démarches administratives. “C’est un vrai parcours du combattant”, résume Christel Quaix, journaliste spécialisée sur le sujet. Mais, à force d’enchaîner les journées sans pause, les corps s’affaiblissent.
Domitille Coiffet décrit une routine implacable, inscrite en elle : “Au quotidien, je suis en mode pilote automatique, je fais ce que je dois faire sans réfléchir”. Cette routine apporte son lot de culpabilité, "je passe tellement de temps à m'occuper de Clément que je culpabilise pour mes deux aînés", mais aussi de fatigue et de stress. "Clément représente une charge énorme, ça mange votre quotidien". Confrontée à cette situation, Domitille Coiffet a pu compter sur sa famille et ses amis, qui offre de temps en temps des parenthèses dans la vie de cette maman de trois enfants.
Face à ce poids, certaines finissent par prendre des décisions douloureuses. Après des années de lutte, Domitille a accepté de placer son fils en Institut médico-éducatif (IME). "J’ai longtemps redouté de le faire, car ça signifiait reconnaître que mon enfant n’aurait pas une 'vie normale'. Mais c’était la meilleure décision de ma vie". Pour elle, cela a permis de souffler, de retrouver un équilibre avec ses deux autres fils : "Au bout d’un moment, j’ai comme fusionné avec Clément, presque comme un 'couple'. À côté de ça, quand je m’occupe des deux autres, je dois parfois lui expliquer que là, tout de suite, je ne peux pas m’occuper de lui".
Demander de l’aide n’est pas toujours évident. Elise Etchamendy, psychologue à Paris, l’observe chez beaucoup de ses patientes : "Le choc du diagnostic peut créer de l’isolement, et il faut du temps pour reconstruire des liens". Certaines culpabilisent, d’autres ne savent tout simplement pas vers qui se tourner. Pourtant, des solutions existent.
Christine Mancheron, membre de l’association Cœur de maman et confrontée au handicap de sa fille, rappelle l’importance du soutien entre pairs : "Nos réunions permettent aux mères de parler, d’être écoutées, de ne plus se sentir seules". Avec 50 lieux de rencontre en France, et des possibilités de réunion en visioconférence, ces espaces offrent un répit précieux, considéré comme un trésor par beaucoup de participantes, comme Christine Mancheron.
L’aide entre maman est primordiale, elles se comprennent, partagent les mêmes épreuves, sont sur la même longueur d’onde
Christel Quaix souligne à quel point ces groupes sont essentiels : "L’aide entre mamans est primordiale, elles se comprennent, partagent les mêmes épreuves, elles sont sur la même longueur d’onde". Un soutien qui peut tout changer, à condition d’oser faire le premier pas. Ludivine Joël, elle, participe aux réunions des AFC, qui comptent plus de 20 000 familles adhérentes et 276 lieux d'accueil locaux.
Pour Domitille Coiffet, Clément a eu une vrai chance d’avoir vite une place en IME : "Il a eu cette place après que j’ai changé de département, car en fonction du lieu, il y a des différences de service énormes. J’ai une amie dans la même situation que moi, elle est partie au Canada pour que ses enfants soient pris en charge au même endroit".
Bien qu’elles ne soient pas toujours mises en avant ou proposées aux foyers, des aides d’État existent également pour soutenir les mamans célibataires ayant des enfants en situation de handicap, comme les Allocations d'Éducation de l'Enfant Handicapé (AEEH).
Cette émission interactive de deux heures présentée par Melchior Gormand est une invitation à la réflexion et à l’action. Une heure pour réfléchir et prendre du recul sur l’actualité avec des invités interviewés par Véronique Alzieu, Pauline de Torsiac, Stéphanie Gallet, Madeleine Vatel et Vincent Belotti. Une heure pour agir, avec les témoignages d’acteurs de terrain pour se mettre en mouvement et s’engager dans la construction du monde de demain.
Intervenez en direct au 04 72 38 20 23, dans le groupe Facebook Je pense donc j'agis ou écrivez à direct@rcf.fr
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