À la veille des 23è Jeux olympiques d’hiver de PyeongChang 2018, tous les regards sont braqués sur les deux Corée. Les athlètes du pays hôte et les 22 sportifs envoyés par la Corée du Nord défileront ensemble lors de la cérémonie d’ouverture, sous un même drapeau. Pour faire les Jeux, faut-il faire la paix?
Même symbolique, le rapprochement entre les deux Corée ne plaît pas à tout le monde. Des centaines d'opposants ont accueilli par une manifestation d'hostilité l'arrivée des 120 artistes nord-coréens dans le port de Mukho, sur la côte orientale de la Corée du Sud. En substance, les manifestants disaient ceci : comment parler de paix alors que la Corée du Nord prépare ses missiles et ses armes nucléaires ?
Disons-le d'emblée, "la réal-politique est plus puissante que l'olympisme et la paix par le sport". Pour Patrick Clastres, l'idée selon laquelle le sport permet de rétablir la paix relève d'une "opération marketing" construite par le Comité international olympique (CIO). "En plus de faire l'apologie du sport, faire aussi l'apologie de la paix, et de la paix sportive, la paix diplomatique : on peut s'imaginer, admet Pierre Rondeau, que ce soit non pas un véritable travail diplomatique, mais un travail marketing, un travail de médiatisation."
Ce n'est pas la première fois, depuis que les deux Corée existent, que des athlètes des deux pays défilent ensemble. Cela s'est vu en 2000 à Sydney, en 2004 à Athènes et en 2006 à Turin. "Et ça n'a eu absolument aucun impact sur les relations nord / sud-coréennes", souligne Patrick Clastres.
À la veille de l'ouverture des Jeux, la Corée du Nord a organisé un défilé militaire. Une "situation paradoxale", selon Pierre Rondeau, où on fait "à la fois l'apologie de la paix" et où "on assiste à une manifestation militaire". Mais la "paix n'a jamais été construite à partir des institutions sportives, c'est toujours le fait des pouvoirs d'État", rappelle Patrick Clastres, pour qui "le leader nord-coréen le prouve ici, puisque c'est lui qui est le maître des Jeux en quelque sorte".
La situation n'est donc pas si paradoxale que cela pour l'historien. Car en jouant "sur les deux tableaux" et "soufflant le chaud et le froid", Kim Jong-un ne fait que poursuivre la politique de ses prédécesseurs. "Ça fait partie de sa stratégie, la sienne, celle de son père, celle de son grand-père." Une dictature, faut-il le rappeler, qui "n'a pas à subir les changements démocratiques de gouvernements". Et qui peut à loisir observer "l'incapacité" de la Corée du Sud associée aux États-Unis à résoudre la situation entre les deux Corée.
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