En 2018, Noémie Calais a quitté son poste dans un cabinet de conseil londonien, pour épouser la vie d’éleveuse de cochons dans le Gers. Un virage à 180 degrés qu’elle raconte avec passion dans son livre "Plutôt nourrir. L’appel d’une éleveuse", co-écrit avec Clément Osé et sorti en septembre 2022 aux éditions Tana. Elle partage ses réflexions sur le monde de l’élevage et évoque la façon dont elle fait face à la mort de ses animaux.
Il aura fallu attendre une remise en question sur son travail derrière un bureau et des soucis de santé causés par la pollution et les ondes électro-magnétiques, pour que cette diplômée de Sciences Po, passée par Boston, Hong-Kong et enfin Londres, se décide à sauter le pas. Pour fuir la ville et les ondes, Noémie Calais a trouvé refuge dans les fermes (de préférence le plus loin possible des antennes relais) et y a trouvé sa vocation.
Rapidement, elle se "reconnecte à ses rêves d’enfant", qui était d’avoir un zoo et un restaurant, pour se lancer à corps perdu dans l’élevage de cochons noirs. Une race qu’elle avait découvert il y a plusieurs années via son ex-compagnon. "J’avais adoré le contact avec ces animaux. Ils ont une certaine sociabilité, un côté joueur, franc, drôle, ils viennent très facilement au contact. C’est assez incroyable mais ils adorent parler, ils ont des tas de grognements et ça me fait penser à la relation qu’on peut avoir avec un chien. Très vite, ils répondent à leur prénom", sourit-elle.
Et pour cette éleveuse passionnée et amoureuse de ses cochons, ce n’est pas toujours évident de devoir les emmener à l’abattoir, situé à deux heures de route aller-retour de sa ferme. « Quand je les mets dans la bétaillère, j’ai l’impression de les avoir trahis. Je suis la main qui nourrit, qui caresse, à quel moment je peux être la main qui abat ? », s’interroge-t-elle. Un raisonnement qui l’amène à revendiquer le souhait d’abattre elle-même ses animaux. Pour le moment, la loi autorise « l’abattage familial à la ferme », à raison de deux animaux par an, uniquement destinés à la consommation familiale de l’éleveur.
Dans son livre, on peut noter une phrase très forte qui résume cette idée : "Tuer, c’est aussi se transformer soi-même. J’ai tué une part d’innocence en moi, elle est devenue respect." Elle explique : "Lorsqu’on a tué un animal de sa propre main, on ne peut plus jamais consommer de viande de la même manière, on ne peut plus gâcher un bout de viande comme un abat." Une réflexion qui pousse l’agricultrice à souhaiter que chaque carnivore puisse faire l’expérience de tuer soi-même un animal. "C’est une utopie, mais je le souhaite de tout mon cœur, parce qu’on ne peut pas manger de la viande dans l’ignorance, il faut être en conscience. On mange quand même un être qui a été vivant, sensible. Donc c’est quelque chose qu’on ne peut pas faire à la légère", insiste-t-elle.
Désormais, pour son "équilibre à la fois économique, mental et émotionnel", et pour ne pas avoir à emmener ses animaux à l’abattoir trop souvent, Noémie Calais a réduit son cheptel afin d’atteindre le nombre de dix mères et d’une quinzaine de cochons à l’engraissement. La néo-rurale cherche aussi à donner une autre fonction à ses cochons en leur redonnant leur rôle initial : absorber les déchets des fermes et des territoires. Pour que ses animaux chéris ne vivent et ne meurent pas juste pour du saucisson.
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