En finir avec le préjugé : "l‘antisémitisme est dû à la population musulmane"

Je ne sais pas si vous avez vu la manifestation annuelle du Comité du 9 mai a eu lieu ce samedi et a rassemblé 600 militants d'ultra-droite à Paris. Et pendant cette manifestation, un manifestant a effectué un salut nazi.  Et donc, je me disais que ce matin était l’occasion de revenir sur l’antisémitisme, ses causes et surtout notamment sur le préjugé selon lequel l‘antisémitisme en France aujourd’hui existerait surtout dans les populations musulmane. 

Définition des termes

La définition de l’antisémitisme reprise par les institutions est celle de l’IHRA  : l’antisémitisme est une certaine perception des Juifs qui peut se manifester par une haine à leur égard. Sa manifestation est punie par la loi. On peut faire une différence avec l’antisionisme qui est la critique d’un projet politique et qui est légal. Mais attention, utiliser le mot sioniste n’enlève pas l’antisémitisme d’un propos, le sujet est dans l’essence, est-ce que le propos critique les juifs ou est-ce que le propos critique uniquement un projet politique ? 

Et quand on parle d’antisémitisme lié à la population musulmane, on parle en général d’un antisémitisme lié au conflit en Israël/Palestine et qui reprends la haine des juifs, le négationisme ou autre préjugés comme outil de soutien à la Palestine. 
 

L'origine de ce préjugé

Alors déjà, la France n’accepte pas avoir été antisémite. L'antisémitisme a marqué plusieurs fois l'histoire de la France, comme en 1895,  lors de l'Affaire Dreyfus. Il est aussi devenu une doctrine politique comme en 1940 pour inspirer des lois comme les lois de Vichy sur le statut des juifs. Mais on entend quand même beaucoup de discours expliquant que l’antisémitisme a toujours été extérieur à la France et que la France a uniquement été victime. 

Ensuite, ce préjugé est renforcé aujourd’hui par l’extrême droite, qui utilise l’antisémitisme comme un outil de stigmatisation des francais musulmans. Alors bien sûr, c’est positif que l’extrême droite politique veuille combattre l’antisémitisme. Par contre, vouloir combattre sans reconnaître l’utilisation qu’elle en a faite elle-même dans l’histoire de France, c’est contre productif car c’est s’engager dans une lutte avec des outils inappropriés. Ensuite, utiliser l’antisémitisme pour avoir un discours de haine contre une autre population minoritaire, c’est une mise en abîme dont les conséquences sont très graves.

D’où vient l’antisémitisme actuel ? 

L’antisémitisme actuel en France est donc un mélange d’héritage de l’antijudaïsme chrétien, des politiques antisémites de Vichy, de théories négationistes ou complotistes sur le pouvoir des juifs, tout cela appliqué et renforcé par les faits d’actualité. 

C’est par exemple, l’idée d’un contrôle des médias par les Juifs ou encore le reproche fait au peuple juif dans son ensemble d’être responsable d’actes commis par un seul individu ou groupe comme l’idée selon laquelle les Juifs seraient collectivement responsables des actions de l’État d’Israël. Et je ne dis pas qu’il n’y a pas d’antisémitisme chez les français de confession musulmane, je dis qu’il y a de l’antisémitisme chez tous les français et les françaises.
 

Quel est l’impact alors de ce préjugé ?

L’impact de ce préjugé est qu’on ne combat donc pas bien l’antisémitisme. Ses racines complexes et diverses sont niées et donc les outils pour renverser ces années de haine ne seront pas adaptés. Il faut que l’on laisse faire la chaîne depuis la recherche jusqu’à la pédagogie pour que soit mis en place des outils pertinents d’éducation contre l’antisémitisme. 

Et ensuite, à chacun et chacune d’entre nous de faire également attention à nos propres préjugés, à ceux de nos familles et de ne pas se laisser instrumentaliser parce que ça arrange de se déresponsabiliser. Mettons un peu de sincérité et de lucidité dans nos analyses, c’est uniquement en faisant cela que les français et les françaises de confession juive se sentiront en sécurité dans leur propre pays.