Rendez-vous à la Fondation Louis-Vuitton à Paris pour une de ces expositions dont la fondation a le secret et surtout les moyens. En l’occurrence, réunir les œuvres de deux géants de la peinture, le Français Claude Monet et l’Américaine Joan Mitchell, sur les quatre niveaux du bâtiment situé au bois de Boulogne. La fondation a de très gros moyens et bénéficie du prestige du groupe LVMH. Ce qui lui permet de réussir des coups d’éclat. Comme par exemple convaincre trois musées américains de prêter leur morceau d’un triptyque de Claude Monet séparé à la fin des années 1950.
On est certainement ébloui par la qualité des œuvres présentées. Mais on croule un peu sous la quantité, ce qui épuise le regard. Et surtout, on s’interroge sur la pertinence du rapprochement entre ces deux peintres, Claude Monet et Joan Mitchell.
Le Monet présenté à l’exposition est celui de la dernière période, celle des Nymphéas, où le vieil artiste frôlait l’abstraction en peignant son jardin de Giverny. Or ces toiles ont été une source d’inspiration importante pour les jeunes peintres abstraits américains après la Seconde Guerre mondiale, qu’il s’agisse de Sam Francis, Mark Rothko, Ellsworth Kelly ou, justement, Joan Mitchell.
Motif supplémentaire de ce rapprochement, Joan Mitchell qui est née à Chicago en 1925, s’est installée en France dans les années 1950. Et, en 1967, elle a acheté une demeure à Vétheuil, à quelques kilomètres de Giverny et dont la terrasse dominait une maison où Monet a vécu plusieurs années.
Dernière dimension commune, l’un et l’autre étaient des peintres inspirés par les paysages, même si Joan Mitchell ne les peignait pas sur le motif, mais la nuit dans son atelier. Les mettre en parallèle n’est évidemment pas sans intérêt.
D’abord parce que Joan Mitchell se défendait d’une proximité particulière avec Monet. Apparemment, cela l’agaçait beaucoup que l’on voie en elle une disciple du maître impressionniste sous prétexte qu’elle vivait à Vétheuil. Elle se sentait bien davantage en lien avec Van Gogh, Cézanne ou Matisse.
Mais ma question principale est la suivante : l’œuvre de Joan Mitchell justifie à elle seule une grande exposition. Pourquoi la placer sous la tutelle de Monet, sinon, j’imagine, pour faire venir davantage de visiteurs ?
Soyons honnêtes, il y a en fait deux expositions à la fondation Vuitton. L’une sur le parallèle Monet/Mitchell, l’autre entièrement consacrée à Joan Mitchell.
On peut ainsi prendre toute la mesure d’une œuvre fulgurante. Mitchell peignait dans de très grands formats des explosions de couleurs bouleversantes. Beaucoup de ses œuvres étaient des polyptyques de trois ou quatre panneaux qu’elle peignait séparément, car son atelier n’était pas suffisamment grand pour en juxtaposer plus de deux. Des tableaux lumineux en dépit des idées sombres qui hantaient cette femme décédée à Paris en octobre 1992.
J’aurais aimé qu’une artiste aussi exceptionnelle soit la seule héroïne de l’exposition. Je me console en me disant que des amateurs de Monet vont peut-être, à cette occasion, faire une belle découverte.
> Exposition Monet - Mitchell, Fondation Louis-Vuitton, jusqu’au 27 février 2023
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